17. Les comparaisons

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[Narration : Lucie]

Il faisait chaud et lourd. Je sentais avec dégoût le ruissellement d'une transpiration salée, collante et visqueuse sur mon visage. Les épreuves se déroulant sous ce climat orageux, les gradins empestaient le fauve.

Pour l'occasion, les nintaïens avaient tous revêtus leurs survêtements de sport. Les équipes étaient assises selon leur appartenance à tel ou tel établissement, comme si un fil de barbelés invisible les séparait. Il y avait l'équipe blanche pour Kawasaki et l'équipe rouge pour Nintaï. Les banderoles avaient été accrochées un peu partout et j'avais eu le droit à quelques compliment à demi-masqués. Ces efforts n'avaient pas empêché le lycée Kawasaki d'accueillir Nintaï sous les huées. On aurait cru des gladiateurs faire leur entrée dans l'arène. Il ne manquait que quelques jets de pierre pour ravir les gaillards et leur donner un prétexte pour régler de vieux comptes en toute impunité.

Malgré tout, le lycée Kawasaki comptait bien moins de délinquants que Nintaï et son personnel encadrant était à cheval sur les règles, ce qui ne laissait présager aucun incident de leur part.

Comme prévu, Minoru remportait chaque épreuve en faisant gagner son équipe au javelot, au saut en hauteur, au triple-saut, à la course, au relais ainsi qu'à la corde à sauter. Un vrai Bambi dopé ! Il était prêt pour les Jeux Olympiques !

Assis à côté de moi, Nino s'occupait en établissant à haute voix les pronostics des victoires successives de Minoru. Les étudiants du lycée Kawasaki affichaient des figures exaspérées devant ses prouesses. J'eus tôt fait de me rendre compte que Minoru était une véritable célébrité sportive dans les environs.

L'opossum transgénique prenait un malin plaisir à dépasser Okito, un suiveur de Naoki, l'énigmatique leader de la 2-A. Okito était aussi grand que Minoru et aussi fort que Yuito. Toutefois, cet Okito ne prenait que la deuxième place derrière l'Opossum. A mesure que la compétition se déroulait, il faisait preuve d'une agressivité croissante, tandis que Minoru mettait un point d'honneur à demeurer calme et concentré. Peut-être ce dernier jouait-il sur la frustration de son adversaire ?

Le front brillant de sueur, Okito finit par serrer les poings et quitta l'enceinte sportive. Aucun arbitre ou professeur ne songea à l'arrêter.

Lorsque Minoru eut achevé ses épreuves et que Kensei et Nino se levèrent à leur tour pour la bataille de cavalcades, il me rejoignit dans les gradins, d'une démarche souple et primesautière.

Sourire aux lèvres, l'Opossum retira son t-shirt, s'essuya avec une serviette et en enfila un autre. Il transpirait tellement qu'il n'aurait pas été étonnant de voir des saumons sauvages remonter son dos.

Il déplia et allongea ses immenses jambes de sauterelles, qui dépassèrent sur le banc de devant où un étudiant de première année râla. Réalisant l'identité de la personne contre qui il avait vitupéré, le cadet se retourna vivement, faisant mine de se concentrer sur une course de sauts d'obstacles.

Minoru ne le reprit pas et se mit à siffler. Il était d'une humeur plus enjouée que d'accoutumée, espérant probablement que je le félicite comme il se devait pour ses exploits.

« Minoru, arrête de gesticuler ! ». Il m'adressa une grimace dédaigneuse. Je souris. Il débordait d'énergie.

Chaque jour, après sa journée de cours et ses heures d'entraînement au club d'athlétisme, il rentrait chez lui, prenait une douche, renfilait des vêtements de sport, partait faire son jogging, revenait chez lui pour se sustenter, reprenait une douche et attendait que Takeo passe le chercher à moto dans la perspective d'une soirée à traîner dehors.

« C'était impressionnant, Minoru. Je ne pensais pas que tu étais aussi bon. Personne ne t'est arrivé à la cheville. Encore moins au saut en hauteur... » le flattai-je en considérant ses longues jambes.

Octopus - Tome 2 : La Pieuvre a huit brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant