Dark Faïz Tome 2 [ Terminé]

Chapitre 5-2

— Je suis fatiguée ! m'exclamai-je en m'asseyant sur un des gros rochers qui longeait la rivière.

Faïz, en face de moi, ne prit pas la peine de relever la tête de son calepin. Dans un soupir, je détournai mon regard vers Zerkô, situé un peu plus loin. Celui-ci avait retroussé son pantalon jusqu'à ses genoux et essayait de pêcher maladroitement, des poissons pour notre déjeuner, avec ses larges mains comme seul outil. Bien que l'eau lui arrivât seulement au mollet, le courant n'était pas moins tranquille. Il n'y arrivera pas ! confiai-je à moi-même. La maladresse dont faisait preuve ce brave homme lui donnait un côté presque fragile sous sa carrure imposante. En me tournant de nouveau vers Faïz, j'aperçus au coin de ses lèvres un rictus insolent, comme s'il se moquait ouvertement de mes pensées.

— Notre guide manque cruellement d'entraînement, lança ce dernier sur un ton ironique.

— Pourquoi le détestes-tu ? Tu n'as même pas pris la peine d'essayer de dialoguer avec lui depuis qu'on nous l'a présenté.

— William a bien choisi ce type ! déclara Faïz la voix remplie de reproches. Même un unijambiste ferait mieux que lui, à croire qu'il l'a fait exprès.

— C'est vrai qu'avec Hanoura, tu n'as eu aucun mal à te sociabiliser. Tu dois certainement être déçu que notre ancienne accompagnatrice nous ait lâchés comme ça ! Vous aviez l'air de si bien vous entendre.

Mes paroles, teintées d'une pointe de jalousie, firent immédiatement disparaître le sourire de Faïz. Nous nous défiâmes ainsi quelques instants du regard.

— Zoé, reprit calmement ce dernier, tu serais capable d'avoir de la peine pour ce cher Anibal Lecter si je venais à lui demander d'arrêter ses conneries de cannibalismes.

— Non ! répliquai-je en essayant d'adopter un air offusqué.

Faïz pencha légèrement sa tête sur le côté tout en m'adressant un sourire des plus éblouissants, ce qui me fit perdre aussitôt pied. Ce moment de tendresse entre nous ne dura pas longtemps, car celui-ci reprit l'instant d'après un air grave. Brutalement, il se courba pour récupérer un bâton qui dérivait sur le cours d'eau.

— Pour tout te dire, je n'ai aucune confiance en lui, avoua Faïz.

— Pourquoi ? demandai-je, étonnée.

— Il suffit de le regarder !

— Oui, il est un peu mou je te l'accorde, mais nous avons rencontré des personnes beaucoup plus malfaisantes que cet homme. De toute façon, tu te méfies de tout et de tout le monde.

Faïz, concentré, serra sa mâchoire en regardant au loin. Il se leva subitement sans que je ne m'y attende et porta le bâton au-dessus de lui pour le lancer avec force. Celui-ci, telle une flèche, vint traverser le corps d'un long et gros poisson situé à plusieurs mètres de nous. Une traînée rouge colora à ce moment les eaux cristallines.

— Bon, il est temps de déjeuner ! s'exclama Faïz d'un ton sec.

Au loin, Zerkô, visiblement sous le choc, le félicita, les deux pouces en l'air pour cette belle prise.