Chapitre 3.1

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              La solution la plus rapide aurait été d'y aller sous notre forme animale. Pour ce coup-là, la voiture fut l'option par défaut. La meute de Lucius vivait au sein de la réserve de La Vérendrye, dans la province du Québec, à quatre heures de route de chez nous. Je m'en voulais de rallonger le temps de parcours et de priver Declan d'une course en pleine nature. Celui-ci ne semblait pas m'en tenir rigueur.

— Notre arrivée se fera plus remarquer ainsi, avait-il souligné avec un clin d'œil.

Je m'étais renfoncée plus encore dans mon siège. C'est justement ce que j'espérais éviter. Nous en eûmes pour une bonne heure de trajet, en comptant les détours que nous obligeait à faire le tracé de la route, tout en courbes. Heureusement que je n'étais pas malade dans les transports, cela aurait été le bouquet !

Un grand portail s'élevait devant nous, marquant et barrant l'entrée de la propriété de la meute. D'extérieur, on n'apercevait qu'une large allée de terre, bifurquant à un moment, puis s'évanouissant dans le parc arboré. J'ouvrais des yeux étonnés. Cela n'avait rien à voir avec notre lieu de résidence bien enfouie dans le paysage, retiré et simple. On pouvait déjà se faire une idée du maître de ces lieux. Impossible d'ignorer son statut d'alpha et de chef de meute. Une caméra quasiment indétectable se braqua vers nous et l'instant d'après, les portes d'acier noir se séparèrent délicatement, silencieuses. Declan engagea la voiture dans l'allée, les pneus roulant lentement sur le gravier. On déboucha devant un bâtiment imposant.

— Voici le Manoir, présenta Declan.

Dire qu'il était grand était un euphémisme. Je penchais la tête pour tenter de le voir dans son ensemble. Je finis par abandonner, me concentrant sur la double porte d'entrée de la demeure. Devant celle-ci se tenait une silhouette en accord avec l'immensité des lieux.

— On est attendu. Il a pas l'air très commode lui, sa cicatrice à l'œil n'arrange pas les choses.
— Je te présente Lucius, le chef de ce clan. C'est un alpha. Et en ce qui concerne son visage, évite d'y faire référence devant lui.

Je me mordis la lèvre en restant silencieuse, appréhendant plus que jamais la confrontation avec les membres du Haut Conseil.

Une fois la voiture arrêtée, j'en descendis lentement, veillant à opérer la sortie la moins maladroite possible, ce qui me demanda un effort de concentration. Heureusement, Declan m'escorta jusqu'en haut des marches, m'évitant de subir l'épreuve toute seule.

Je me trouvais devant lui. Comment étais-je censée le saluer ? Je n'avais pas pensé à questionner mon chef sur le sujet. Je ne pus m'empêcher de me mordiller les lèvres sous le stress provoqué. Un regard acéré du maître des lieux me fit cesser de suite ce tic. J'optais alors pour une révérence, seule option que mon cerveau envisagea sur le moment. Le temps de me relever, la honte m'envahissait déjà. Je jetais un coup d'œil plus que furtif sur notre hôte pour prendre la mesure de son mépris. Pas moyen d'avoir une expression plus fermée que celle qu'il arborait. Au moins, j'étais épargnée. Pas de grimace de dégoût ou de pitié. Il inclina la tête devant Declan puis nous guida à l'intérieur. Apparemment, nous étions les derniers arrivés. Le fait qu'il nous ait attendus était-il un bon signe ? Mon chef me poussa doucement vers l'avant, un air rassurant sur le visage. J'avançais alors, prête à entrer dans l'arène.

Protège-moi  - T.2: L'Alpha [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant