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Orlando



Les gens continuent à discuter autour de nous comme si de rien n'était. Me parviennent ainsi des brides de conversations, des rires, le bruit du métal contre la céramique, les sonneries de portables... pourtant Amanda assise en face de moi reste parfaitement immobile.

Je ne dis rien de plus, parce que je ne veux rien louper de sa réaction. Elle m'a très clairement fait comprendre qu'elle prenait des risques en acceptant de me parler...
Eh bien elle n'est pas la seule dans cette position: c'est aussi mon cas.

Et je veux avoir la certitude de ne pas m'être trompé sur ce qu'elle est capable d'encaisser.

- D'accord..., dit-elle au bout d'un moment. Et que faisais tu exactement pour lui?

- Mon travail consistait en beaucoup de choses. Livrer les combats clandestins m'évitaient la plus part du temps le "sale boulot", mais je n'y échappais pas. Et de tout manière, c'est comme ça que j'ai commencé: vol, recel et trafiques en tout genre.

Je lui passe les détails les plus sordides. Car même si elle fait bonne figure, Amanda pâlit. Et dire que la liste que je viens de lui faire, est loin d'être exhaustive. 

Amanda hoche lentement la tête l'air songeur. Lorsqu'elle lève à nouveau ses grands yeux vers moi, je retiens mon souffle.

- Et... est-ce que tu as déjà tué pour lui?

- Non.

Presque.
Mais elle n'a pas besoin de le savoir pour autant. Alors je garde le silence.

- Ça fait beaucoup de choses, dit-elle d'un air grave.

- En effet.

- Mais tu as dû faire ce que tu devais pour survivre. Je n'ai pas à te juger.

- Comprends moi bien, Amanda: je n'ai pas fait toutes ces choses parce qu'on m'a obligé... Même si ça a été le cas pour certaines d'entre elles, je suis resté maître de mes décisions. 

Elle penche la tête sur le côté, ce qui fait glisser ses longs cheveux de son épaules.
C'est indéniable: elle ressemble beaucoup à Lara.
Cependant j'arrive à percevoir une grande douceur, derrière sa force remarquable. Quelque chose que je n'ai jamais eu l'occasion de voir chez notre mère biologique. Elle n'est pas comme elle. 

- Parle-moi de ces années de prison.

- Ils appellent ça le centre de détention pour mineurs, mais ça reste de la prison. J'ai été arrêté l'été de mes dix-huit ans pour vol de voitures. J'ai pris deux ans ferme.

Nathan est si bien organisé que quand l'un de ses hommes tombe, il est quasiment impossible de remonter directement jusqu'à lui. Si le juge qui m'a condamné avait su que je travaillais pour Nathan Karev, ma peine aurait été beaucoup plus lourde. Je serais sans doute encore en prison, aujourd'hui.
C'est un pan de ma vie, qui m'a appris que lorsque je me mettais dans la merde, je me devais me débrouiller seul pour en sortir. 

Je me souviens aussi du regard rempli de tristesse d'Aleysha, à chaque fois qu'elle venait me rendre visite. Je la revois si déçue, que j'étais mal des jours après ses visites.

- J'ai l'impression que tu dis toutes ces choses, pour me faire peur. Pour me tester.

- Elles n'en demeurent pas moins vraies. Je ne vais pas me présenter à toi, en te jurant que je suis un type bien simplement parce que j'ai besoin que tu m'acceptes, je laisse tomber.

De SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant