Chapitre 33-2

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C'est alors que je remarquai que la vilaine entaille qu'elle avait au front quelques heures plus tôt ainsi que les différentes petites blessures et égratignures, qu'elle arborait sur ses membres suite à notre folle épopée dans les bois, avaient pour la plupart toutes disparu. Je ne pus m'empêcher d'ouvrir de grands yeux, ce qui évidement n'échappa pas à Worth qui remarqua à son tour le phénomène.

— Vous êtes aussi une métamorphe, alors ? lui demanda-t-il d'un air résigné comme s'il s'attendait dorénavant à n'être entouré que de monstres.

Je ne savais pas trop comment je devais le prendre.

— Non ! s'écria Cassie comme s'il venait de l'insulter. Enfin... je ne sais pas... je ne sais plus, finit-elle en me lançant un regard d'excuse et en éclatant en sanglots.

Je me levai en oubliant la couverture qui tomba à mes pieds et m'appuyai sur la table. J'avais beau être en partie métamorphe, des côtes cassées, ça ne se réparait pas en quelques heures, même chez nous. Worth, par réflexe, commença à se lever pour la ramasser mais y renonça très vite, une grimace évocatrice déformant ses traits. Je m'approchai doucement de Cassie et eus le réflexe de vouloir la prendre dans mes bras, mais vu sa réaction véhémente à la demande de l'inspecteur, j'hésitai et finalement préférai m'abstenir.

Elle s'en rendit compte et me lança un regard désemparé et contrit avant de se jeter d'elle-même dans mes bras. J'encaissai le choc sans broncher pour ne pas l'effaroucher, mais ce ne fut pas facile. Son geste me fit mal aux côtes mais surtout beaucoup de bien au cœur. Elle ne me rejetait pas, contrairement aux autres, ce qui prouvait que je pouvais vraiment lui faire confiance. Je la gardai dans mes bras le temps que ses sanglots s'apaisent puis d'elle-même elle me repoussa doucement, prit une grande inspiration et prit la parole sans aucune incitation de notre part.

— Quand... quand j'étais là-bas, ils me maintenaient la plupart du temps sous sédatifs. Mais quand j'arrivais à émerger pour me nourrir et... je remarquais des traces de piqûres sur mes bras et sur mes jambes quelquefois. Tout à l'heure dans l'ambulance, j'ai commencé à me rendre compte que mes égratignures s'estompaient à vue d'œil et j'ai fait le rapprochement avec la trans... avec Adam. J'espérais lui demander s'il savait ce qu'ils m'avaient fait mais... il n'est pas revenu avec vous alors... je n'ai rien dit, finit-elle piteusement.

Son discours était haché et peu cohérent, mais suffisant pour que l'on comprenne parfaitement son désarroi. Je lui pris la main pour la rassurer et cherchai son regard.

— Ne t'inquiète pas, je demanderai à Adam pour toi. Et à ta place, je ne m'en ferais pas trop. Tu seras sûrement comme moi, dotée d'une constitution d'enfer mais sans les inconvénients poilus, lui dis-je en souriant, espérant la faire rire.

Je n'obtins qu'un petit sourire timide, mais c'était déjà mieux que rien.

— Pourquoi tu me l'as caché ? Tu ne me faisais pas confiance ? me demanda-t-elle d'un ton douloureux.

Je me contentai de la fixer pendant quelques secondes sans réagir. J'avais eu peur qu'elle me rejette, pas qu'elle m'en veuille parce qu'elle croyait que je n'avais pas confiance en elle ! Cela ne fit que confirmer le fait que ma confiance et mon amitié étaient plus que bien placées.

— Je ne te l'ai pas caché, je n'en savais rien moi-même. En vérité, je l'ai appris le lendemain du jour où tu as disparu, et j'ai accepté de les aider pour qu'ils m'aident à te retrouver. La seule chose que je t'ai caché, ce sont « mes voix »... enfin ce que je prenais pour des voix. J'avais peur que tu me prennes pour une folle, comme tout le monde. Raison pour laquelle je n'en parlais jamais. Le bon côté de toute cette histoire, c'est que maintenant au moins, je sais d'où ça vient et que je suis sûre de ne pas avoir besoin d'une camisole.

Je réussis à esquisser un demi-sourire, mais vu les regards qu'ils me lancèrent, je ne dus tromper personne. Après mon explication, personne ne remit le sujet sur le tapis et nous essayâmes de confronter nos versions pour que les faits aient l'air le moins étrange possible. L'inspecteur avait fait de son mieux pour préserver le secret des métamorphes, allant même jusqu'à faire tomber les quelques échantillons de sang qu'ils avaient trouvés à la ferme. En ce qui concernait le labo, pas d'inquiétude à avoir car tout était parti en fumée.

En revanche, l'homme que tout le monde appelait le professeur avait disparu sans laisser de traces. Il n'avait même pas participé à la traque dans les bois, quelqu'un l'ayant prévenu à temps. Grâce aux relevés des appels, les collègues de Worth étaient rapidement remontés jusqu'à l'homme responsable des fuites qui n'était autre que le petit jeune boutonneux de l'accueil. Pas étonnant qu'ils nous soient tombés dessus aussi rapidement après ma sortie du bâtiment !

Il restait juste à inventer une histoire crédible, et c'était là le hic ! Heureusement, Worth nous assura qu'il s'en occuperait et que nous n'avions donc plus à nous en inquiéter. J'étais tellement fatiguée que je le crus sur parole. Avant que nous ne partions, l'inspecteur tint absolument à ce que j'enfile un de leurs horribles survêtements gris. Bien qu'il soit trois fois trop grand pour moi, il m'assura qu'il serait beaucoup plus chaud et confortable que ma pauvre couverture qui était, il fallait bien se l'avouer, tout sauf pratique. Nous quittâmes donc le commissariat tous les trois, comme si nous nous rendions de nouveau à l'hôpital. Nous prîmes ma voiture, restée aux alentours du commissariat, et nous déposâmes l'inspecteur aux urgences.

— Prenez soin de vous et merci pour tout ce que vous avez fait, lui dis-je doucement alors qu'il sortait douloureusement de la voiture.

— De rien, tout le plaisir a été pour moi, dit-il sur le ton de l'ironie. Le moins que l'on puisse dire est que l'on ne s'ennuie pas avec vous. J'aimerais vous dire que j'espère ne plus jamais vous revoir, mais ce ne serait pas réaliste. Plutôt dans d'autres circonstances ? Et si jamais vous avez encore des problèmes... n'hésitez pas à m'appeler.


Il me fit un petit sourire, un signe de main à Cassie et partit cahin-caha versl'entrée brillamment éclairée de l'hôpital, avant que je n'aie eu le temps derépondre quoi que ce soit. Je repris la route et nous finîmes enfin par rentrerchez nous. L'appartement était toujours dans le même état catastrophique que ladernière fois, et Cassie eut une expression désolée quand elle découvritl'étendue des dégâts. Nous nous regardâmes et finîmes par éclater de rire. Unrire libérateur et un brin hystérique qui nous fit glisser le long du mur, pourfinir toutes deux par terre essoufflées et vidées. Un peu de rangement, cen'était vraiment rien comparé à ce qui venait de nous arriver. 


Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant