Chapitre 32

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Depuis ce que j'ai fait, ma mère me surveille, comme après l'accident de voiture

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Depuis ce que j'ai fait, ma mère me surveille, comme après l'accident de voiture. Au fond d'elle, elle devait avoir peur que je passe à l'acte, et maintenant que j'ai essayé sans le vouloir, elle recommence à s'inquiéter.

À la cafétéria, je suis étonnée de voir Daphné, assise à une table, deux cafés en main. Elle ne sait rien à propos de ma bêtise hier, et je ne compte pas le lui en parler. Elle est ma seule amie à la fac, en plus de Julian, et je ne veux pas la perdre. Pas plus que je ne veux le perdre lui.

—  Tu n'es pas venu avec Julian ? me demande-t-elle en me tendant mon café.

—  Non, ma mère m'a déposé.

Et au fond, ça m'arrange. Julian s'est comporté de façon étrange lorsqu'il est venu me rendre visite. Ça ne se voyait pas, mais je le sentais. Ses baisers n'étaient pas passionnés. Il était distant, prudent, il semblait avoir peur de me casser parce que je lui semble peut-être trop fragile. Voilà comment il me voit, désormais : une fille que l'on doit éviter de bousculer. Ça me rend dingue. Je suis toujours la même.

Bianca a essayé de me rassurer en disant que Julian a peur de me perdre, qu'il cherche à me protéger sans savoir comment s'y prendre. S'il arrêtait de me voir comme une chose fragile, ça irait tout de suite mieux.

—  Le voilà ! s'exclame Daphné à voix basse. Et il sourit comme un mec amoureux.

C'est plutôt le mien qui se met à tourner lorsque je le vois. Julian est un véritable soleil dans ma vie remplie de gris.

—  Salut.

Sa voix grave me surprend, me faisant vibrer des pieds à la tête. J'aime l'effet qu'il a sur moi, même si j'ai peur d'être autant accro à lui.

—  Ça va ?

Je hoche la tête, espérant qu'il comprenne que je vais plus que bien. Ce qui s'est passé hier ne doit être qu'un mauvais souvenir, même si je vais retourner chez mon ancienne psy. Ma mère et Bianca y tiennent, et je ne veux plus les décevoir même si je suis saine d'esprit.

Je suis réveillée par Daphné qui me secoue par l'épaule. En reconnaissant l'amphi, je me maudis de m'être endormie en plein cours. Il faut dire que ma nuit n'a pas été de tout repos, mon cauchemar m'a tenu éveillé une bonne partie de la nuit.

—  Tout va bien ? me demande-t-elle, sourcils froncés.

—  Je suis un peu fatiguée...

Elle sourit, plus ou moins rassurée, tandis que Julian m'observe dans un silence des plus éloquents. Il est au courant pour mes cauchemars, il doit se douter qu'ils m'empêchent de dormir correctement, mais il ne sait pas ce qui me hante la nuit et je ne veux pas qu'il l'apprenne. Pas maintenant. Je ne suis pas prête à en parler.

—  Je m'inquiète pour toi, murmure-t-il près de moi lorsque nous rejoignons le couloir à la sortie du cours.

Daphné étant obnubilée par son portable, elle ne semble pas nous porter un quelconque intérêt. Ce n'est pas plus mal.

—  Je vais bien, Julian.

—  Je veux t'aider à aller mieux.

—  Tu n'y arriveras pas si tu continues à me regarder de cette façon, marmonné-je à voix basse. À surveiller mes moindres faits et gestes comme si j'allais me jeter sous une voiture à tout moment. Je n'ai pas besoin que d'autres personnes en plus de ma mère et ma sœur me croient instable et suicidaire. Ça m'arrangerait que tu arrêtes d'être aussi distant et précautionneux avec moi. Je ne suis pas en sucre.

J'ignore pourquoi je me mets à accélérer le pas, mais Julian n'a aucun mal à me rattraper.

—  Je ne sais pas quoi faire...

Son désarroi me transperce le cœur, alors je me stoppe net et l'enlace. Je vérifie que nous sommes seuls pour parler en tout sécurité. Daphné s'est arrêté, discutant avec un garçon qui fait sûrement partie de notre promo. Je l'adore, mais là j'ai besoin d'être seule avec Julian.

—  Tu n'as rien à faire, dis-je dans un soupir, mon oreille écoutant son cœur s'emballer. Tu voulais que je revive, et c'est le cas lorsque je suis avec toi. L'autre toi, celui qui me taquine et qui me parle comme si j'étais normale.

—  On a déjà parlé de cette « normalité », marmonne-t-il. Je veux que tu sois heureuse, je veux te protéger de tous les dangers. Mais comment je peux te protéger de toi-même ?

—  Je ne suis pas suicidaire.

Bien sûr qu'ils me pensent suicidaire, lui, ma mère, et Bianca. J'ai avalé des antidépresseurs, même si c'était seulement pour atténuer la douleur dans ma poitrine. Ils ne le voient pas de cette façon.

—  Je ne le suis pas, répété-je en me perdant dans ses yeux limpides. Je sais très bien de quoi ça avait l'air, hier, mais on ne peut pas toujours croire ce que l'on voit. Il y a des choses qui sont invisibles à nos yeux. À vos yeux.

—  Je ne veux pas te perdre.

—  Si tu continues à me voir comme une folle, c'est ce qui arrivera.

Sans attendre de réponse de sa part, je continue mon chemin. Il faut que je passe aux toilettes, j'ai besoin de me rafraîchir.

—  Qui est Salomé ?

Mon sang se glace, tout comme mes jambes. La dernière image que j'ai de Salomé, c'est elle sur le siège, immobile, le visage en sang. Je me souviens l'avoir observé après l'impact.

—  T'en as parlé dans ton sommeil, durant le cours.

Je me tourne de nouveau face à Julian, qui attrape mon poignet et le caresse de son pouce. Il ne saura rien, pas aujourd'hui. Pas lorsqu'il me croit folle.

—  Personne.

—  Pourquoi tu ne me dis rien ? demande-t-il, l'air chagriné. J'ai besoin que tu te confies à moi, Lou. S'il te plaît.

—  Non.

—  Dis-moi, bon sang !

Il hausse la voix, et son emprise sur mon poignet se fait plus forte. Je tente de m'en dégager, mais Julian le tient fermement. Heureusement, il finit par s'en rendre compte et me lâche, la culpabilité déformant son visage.

—  Pardon.

Il me regarde, confus, avant de s'éloigner à toute vitesse. Mon poignet commence à me chauffer et je le frotte, espérant atténuer la douleur.

—  Tu devrais aller mettre de l'eau dessus, intervient Daphné, déjà à mes côtés.

—  Ça va passer.

Elle me prend le poignet pour le mettre sous mes yeux. Un bleu commence à se former. J'ai dû mal à croire que Julian m'ait autant marqué, surtout aussi vite.

—  Pourquoi il a fait ça ? demande-t-elle, inquiète.

—  Il ne l'a pas fait exprès. Y mettre de l'eau ne changera pas grand-chose.

—  Ça soulagera la sensation de brûlure.

Je ne bronche pas lorsqu'elle m'emmène aux toilettes. L'état dans lequel était Julian lorsqu'il est parti me tracasse. Il est en colère. Contre lui-même.

Je ne lui en veux pas, et je le lui dirai dès qu'il sera calmé. Il ne faut pas qu'il puisse penser que je le déteste parce qu'il m'a agrippé le poignet, il ne se rendait pas compte de sa force. Je ne peux pas le perdre. Pas quand il m'aide à vivre.

Sous Les ÉtoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant