Dark Faïz Tome 2 [ Terminé]

Chapitre 5-3

Mes pas s'arrêtèrent net alors que nous marchions depuis déjà plus de deux heures dans cette forêt fascinante. Croiser quelqu'un sur ces sentiers était rare. En effet, les Kobolds s'aventuraient rarement aussi loin. Devant moi, un spectacle d'arbres de formes différentes et aux teintes uniques s'élevait dans une prairie fleurie. Une centaine de personnes était regroupée dans cette oasis de calme et de verdure. Elles transportaient dans de grands paniers une multitude de feuilles qui venaient d'être récoltées. À cet instant, je levai les yeux au-dessus de moi, attirée par le chant des oiseaux qui agitaient leurs ailes aux mille et une couleurs puis je m'avançai en même temps que Faïz, au milieu de ce havre de paix. Zerkô, en tête, ralentit puis se tourna vers nous :

— Les citoyens doivent participer aux ramassages des feuilles d'ananas sur l'île, expliqua notre guide. Nous avons mis en place un système de rendement afin que chacun participe à cette tâche au moins une à deux fois dans l'année.

— La collecte a-t-elle pour but de nourrir la population ? demandai-je intriguée.

— Non, de ces feuilles sont extraites les fibres qui seront ensuite transformées en textile pour fabriquer nos vêtements. C'est un procédé ancestral comme les bandes d'algues séchées qui nous servent à réaliser du cuir végétal.

— Ces procédés sont de véritables innovations quand on sait à quel point le traitement du cuir est une des sources les plus polluantes au monde, déclara Faïz, visiblement très attentif aux explications de notre accompagnateur.

Ce dernier porta une main à son menton en regardant tout autour de lui, puis demanda à Zerkô :

— Pouvons-nous parler à quelques personnes présentes ici ? Le sujet est très intéressant et mérite d'être creusé.

Zerkô parut hésiter quelques secondes avant de finalement céder.

— Seulement si vous ne troublez pas le travail de la récolte. La nuit va bientôt tomber, il ne faudrait pas trop tarder.

Notre accompagnateur fit volte-face et s'éloigna sans rien ajouter de plus. Je levai de nouveau les yeux au ciel. Le brouillard épais empêchait les rayons du soleil de pénétrer cette lourde couche. Bon sang, comment fait-il pour avoir une idée de l'heure qu'il peut être ? Avec ce brouillard, je perdais tous mes repères dans le temps.

— Zoé ? murmura Faïz à côté de moi. Essaye d'interroger quelques Kobolds. Il y en a forcément un qui finira par nous mettre sur la piste du rubis.

J'acquiesçai d'un signe de tête, mais sans grande conviction. Les habitants de Eros aimaient parler de tout sauf des mystères de leur île. Dès que nous nous rapprochions du sujet de la pierre de Kushisake, les visages se fermaient brusquement et plus aucun son ne sortait de leur bouche. Cette légende était taboue et on nous le faisait bien comprendre.