CHAPITRE TRENTE-NEUF .3

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Adacie regarda la jeune Suwane examiner la plaie de l'oiseau. Apparemment, la guérison commençait bien. Le liaig avait enlevé les pansements mis la veille et nettoyé les plaies avec l'aide de quelques cavaliers occupant le goéland, lui faisant mouvoir son aile blessée avec des mouvements lents et quelques encouragements.

La petite Lonig arriva en courant, une feuille de papier couverte d'écriture à la main.

– Mon lieutenant ? Message d'Ustaritz pour les soins.

Adacie s'empara de la feuille qu'elle parcourut rapidement. Épouillage complet de l'animal, désinfection de la tente comme pour une écurie de cavalerie, installation d'une dalle rigide pour l'évacuation de la litière souillée, rien de bien difficile, mais cela allait prendre du temps.

– D'accord enseigne. Mettez une équipe à la désinfection de la tente. Allez voir le génie et demandez-leur de préparer une dalle avec une évacuation vers le digesteur, avant qu'ils ne retournent à la base.

– Tout de suite, lieutenant.

Lonig repartit en courant et Adacie rejoignit la jeune écuyère.

– Tout va bien ? Tu es contente des soins de notre liaig ?

La jeune fille fit signe que oui. Les cavaliers avaient apporté trois petits poissons juste pêchés dans l'Adour et le goéland les avait engloutis avec joie.

Rassasié, il allait rester à l'extérieur le temps qu'une équipe le passe à l'épouillage. Elle montra la maison forte à Suwane.

– Bien, nous retournons au chariot, j'ai des choses à t'expliquer. Tes affaires ? Tu sais où elles sont ?

Suwane lui montra le harnachement de son oiseau. Elle s'y rendit et montra un long sac de cuir souple oblong. Adacie lui fit signe de le prendre avec elle et elles retournèrent dans le chariot.

Elles s'installèrent dans le vestibule et Adacie se retourna vers l'enseigne les suivant.

-Préparez un 10-15-4.

Ce n'était pas un jour de lessive, mais cela n'allait pas pouvoir attendre. D'un petit meuble en bois, Adacie sortit une bouteille d'eau fraîche et posa deux verres sur la table. La jeune Suwane s'empara de la bouteille, émerveillée, et leva un regard interrogateur vers Adacie.

– C'est une glacière ! Ce meuble est équipé de quartz suceurs sous le chariot. Ils sucent la chaleur et donc il reste du froid dans le meuble.

Adacie servit deux verres d'eau et but le sien avec délectation pour montrer à la jeune écuyère qu'il n'y avait de risque. Celle-ci prit le sien et sans hésitation l'avala avec plaisir. Adacie la regarda, sourire aux lèvres.

– Excellent. Tu vois, cette eau était parfaite. Je sais que tu vas rester avec nous encore quelques jours, au moins. Je crois que notre seigneur va tout faire pour te garder.

Suwane sembla étonnée et écrivit rapidement sur son cahier qu'elle ne possédait plus rien. L'oiseau serait rendu à son nouveau propriétaire, celui qu'elle devait appeler père.

Adacie fit signe qu'elle comprenait, mais lui tapota doucement la tempe.

– Je crois qu'Erwan va être plus intéressé parce que tu sais. Je le connais assez bien.

Suwane fit signe qu'elle était d'accord, aussi Adacie poursuivit-elle.

– Nous, les Montagnards comme disent les gens des contreforts, les tiens, nous avons beaucoup changé depuis son arrivée. Il nous a apporté tant de connaissances, de techniques. Comme il dit, il faut le voir pour le croire.

Adacie resta un instant immobile, plongée dans ses souvenirs, puis se reprit.

– Il nous a apporté des armes inimaginables qui pourraient faire de nous les maîtres du monde, des techniques qui nous rendraient aussi riches que les empereurs... Et pourtant, la chose la plus importante qu'il nous ait donnée semble si dérisoire. Il appelle ça l'hygiène, la propreté.

Suwane écoutait, mais semblait plus étonnée par le ton exalté d'Adacie que par ses paroles. Adacie poursuivit.

Regarde ma blessure. Elle baissa son pantalon de treillis et ôta le pansement. La plaie était bien nette, une belle cicatrice se formait et il n'y avait aucun suintement.

– J'ai reçu un carreau d'arbalète. Il était enfoncé d'une demi-paume. À ton avis, c'était il y a combien de jours ?

La jeune écuyère s'approcha de la cuisse et palpa la blessure doucement. Elle se releva et montra les dix doigts de ses deux mains.

Adacie lui sourit.

– Une décade ? Non ! Seulement quatre jours !

Elle remit son pansement en place et remonta son pantalon de treillis, sourire aux lèvres en voyant le visage étonné de Suwane.

– Erwan nous a apporté une nouvelle façon de voir et de traiter les blessures. Pareil pour la propreté. Nous rincer avec de l'eau, mouiller les vêtements à l'eau froide, tout cela c'est du passé. Regarde ma peau, Adacie lui montra l'encoignure du coude, et compare avec toi.

Adacie avait noté les petites irritations que Suwane portait aux articulations. Elle savait que cela était dû aux vêtements, aux toilettes.

Suwane comparait avec attention, Adacie savait qu'elle comprenait. Adacie allait poursuivre lorsqu'une petite voix se fit entendre.

– 10-15-4 pour Barcus 10-6.

– Merci enseigne. Un instant.

Adacie se leva et montra le sac de Suwane.

– On va prendre toutes tes affaires et bien les laver, selon nos méthodes. Pareils pour nos uniformes et notre literie. D'accord ?

La jeune fille fit signe qu'elle comprenait et comme Adacie, se déshabilla complètement. Elles mirent leurs affaires dans un panier réservé au linge sale et y mirent aussi les draps. Adacie demanda à Lonig de trouver un uniforme à la taille de Suwane ou d'en faire venir par un convoi de ravitaillement qui les rejoindrait un peu plus tard.

La petite enseigne s'exécuta aussitôt.

Adacie boutonna la paroi intérieure du chariot et montra le fond à Suwane.

– Là, nous avons notre petite étuve personnelle. Je vais t'apprendre des choses.

La petite écuyère la regarda de bas en haut, sourire aux lèvres et ne put s'empêcher de pouffer lorsqu'elle écrivit quelques mots sur son cahier.

– Les mêmes choses que tu as apprises à ta commandante la nuit dernière ?

Adacie sentit une vague de chaleur la parcourir et baissa aussitôt la voix.

– Tu nous as vues ?

La jeune Suwane se tapota le nez avant d'écrire.

– Je vous ai entendues puis je t'ai sentie ! C'était tellement parfumé !

Adacie ne put s'empêcher de pouffer en repensant à la nuit précédente. Son cœur s'accéléra un peu et elle sentit, presque malgré elle son ventre chauffer un peu.

Suwane la regardait, amusée. Adacie vit les pointes de ses petits seins dressées et ses yeux brillaient. La jeune femme poussa un profond soupir. Suwane écrivit sur son cahier.

– La commandante Tranit est tellement belle !

Adacie lui passa le bras sur les épaules et s'approcha de son oreille.

– Elle est plus que belle ! C'est la Tranit de la chanson... Il faut juste attendre qu'elle l'accepte !

* * *

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Vixii

Les Larmes de Tranit - 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant