42. Les punks

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Les étudiants nintaïens en avaient terminé avec les examens de fin de semestre. Ils étaient officiellement en vacances pour un beau mois d'été. Les résultats peu fructueux avaient été publiés sept jours après la dernière épreuve, par mes soins, sur le grand panneau d'affichage de la cour.

Les épreuves autres qu'en travaux manuels n'avaient consisté qu'en des questionnaires à choix multiples. Aucune rédaction ou même écriture d'une phrase n'avait été demandée. Le système scolaire n'exigeait pas de réponses structurées ou d'explications de raisonnements. Il fallait cocher des cases ou reporter des numéros et des lettres dans celles-ci. L'avantage à ce qui pour moi était une abomination devait être l'impartialité et l'objectivité totales des corrections... Mais à quel prix ?

Quoiqu'il en soit, les notes des nintaïens n'étaient pas élevées sauf en anglais, où étrangement, les caïds de troisième année avaient augmenté leurs moyennes. Minoru battait tous les records : il s'était classé cinquième dans sa classe. Bientôt, dans cette matière, il ferait le pied de nez aux étudiants les plus studieux, pour le peu qu'ils soient.

Seul Daiki, comme à chaque session visiblement, devrait suivre des cours de rattrapage, auxquels le connaissant, il n'irait probablement qu'à son envie. Pour tout compte, le reste de la faction avait obtenu un total d'au moins cinquante points sur cent, c'est-à-dire la moyenne. J'avais entendu jaser dans la salle des professeurs : certains parlaient de miracle.

A dix-huit heures, Kensei fila au garage du Vieux, Mika se rendit chez le médecin, Ryôta alla retrouver sa nouvelle copine en ville, Reiji resta encore un peu enfermé dans son trou – la salle d'informatique, et Daiki partit faire un cirque à la salle des professeurs, accompagné des « Men in Grey » qui avaient deux mots à dire à un professeur de technologie qui dans sa notation ne les avait pas « reconnus à leur juste valeur ».

Quant à Yuito, il se volatilisa avec Takeo. « La Banane » s'était vantée de sa cruauté envers Okito, même s'il lui restait un arrière-goût amer de ce qu'il avait fait. Il abhorrait son demi-frère mais il semblait qu'il ait éprouvé un sentiment de semi-culpabilité. En tout cas, Takeo avait deux mots à lui dire : certainement lui faire comprendre qu'il avait saboté une alliance primordiale avec la seule classe de deuxième année qui n'était pas contre eux.

Toute à mes réflexions, je franchis le portail de Nintaï au milieu de bandes de voyous surexcités par la perspective du congé d'été. Le soleil était déjà bas, le bleu du ciel commençait à prendre une teinte plus sombre. Une troupe de corbeaux traversa les cieux à tire-d'aile avec forces de croassements.

Soudain, Minoru m'interpella à l'autre bout de la cour, Nino sur les talons, me criant que nous devrions fêter la fin des cours au Maruschka, une habitude selon eux. Trois autres caïds, des amis de leur classe, se joignirent à nous.

***

Je jetai un coup d'œil à la montre de Nino. Le temps avait filé et il ne tarderait pas à nous quitter : il avait rendez-vous au centre-ville. Tant pis pour lui, l'ambiance de liesse qui régnait au sein du Maruschka était telle que je me dirigeai vers le comptoir pour passer une nouvelle commande. Une fois accoudée sous l'éclairage tamisé, je réalisai que j'exagérais. Mon porte-monnaie ne contenait plus que trois-cent malheureux yens.

Une voix grinça au-dessus de moi : « Tu ne bois plus ? ».

Il portait des cheveux noués en catogan. C'était un garçon presque trop jeune pour entrer dans un bar. Je pensai l'avoir déjà vu. Il avait une tête de criquet. Comme pour confirmer mon ressenti, le regard insistant, le jeune homme tapota du doigt l'insigne de la fleur rouge à cinq pétales sur son uniforme trop large pour lui donner une carrure : Nintaï, bien évidemment.

Octopus - Tome 2 : La Pieuvre a huit brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant