Chapitre 13-1

2K 160 1
                                    

Asarys, Lexy et moi nous promenions dans un des jardins de l'auberge. Arrivées sur Eros depuis plusieurs semaines, nous n'avions jamais vraiment eu le temps de découvrir les environs. Les couleurs de celui-ci se rapportaient parfaitement au thème du printemps. Malgré une cruelle absence de lumière, la nature arrivait quand même à créer de magnifiques œuvres de compositions florales, nous faisant oublier la morosité de ce temps brumeux. Ici aussi, les fleurs de cerisiers recouvraient partiellement le sol, jonché de pavés aux couleurs bien prononcées. Partout où nous allions sur l'île, nous ne pouvions échapper à la déferlante de ces fleurs, un des symboles forts de ce pays.

— Il ne t'a rien dit de plus ? s'enquit Lexy impatiente.

— Non, répondis-je d'une voix pensive. Mais si on en croit ses mots, l'endroit doit être une véritable merveille.

— Vous passerez la nuit là-bas ? demanda Asarys curieuse.

Nous nous arrêtâmes à cet instant devant un petit temple aux briques rouges. Le petit édifice abritait un autel où des centaines d'encens brûlaient à longueur de journée. Ce lieu sacré avait le don de racheter les péchés des gens qui venaient y prier.

— Je ne sais pas, confiai-je avec un demi-sourire en soulevant les épaules. Je ne m'étais même pas posé la question jusqu'à maintenant.

Mes deux amies se regardèrent, les yeux écarquillés avec une excitation non contenue. Asarys porta ses mains à sa bouche pour étouffer ses cris de joie. Je la sommai d'arrêter, mal à l'aise.

— C'est juste un rendez-vous galant ! essayai-je de les sermonner. Pas la peine de se mettre dans tous ces états.

— C'est votre premier rendez-vous, précisa Asarys.

— Avec ton petit ami terriblement sexy, renchérit Lexy hilare.

— OK, OK ! m'écriai-je en mettant mes mains devant moi pour les stopper au plus vite avant que ces deux aliénées n'aillent plus loin dans leurs propos.

— Tu as ce qu'il faut ? me demanda subitement Lexy.

— Oui, j'ai de bonnes chaussures de marche et...

— Idiote ! Je ne parle pas de ça, me coupa mon amie.

En comprenant à quoi elle faisait allusion, je me détournai, gênée et à court de mots. Je fis demi-tour afin de leur faire comprendre qu'il était temps de clore ce sujet et de rentrer à l'auberge. Malgré mon mutisme sur le trajet du retour, mes deux acolytes, elles, continuèrent sur leur lancée.

— Surtout, refuse les coups de ceinture s'il est porté sur le sadomasochisme, me lança Asarys de derrière.

— Et évite de crier son nom, ajouta Lexy. C'est vulgaire et déplacé ! Laisse ça pour les filles qui...

— La ferme ! m'écriai-je en regrettant de m'être confiée à mes amies qui n'allaient certainement plus me lâcher après ça. Je n'aurais rien dû vous dire.

Leurs éclats de rire contagieux arrivèrent à mettre ma colère de côté et ma bonne humeur réapparut aussi vite qu'elle s'en était allée. Nous rentrâmes sereines de notre balade, l'esprit plus léger, prêtes à nous remettre au travail.

Je n'avais aucune envie de rentrer pour la quatrième fois dans cette eau glacée. La bonbonne d'oxygène sur les épaules semblait bien peser des tonnes.

— Ce n'est pas possible ! Ils veulent notre mort, balbutia Lexy grelottante entre Asarys et moi.

Debout, au bord du bassin, je croisai les bras sur mes épaules pour essayer de me réchauffer. En vain, les cheveux ruisselants ainsi que le tee-shirt et le pantalon trempés qui me collaient aux corps n'arrangeaient pas les choses. Asarys et moi nous regardâmes. Ses lèvres bleutées indiquaient à quel point elle était frigorifiée. Nous l'étions toutes les trois. Bien que le bassin fût disposé à l'intérieur du bâtiment aux murs vitrés, cette piscine n'était pas chauffée pour l'occasion. Malika nous montrait, avec deux de ses collègues masculins, la meilleure façon de nous déplacer sous l'eau et les gestes de défense à adopter en cas d'attaque de corps à corps sous-marine. Cet exercice pénible en situation réelle réveillait la douleur de mes blessures encore bien voyantes sur mon corps.

— Nous... nous ne serons... ja... jamais prêtes pour... de... demain, confiai-je aux filles en claquant des dents.

— Pas le choix, Zoé. Tout... tout est dans la... a... a tête, répondit Asarys. Rappelle-toi de ce que... que nous avons vécu avec... Issei.

Je levai ma tête vers les gradins, à la recherche de Faïz. Celui-ci était debout, en marge du groupe, et m'observait, impuissant en se rongeant les sangs. La douleur se lisait sur son visage comme s'il souffrait à cet instant avec moi. Soudain, il détourna son regard vers Barthey qui était assis, plus loin, de l'autre côté de la rangée. Avec ses deux doigts dans la bouche, Faïz siffla un grand coup pour attirer son attention puis, d'un geste de la main, ordonna à l'inspecteur de tout arrêter. Karl secoua la tête d'un air désolé, refusant d'obéir à sa requête. C'est alors que le grognement de Lexy me fit tourner la tête, cette dernière essayait de nous dire quelque chose :

— Ils dé... dépensent des mi... milliards de dollaaaard pour obtenir un cliché d'une vue aérienne des... des lacs du Sun, mais nous, nous pou... pouvons toujours rêver pour qu'on nous donne une combinaison de... plon... plongée thermique, bégaya Lexy, à la limite de l'hypothermie.

— Nous devons revoir la défense basse et aussi la haute au cas où vous perdriez vos armes sous l'eau, continua Malika.

Cette dernière sortit de l'eau sans apparemment souffrir du froid, avec les deux hommes sur les talons.

— Mike ? appela-t-elle d'une voix rêche. Va chercher les couteaux ! Nous allons les placer au-dessus de leurs chevilles. Et profites-en aussi pour récupérer les arbalètes.

Dark Faïz Tome 2 [ Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant