CHAPITRE 49

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Un message. Pour ne pas dire aucun, pour ne pas faire passer Jenifer pour la connasse qu'elle est. Et dire que je n'ai pas eu de message de sa part serait mentir, puisque j'ai eu le droit, hier, à un « tu seras là à quelle heure dimanche ? ». Sms auquel j'ai répondu un « 9h. ». C'est froid. Tout est froid. J'ai l'impression que l'on me jette un sceau d'eau en plein visage à chaque fois. J'ai aussi mal en recevant ses messages, qu'en envoyant les miens. Mais à quoi être gentille de mon côté quand elle ne l'est pas ? Je n'ai pas envie de me faire marcher dessus. Je ne suis ce genre de fille. Elle s'est trompée.

Finalement, j'ai eu un problème de train et ce n'est pas à 9heures que je suis arrivée mais à 21h. Romane m'a envoyé qu'elles ont déjà commencé à manger, elles ont fait durer le temps pour que l'on m'attende mais Jenifer a dit avoir trop faim pour attendre un peu plus. C'est notre dîner, on avait prévu ce dîner toutes les cinq pour se revoir, se retrouver. J'ai appréhendé ce moment toute la journée. J'arrive dans le bâtiment où nous ferons un concert demain. Je sais qu'elles ont déjà fait une répétition aujourd'hui, sans moi, mais c'est normal et indépendant de nos volontés à toutes. La porte est fermée devant moi. Je n'ai plus qu'à l'ouvrir et je retrouverais les filles. J'ai envie de prendre mes jambes à mon cou et partir à toute vitesse. Ce n'est pas Romane, Jade, ni même Ambre qui me dérange. Mais il s'agit bien de Jenifer. Comment agir avec elle ? Je prends une grande respiration et malencontreusement, ma main tape contre la poignée de la porte. Je ne peux plus faire marche arrière. Il faut que j'ouvre la porte. Il faut que je rentre. Merde, ça m'en rendrait malade cette histoire. J'actionne la poignée et je rentre.

— Voilà celle qui aime faire son entrée, lance Romane.

Je souris et le regard des trois autres me tombent dessus. Cependant, je ne prête pas attention à Ambre et Jade, je dépose le mien sur Jenifer, qui ne perd pas une seconde pour me fuir. Assume Jenifer, non ? Romane se lève et vient me prendre dans ses bras, ce qui me rappelle que je ne suis pas seule avec celle que je désignais comme ma petite-amie. Emportée par l'élan de Romane, je vais saluer Ambre et Jade et quand j'arrive vers Jenifer, la chanteuse lève les yeux vers moi. Pendant quelques secondes, je lui demande du regard ce que j'ai le droit de faire. Elle me répond par un :

— Bisou de loin, je crois que je couve quelque chose, je ne voudrais pas te rendre malade.

— Oh bah super Jenifer, tu nous as fait la bise, se plaint Jade.

Grillée Jenifer. Alors je ne l'embrasse pas, je n'en ai même pas envie de toute façon et je m'assois à côté d'elle. Elle me semble tendue et elle a de quoi l'être. Je le serais aussi dans son cas. L'atmosphère est tendue elle aussi. Je me sers une part de pizza qui me paraît bien froide maintenant. Personne ne parle.

— Bon, lance Romane. J'ai mes petits cadeaux à donner moi !

Je lève un sourcil alors que je déglutis pour tenter de manger cette pizza immonde. Romane se penche vers son sac et se redresse.

— Alors, j'ai deux petits bols bretons pour mes copines préférées ! Pas que je ne vous aime pas Jenifer et Aliénor, mais je rappelle qu'elles ont gagné à la fête foraine.

Je souris au souvenir de la fête foraine. Je souris à ce qu'on était Jenifer et moi. Comment nous en sommes arrivés à deux êtres qui s'évitent ? Je me mords la lèvre inférieure pour ne pas me mettre à pleurer. Cette histoire me touche beaucoup plus qu'elle le devrait. Puis, de façon contradictoire, je ris doucement à me rappeler Jenifer qui me court après car madame n'était pas contente d'une comparaison avec une crevette. Je relève les yeux vers Jenifer qui sourit à la scène qui se déroule sous ses yeux.

— Comment s'est passée votre nouvel an ?

Je relève la tête, j'ai cru que Romane nous demandait à Jenifer et moi, mais non, elle s'adresse à l'autre couple. Les filles assurent avoir passé du bon temps. D'un coup, je ressens une jalousie et j'espère qu'elles n'iront pas dans les détails. Si, Jade expose leurs sorties et Romane boit ses paroles. Elle va être déçue quand elle va sentir que ce n'était pas la même ambiance de notre côté. Romane se tourne vers nous. Merde, elle aurait pu nous oublier, non ?

— Et vous les deux-là ?

Je fixe un point derrière Romane. J'attends que Jenifer prenne la parole, mais elle ne le fait pas. Crache-leur aussi tes mensonges, comme ça on aura tous la même histoire en tête.

— J'ai passé Noël et le nouvel an avec mes parents, avouais-je sèchement.

Est-ce que Jenifer sert les dents ? Je n'ai pas le courage de la regarder pour vérifier, sûrement car j'ai peur qu'il n'y ait aucune réaction sur son visage.

— Vous ne deviez pas passer le nouvel an ensemble ? S'interroge Jade.

— Demande à Jenifer.

— Léandre, mon plus petit, était malade pour le nouvel an. Donc je lui ai demandé de ne pas venir car ça ne servait à rien de venir. Puis, j'ai eu des problèmes. Elle n'a pas pu monter sur Paris.

— T'es une femme à problème de toute façon, soufflais-je.

— Vous savez quoi ? Je vais fumer, vous me soûlez.

Jenifer se lève de table, fait traîner sa chaise sur le sol et s'en va. Une nouvelle fois, je me retiens de pleurer. Je dois être plus forte que ma tristesse. C'est bon, j'ai assez pleurer pour elle. Et franchement, chialer devant les filles, non merci.

— Il y a eu un problème entre vous ? s'autorise à me demander Ambre.

— Ça, il faudra lui demander. C'est elle qui du jour au lendemain à arrêter de me parler.

— Tu crois qu'elle a un problème ?

— Je n'en sais rien et franchement, je m'en fiche. Qu'elle se démerde. Si elle avait besoin d'aide, elle ne m'aurait pas mis autant de distance entre nous. Je le connais, quand elle a un problème, elle demande de l'aide, contre son gré. On le sent toutes. Là. Là, je ne sais pas ce qu'elle a, mais elle me prend pour une conne.

Les filles haussent les épaules. Parce qu'elles pensent vraiment que Jenifer a des problèmes autre que elle-même ? Je souffle et moi aussi, je vais partir, fuir. On est bonne qu'à ça de toute façon.

— Je vais à l'hôtel.

— Ali, attends, t'as rien mangé !

— J'ai pas faim.

Je n'ai plus faim pour être honnête. Je me lève à mon tour. Je récupère mon téléphone et retrouve la sortie de l'endroit. L'odeur de fumée une fois dehors me prouve que Jenifer n'est pas loin. Bêtement, je la cherche du regard. Le sien est ancré sur moi et on se regarde dans les yeux quelques secondes, avant qu'elle ne se détourne. Là, maintenant, j'ai envie d'aller lui demandé quel est son problème, j'ai envie de lui assurer que je suis là pour elle, je veux lui dire à quel point elle m'a blessé. Mais je me ravise et je pars. J'ai mal. Je crois que je n'ai jamais eu aussi mal de ma vie. Je ne pourrais même pas le décrire ce mal-être. J'en serais presque à prier pour que Jenifer choppe un cancer dans les mois à venir. J'en deviens méchante. Elle me fait devenir méchante. J'aurais voulu qu'elle me rattrape, que l'on parle, qu'elle ait plus de courage que moi, mais elle reste à sa place, à fumer, comme toujours. Il faudrait que l'on parle, en vrai, j'ai besoin de savoir où nous en sommes. Comme si elle aussi avait envie de mettre au clair les choses, ce n'est qu'une bonne heure plus tard que Jenifer débarque dans ma chambre. Les mains dans les poches, le regard presque noir, elle se plante devant moi, sans même avoir frappé à la porte. À croire que son courage allait se tailler aussi rapidement que son amour pour moi.

— Aliénor. Je crois qu'il faut qu'on parle.



!!! Il y aura un chapitre par jour jusqu'à samedi inclu, à 15h!!!

Ose enfin l'amour [JENIFER FANFICTION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant