Chapitre 18-2

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Rouvrant les yeux, je m'aperçus que la chose qui nous avait percutés était en fait un chien. Un très gros chien qui ne ressemblait à rien de connu, ou du moins pas par moi. Un croisement improbable d'un dogue allemand et d'une hyène ! Il avait une gueule hideuse hérissée de crocs jaunâtres à l'aspect particulièrement redoutable, désormais plantés dans mon bras, et son corps était aussi élancé et musculeux que celui d'un pitbull. Je ne cherchai même pas à réfléchir et, fixant ses yeux rougeâtres, tirai sans la moindre hésitation. Je lui mis trois balles dans la tête à bout portant. Il émit un glapissement strident, puis sa mâchoire se relâcha et il tomba inerte, me clouant à mon siège. Je m'apprêtai à tirer quelques coups supplémentaires pour être bien sûr qu'il soit mort, quand j'entendis la voix saccadée de Jude.

— Économise les balles.

C'est à cet instant que le deuxième chien attaqua, engouffrant sa gueule au travers de ma vitre. Ma parole, il m'en voulait personnellement ou quoi ? Malheureusement pour lui, c'était moi qui avais le flingue et il connut rapidement le même sort que son camarade. Difficile de rater sa cible à dix centimètres de distance. Le problème était que je n'étais pas économe en munitions et que je n'avais aucune idée de combien il m'en restait.

— Il faut qu'on parte d'ici et vite, souffla Jude dans un grognement.

Il avait déjà détaché sa ceinture et commencé à s'extraire de son siège par la droite, sa portière étant bloquée par le talus et le capot recouvert de morceaux de verre. Il fallait que je détache la mienne, mais je ne voulais pas lâcher l'arme et mon bras gauche ne semblait plus vouloir m'obéir. Jude dut comprendre mon dilemme, car il entreprit de me libérer, sans succès. Le mécanisme de fermeture de la ceinture devait s'être bloqué dans l'accident. Je commençai à m'agiter frénétiquement sur mon siège, quand d'un coup Jude détacha la dague qu'il portait attachée à sa cheville et me libéra.

Je devais être en état de choc, car bien que je susse qu'il fallait que nous sortions de la voiture et que pour cela j'ouvre ma portière, je ne pouvais me résoudre à poser mon arme. Jude ne perdit pas de temps et s'inclina au-dessus de moi pour l'ouvrir à ma place. Dans son mouvement, il effleura mon bras blessé et je ne pus retenir un gémissement de douleur. Il regarda mon bras rapidement et une grimace instinctive étira ses lèvres. Mon premier réflexe fut de regarder à mon tour, mais je me retins. Sous son impulsion, je m'extirpai tant bien que mal de la voiture et pris garde de ne pas trébucher sur la bête morte à mes pieds.

— Tu en perçois d'autres ? me demanda Jude essoufflé, alors qu'il finissait de sortir de la carcasse métallique. Celles-ci brouillent mon odorat, dit-il en assenant un coup de pied rageur à la bête la plus proche.

Au moment où j'allais me mettre « à l'écoute » des environs, une sorte de hurlements lugubres suivis de grognements sourds nous parvinrent de trois directions différentes.

— Ils sont en train de nous encercler ! Viens, notre seule chance, c'est de fuir !

Joignant le geste à la parole, il partit en courant en direction des bois. Mon temps de réaction s'améliorait car, sans réfléchir, je lui emboîtai le pas et tentai maladroitement de le suivre.

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant