CHAPITRE QUARANTE-HUIT .2

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Le carrossier haussa les épaules, devinant leurs questions.

— Non, je les ai achetés légalement au syndic des fumeries de poisson. La taxe de guerre frappe tous les syndics de la ville, selon leur richesse. Pour esquiver quelques doubles-soleils de trop, le syndic voulait me revendre douze chariots. J'ai cru faire une affaire en prenant les plus récents. Je n'étais pas encore au courant de la taxe et le lendemain j'ai été bien servi.

Tranit eut un peu pitié du marchand, mais Adacie, devinant ce qu'elle pensait, engagea les négociations.

— D'accord. Ils sont bien, propres et neufs. Combien en demandez-vous ?

Une petite lueur d'espoir illumina son regard.

— Si j'osais...

— Osez, maître, nous verrons bien.

— Ils ont été construits il y a moins d'un an ! Un double-soleil par engin...

Adacie eut un petit sifflement de surprise.

— C'est un prix... royal ! Le chariot que nous avons acheté était à dix soleils, pas douze. Et il est bien plus grand.

— Oui, mais j'avais baissé le prix pour les quartz. Ces chariots, si jeunes, ils peuvent servir plus de dix ans !

Adacie grognait, venait renifler le bois des chariots, regardant comment les quartz avaient été ajustés. Elle était prête à y passer des heures, même si Tranit savait qu'elle voulait en finir au plus vite.

Mais le marchand tenait aussi à s'en sortir. Il ajouta deux petits chariots, moitié moins grands, mais d'aussi bonne qualité de construction. Le tout pour six doubles-soleils, soixante-douze pièces d'or de douze grains.

Adacie comptait sur ses doigts.

— Soixante-douze soleils, ça fait huit cents et...

— Huit cent soixante-quatre doubles-lunes d'argent. Je sais, c'est une somme, mais vous ne le regretterez pas.

Adacie abaissa les épaules.

— Bien ! Tu as un parchemin pour la vente ?

— J'y vais tout de suite. Patientez !

L'artisan partit aussi vite qu'il le pouvait, craignant qu'ils ne disparaissent. Adacie s'approcha.

— C'est un peu cher, mais je ne crois pas que nous trouverions meilleur marché. Je m'attendais à plus en fait.

— Et comment allons-nous faire ? Rappelle-toi comment nous avons ramené mon chariot !

Adacie s'esclaffa.

— Je m'en occupe. Enseigne ! dit-elle en se tournant vers un jeune cavalier à sa droite. Laisse l'argent ici, retourne au port avec l'escorte et ramène-nous des conducteurs et des attelages pour conduire tout ça au catamaran. On devrait pouvoir tout empiler en deux groupes.

— Affirmatif. Des conducteurs et des attelages.

L'instant d'après, la petite troupe repartait au petit galop sous le regard inquiet du carrossier qui revenait. Il souffla en découvrant Tranit, Adacie et Suwane qui fouillaient dans les sacs.

Adacie et lui rédigèrent l'acte de vente tandis que Tranit et Suwane faisaient le tri entre les pièces d'or et celles d'argent. La moitié fut payée en or, l'autre en argent. Tranit et Adacie aidèrent l'artisan à ranger son magot. Il devenait nerveux, craignant qu'un dénonciateur lui attire les collecteurs de taxes.

Tranit mit de côté le douzain réservé à la taxe, ayant vu les guichets d'octroi devant les murs du port et sachant très bien qu'elle n'y échapperait pas.

Les Larmes de Tranit - 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant