Louise ne cesse de faire le même cauchemar depuis plus d'un an, revoyant la même voiture accidentée, entendant les mêmes cris et sentant la même panique la gagner. Elle pense pouvoir s'accepter comme elle est : brisée. À la fac, elle fait la rencont...
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Après avoir pris une douche bien chaude, j'ai à peine le temps d'enfiler mon pyjama que ma mère m'ordonne de descendre, prétextant une urgence. Sans doute pour que je mette la table, ce qui me fait grommeler. Jusqu'à ce que je le vois.
— Julian ? Qu'est-ce que tu fais là ?
Ce dernier est assis sur notre canapé, le visage caché entre les mains et un sac de sport à ses pieds. Mon père, debout à ses côtés, me regarde d'un air gêné. Quant à ma mère, elle revient de la cuisine avec un verre d'eau qu'elle tend à mon petit ami. Et c'est là que je remarque son visage baigné de larmes. Il ne fait pas un bruit.
— Hé ! m'exclamé-je en m'agenouillant face à lui, prenant son visage en coupe. Qu'est-ce qu'il y a ? C'est à cause de ce que je t'ai annoncé ?
Il secoue la tête et me prends dans ses bras, me serrant si fort comme s'il avait peur que je m'évapore. Je respire mal, mais je n'ai jamais vu Julian aussi désespéré. Pas même lorsqu'il a découvert qu'Emma était en vie.
— Lou, je veux... J'ai besoin de toi...
— Je suis là, murmuré-je en caressant sa nuque. Je ne pars pas, Julian.
Malgré ses sanglots, il arrive à me suivre jusqu'à ma chambre. Mes parents n'ont pas à savoir ce qui le préoccupe.
Nous nous allongeons sur mon lit, sa tête contre mon cœur alors que ses larmes commencent à se tarir.
— Qu'est-ce qui t'as mis dans cet état ?
— Mon père... Il n'est pas mon père.
Sous le choc, j'en perds mes mots. En fait, je n'ai même aucun mot qui me vient à l'esprit pour lui répondre.
— Emma le trompait, et elle est tombé enceinte, m'explique-t-il d'une voix cassée. De mon oncle, le père de Stefano. Ce con est mon demi-frère. Le pire, c'est qu'à part Emma et celui que je croyais être mon père, personne ne le sait. En une journée, j'apprends que j'ai peut-être mis une fille enceinte et que la personne que je déteste le plus au monde est mon demi-frère. Je savais que ma vie était merdique, mais quand l'est-elle devenue à ce point ?
J'encaisse tellement d'un coup que je ne sais plus où donner de la tête. La vie de Julian est un tissu de mensonges depuis sa naissance, je suis plutôt surprise qu'il ne fasse que pleurer. Ses poings ne montrent aucune trace de bagarre.
— Julian, je... je suis désolée.
— Je veux partir, dit-il en me regardant de ses yeux rouges et mouillés. Je veux partir loin d'ici, Lou. Avec toi.
Partir. Je voulais faire la même chose après l'accident, comme si m'éloigner d'ici allait changer le passé.
— On ne peut pas faire ça, rétorqué-je en nettoyant ses joues. Je ne suis pas contre l'idée de partir loin avec toi, mais c'est une mauvaise idée. Ça ne changerait rien, et tu ne ferais que déplacer tes problèmes ailleurs. Alberto n'en deviendrait pas ton père biologique pour autant, Stefano sera toujours plus que ton cousin et Lena sera toujours enceinte si elle l'est vraiment. Je sais que maintenant, ça te semble être la seule solution parce que tu serais loin de toutes ces personnes qui te mentent, mais ça ne te rendrait pas plus heureux, Julian.
Il repose sa tête contre mon cœur, m'enlaçant de toutes ses forces.
— Je ne peux pas me mettre à ta place, mais Alberto t'a élevé comme son propre fils, il a choisi que tu serais son fils. Il t'aime. C'est lui ton père, Julian. Et Amélie est ta mère parce que tu l'as choisi. T'as toujours su qu'elle ne l'était pas biologiquement, mais t'as choisi de l'appeler « maman », de la traiter comme tel. Elsa est ta sœur, tout comme Nathan est ton frère. À moitié ou pas n'a pas d'importance. Serena et Nino le sont aussi. Ils sont ta famille. Elle est un peu en pagaille, mais c'est la tienne. Quant à Stefano, vous partagez peut-être le même père, mais ça ne fait pas de lui un frère pour autant. Partir n'arrangera pas le problème, tu le sais. Ça te fera toujours autant de mal, que tu restes ici ou pas.
Tout plaquer est la solution de facilité face à nos problèmes. C'est sans doute un instinct primaire chez les humains alors que c'est complétement stupide.
— Est-ce que je peux au moins passer la nuit chez toi ? me demande-t-il, le visage déformé par le chagrin.
— Bien sûr.
Je sais que pour une nuit, ça ne dérangera pas mes parents. Mais plusieurs, ils commenceraient à flipper. Pourtant, je garderais Julian le temps qu'il lui faut si je pouvais. Une nuit lui suffira sans doute. En tout cas, je ne compte pas le lâcher d'une semelle.
Ses parents sont vraiment tordus pour mentir autant à leur fils. Après avoir découvert que sa mère biologique était vivante et qu'il avait un grand frère, Julian apprend que Nathan n'est que son demi-frère et que son père n'est pas son père. Sa vie est un véritable film. Je déteste encore plus Alberto pour ça, de mentir à Julian depuis toujours.
Va-t-il seulement s'en remettre, un jour ? Quand est-ce que sa vie cessera d'être autant chamboulée ? J'aimerais tant qu'il soit enfin heureux, sans aucun problème à l'horizon.
