Dark Faïz Tome 2 [ Terminé]

Chapitre 7-3

Les falaises bleues se détachèrent des nuages petit à petit. Le trajet m'avait paru court, peut-être du fait de nos vifs échanges entre nous. William avait réalisé, sur une tablette tactile, la carte de l'île avec toutes les notations sur les coins explorés du pays par les différentes équipes. Il ne manquait aucun sentier, aucune grotte, ni aucun cours d'eau. Le vent, près des côtes, soufflait plus fort, créant une perturbation au moment de notre atterrissage. Le bruit des chutes d'eau me ramena aux désagréables réminiscences de ma dernière excursion avec Faïz.

— Ça va aller, me rassura Lexy en posant sa tête sur mon épaule. Nous sommes cinq contre le père Fourase alors qu'il n'essaye même pas de lever son petit doigt !

Les battements de mon cœur se calmèrent. Mon amie avait raison, l'escapade d'aujourd'hui se résumait à un entretien qui avait été organisé auparavant par les deux gouvernements. Aucun changement de programme n'était à prévoir cette fois-ci.

Le véhicule se posa au sommet d'une falaise aux arêtes à couteaux tranchants. En sortant de l'habitacle, je fus prise instantanément d'un malaise. En effet, sujette au vertige, le vide sous mes pieds me paralysa sur place. Il m'était impossible de faire un pas de plus devant moi.

— Bah bien sûr ! râla Asarys qui nous avait rejoints près du véhicule. On dirait que c'est fait exprès. Mais pourquoi ai-je insisté pour venir dans ce fichu pays ?

— Je... oh non... et moi qui pensais que ce serait un abri de fortune au fond des bois, déclarai-je horrifiée, prête à m'évanouir.

Ray s'approcha au plus près du vide sans aucune crainte. Il admira la vue puis respira profondément.

— Les chutes d'eau sont juste en dessous de nous, nous indiqua ce dernier en nous invitant à le rejoindre d'un signe de la main.

En ne voyant personne venir, il se retourna vers nous, l'air excédé :

— Eh bien quoi ? Nous sommes juste à mille deux cents mètres d'altitude. Un peu de courage ! Pour votre information, le temple du chaman ne se trouve pas ici, mais tout en haut.

Son doigt pointa alors en direction du ciel derrière nous.

— Qui se retourne la première ? demanda Lexy à voix basse, ankylosée par la peur.

— Vas-y, Asarys, déclarai-je le souffle court, tu as toujours été la plus courageuse de nous trois.

— Quoi ? Mais pas du tout ! s'insurgea cette dernière, je suis juste en train de me faire dessus. Et d'ailleurs, si je me rappelle bien, c'est toi Lexy qui a déjà fait du saut à l'élastique !

— Oui, grogna celle-ci, dans un endroit qui était indiqué sur Google maps et à l'époque, les démons, les sorciers et l'enfer n'existaient pas pour moi, dans ce monde !

L'éclat de rire de William nous surprit à ce moment-là et nous fit nous retourner vers lui sans le vouloir.

— Allez mesdemoiselles ! nous encouragea-t-il, soyez des randonneuses aguerries.

Je parcourus avec des yeux écarquillés le chemin escarpé, à flanc de montagne, qui paraissait sans fin.

— Il faudrait se savoir immortel ou fou pour penser à gravir tout ça, murmurai-je effrayée.

— Et pour redescendre ? demanda Lexy tout aussi angoissée.

— Les voitures viendront nous récupérer directement là-haut, déclara William en nous emboîtant le pas.

— C'est une blague ? m'écriai-je ahurie et encouragée par les exclamations de mes deux amies.

Ray passa devant nous à son tour en ajoutant :

— Notre cher chaman, Issei, souhaite que nous gravissions cette montagne, seuls et sans aide afin... comment a-t-il dit déjà ?

— Afin que nous sortions de notre zone de confort, compléta William. Nous devons dépasser nos limites.

— Moi, j'appelle ça « défier la mort » ! se rebella Lexy en croisant les bras.

— Lui, je ne vais pas le louper ! grogna Asarys hors d'elle.

Ray et William s'éloignèrent de nous et commencèrent leur ascension. Nous nous mîmes à trottiner derrière eux afin de les rejoindre au plus vite, ne voulant pas rester toutes seules, ici, dans cet endroit.

Le début de la montée consista à grimper des marches d'une largeur de pas plus d'un mètre, à la verticale. Nous devions nous contenter de chaînes rouillées de chaque côté de ce parcours dangereux pour nous aider à avancer.

— Écologie, écologie. Nous n'entendons que ça depuis que nous sommes arrivés, mais ce truc-là va nous refiler le tétanos ! se plaignit Lexy juste derrière moi, le visage à présent en sueur.

À cet instant, je me surpris à repenser au cours de Madame Valls sur l'effet de la rouille et ses conséquences. Le résultat d'une simple vis ou d'un simple boulon contaminé par l'oxydation pouvait affaiblir des surfaces ou des structures que supportait cet organe d'assemblage. À quoi joues-tu, idiote ? Tu n'es pas assez dans le sensationnel là ? Je secouai mon visage qui devait probablement être aussi ruisselant que celui de mon amie afin de chasser de ma tête ces idées qui n'avaient pas leur place dans un moment pareil.