「𝟝𝟙」Et maintenant, quoi ?

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Du peu dont elles se souviennent, les jumelles de Suroj n'ont pas eu une seule nuit réellement tranquille depuis au moins trois ans. Que ce soit dans les couettes épaisses et rassurantes de Poudlard ou sur les oreillers parfumés à la fleur d'oranger préparés par leur grand-mère, elles n'ont plus jamais connu ce que le commun des mortels appelle le sommeil profond.

L'Unutma les guette toujours. Il infiltre leur repos, s'immisce dans le moindre interstice de leur esprit et déverse, sans relâche, un flot de souvenirs, d'échos mutilés, de douleurs recousues à vif. 

Mais rien — non, rien — ne les avait préparées à cette nuit-là.

La mort, elles l'avaient vue mille fois en rêve. 

Mais l'éprouver dans sa nudité, la vivre à ras de chair ? C'était autre chose. C'était la révélation abjecte que rien, absolument rien, ne les sauverait. Pas de lumière au bout du tunnel, pas de présence divine pour les prendre dans les bras. La mort est une trahison sans visage, un silence qui vous étrangle lentement, méthodiquement. Elle ne frappe pas — elle écrase. Elle dérobe la vue, puis l'ouïe, puis l'air, puis soi. Elle vous dépèce par couches, et vous laisse en état de conscience juste assez longtemps pour savourer l'écartèlement.

Ce n'est qu'au moment précis où elles ont senti leurs âmes s'effilocher qu'elles ont compris : la vie ne tient qu'à une pression sur une trachée. Une main. Quelques secondes. Et tout s'efface — leurs souvenirs, leurs peurs, leurs colères, même l'amour. 

Tout peut disparaître dans un gargouillis.

Alors, comment en vouloir à Tom Jedusor de vouloir truquer les règles ? Comment condamner celui qui refuse ce destin misérable, cette roulette russe universelle ? L'instinct de survie est la seule chose vraiment sacrée.

Feryel et Erzsébet n'ont gardé qu'une certitude de cette descente dans l'abîme : pas maintenant. Pas comme ça.

Dans le monde magique, les fantômes ont deux origines. Il y a ceux qui ont choisi la demi-vie, par lâcheté ou par chagrin. Et ceux, comme elles, qui sont restés sans même le vouloir, retenus par quelque chose de plus grand qu'eux, de plus fort : la vengeance, peut-être. 

Ou l'amour. Ou la vérité.

Hebi, ce foutu serpent, leur a offert une seconde d'avance. Une seconde, et leur cœur est reparti. Le nom d'Edna Hollohat vibrait dans leurs têtes comme un sortilège bourdonnant. Edna. Hollohat. Encore et encore.

Feryel rouvrit les yeux comme on revient d'une noyade. Immobile. Le plafond au-dessus d'elle représentait un faux système solaire ; elle suivit, sans y penser, la lente danse des astres artificiels. Une odeur âcre de tabac lui irrita aussitôt les narines. Elle tourna la tête. Lentement.

Posters d'Alain Lacroix, trophées clinquants, étagères bien trop bien rangées. Le monde réel l'agressait de sa netteté.

Un disque de Françoise Hardy tournait quelque part, ses paroles s'étirant dans l'espace comme des échos brisés :

Unutma ✞  𝚃𝚘𝚖 𝙹𝚎𝚍𝚞𝚜𝚘𝚛Où les histoires vivent. Découvrez maintenant