CHAPITRE QUARANTE-HUIT .3

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Une fois sa troupe partie, elle fit signe à Adacie et Suwane de la suivre. Elles passèrent la porte et parcoururent l'espace entre les deux remparts. Sur la droite, des tentes étaient encore visibles, signifiants que des troupes y séjournaient encore, mais il en provenait une odeur pestilentielle.

Sur la gauche, des parcs de cordes contenaient des dizaines de dorkis de toutes conditions, probablement des bêtes mobilisées pour la milice. À la porte du second rempart, un jeune lieutenant que Tranit avait personnellement entraîné leur fit signe de passer avec un grand sourire charmeur à l'attention d'Adacie et de Suwane.

À l'intérieur, Outre-berge était parfaitement reconnaissable et pourtant, Tranit éprouva subitement une impression d'inconnu. L'atmosphère était complètement différente. Comme à Maubourguet, un voile de pauvreté, avec sa crasse et ses odeurs, s'était déposé sur le bourg.

En quelques jours seulement. C'était déroutant, effrayant, parce que Tranit n'avait jamais vu, encore moins imaginé ce côté de la guerre.

Après avoir avancé d'une petite centaine de toises, croisés des groupes d'hommes attendant face au petit terrain de manœuvres et longés sur leur gauche des entrepôts semi-souterrains, Tranit les fit obliquer par une petite ruelle sinuant entre ces entrepôts et plusieurs dizaines de petites maisons individuelles, chacune possédant son propre potager, certaines un volailler voire un clapier.

En général, de nombreux enfants jouaient dehors en journée, mais ce jour-ci était bien calme. Les gens étaient chez eux, les battants des portails déjà fermés.

La ruelle obliqua vers le nord, bien rectiligne maintenant, adossée à un talus herbeux, les restes de l'ancien rempart du bourg. Il n'y avait aucune circulation et les trois jeunes femmes purent mettre leur monture au petit trot.

Quelques minutes plus tard, elles arrivaient sous les frondaisons du jeune chêne, contournaient les cuves de la brasserie et entraient dans la propriété de Laumit sous les regards vigilants de plusieurs ouvriers qui conservaient des pics, des arbalètes non loin d'eux.

Le contremaître, qui avait reconnu Tranit, lui avait fait un petit signe amical, leur permettant de passer sans encombre.

Laumit n'était pas loin d'eux et vérifiait les quartz d'un des scribes de son père. Elle délaissa sa tâche avec plaisir et vint à la rencontre de son amie.

— Salut à toi Tranit. Si tu pouvais savoir comme je suis heureuse de te voir.

Tranit sauta à terre lestement pour recevoir l'accolade de sa camarade.

— Salut à toi Laumit. Tu vas devoir me raconter plein de choses. Tu reconnais Adacie, ma jeune lieutenante qui t'a aidé à rentrer chez toi voici une petite décade ?

Laumit lui adressa un petit signe.

— J'ai du mal à reconnaître son visage, mais je me souviens qu'elle était là. Et cette petite ?

— Suwane, écuyère d'Isturits.

Laumit lui fit un petit signe et montra son bureau.

— Je dois rester dehors pour surveiller leur travail et les comptes. Venez, on va vous apportez des fauteuils et des rafraîchissements.

Un palefrenier, lui aussi armé d'un court glaive, vint prendre les dorkis pour les conduire à l'abri dans l'écurie. La servante de Laumit avait fait venir des sièges et surveillait une jeune fille de cuisine apportant un pot de bière et des chopes. Les trois cavalières s'assirent et reçurent leur chope avec plaisir.

Laumit repoussa les quartz et se servit aussi à boire. Tranit but une petite gorgée avant de se préparer une petite pipe de chanvre léger.

— Que s'est-il passé Laumit, pour que vos ouvriers doivent garder leurs armes à portée de main ?

Les Larmes de Tranit - 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant