• Trouvons asile chez un autre démon •
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...RAYLE...
DIX JOURS PLUS TARD |
— Tu sais ce qui serait plus simple ? me demande Bogdan.
— Mmm ? lâché-je distraitement.
— Que tu échanges de place avec Léora.
— Hein ? Pourquoi ?
Je me tourne vers lui et l'interroge du regard, perplexe. Conduisant habilement d'une main, Dan esquisse un sourire moqueur en posant son coude sur le rebord de la portière et continue de regarder devant lui. Ça doit faire presque quatre heures que nous sommes sur la route en direction de Santa Faclino. Nous avons enfin fini par quitter la chambre d'hotel miteuse que nous avions louée non loin de l'appartement du docteur Xing chez lequel Lucas était toujours sous observation après son opération clandestine. Et je dois dire que rester dans une chambre avec un type complètement à côté de la plaque et donc sincèrement flippant n'a pas été une partie de plaisir. J'ai dû aider Léora à m'occuper de Bogdan pendant quelques jours pour essayer de le faire parler, de le calmer parce que ces accès de colère ne se sont pas résumés à celui à l'Idyll Bar. Je n'avais jamais vu telle boucherie. Je crois bien que j'ai failli vomir en entrant mais je me suis retenu parce que mon ami avait besoin de moi. Bogdan avait tué pour faire mal. Les gens n'étaient pas simplement morts par l'effet d'une simple balle mais par une violence libérée digne d'une bête.
Alors, quand il devenait violent à nouveau, dévoré par des envies de destruction impossibles à retenir, je le sortais pour qu'il aille se défouler dans des lieux abandonnés sur des objets et non sur des humains innocents. Et quand la douleur psychologique le poussait à vouloir se faire du mal, j'étais là pour le maîtriser. Plus ou moins. Léora, quant à elle, faisait en sorte d'apaiser son esprit en chantant à sa demande, ce qui était plutôt efficace.
Et comme ami un tant soit peu plus stable émotionnellement - ou du moins, entre nous quatre, Lucas étant inapte à jouer les oreilles attentives -, je me suis aussi occupé de Léora elle-même. Pas facile de ne pas être du tout affectée par les tourments du Russe. Surtout quand on a déjà un trouble qui, lui-même, est accompagné par tout un tas d'autres problèmes psychologiques. Je me suis donc adapté à chacune des personnalités qui se manifestaient face au bouleversement qu'avaient provoqué tous les évènements précédents. Je crois que je n'ai jamais été aussi fatigué. Ça se voit d'ailleurs sur ma gueule. Un vrai putain de vampire. Mais je ne suis pas le seul à ressembler aussi bien à un zombie qu'à un buveur de sang : nous sommes une véritable bande de morts vivants. On s'est vu offert le pack intégral : cernes, teint cireux, yeux rouges, tête d'enterrement...
Enterrement...
— Tu n'arrêtes pas de regarder Lucas depuis qu'on est parti, me répond enfin Dan.
— Quoi ? Non, je rétorque en fronçant les sourcils.
— Hum... si, ricane-t-il tout en me jetant un regard railleur.
Je roule des yeux, excédé et croise mes bras sur mon torse en m'enfonçant dans mon dossier. Je serre les dents et quelques minutes plus tard seulement, je me rends compte qu'il a totalement raison car je me prends en flagrant délit. Surpris par moi-même, je me détourne vivement du rétroviseur intérieur pour fixer la route. J'étais vraiment en train de regarder Lucas, bordel ! À côté de moi, Dan ricane en secouant la tête.
— Ferme ta gueule, grogné-je entre mes dents.
Mais ça ne fait qu'accentuer son rire.
Je souris malgré moi parce que je remarque qu'il s'autorise un peu à se détendre. Peut-être est-ce parce que nous nous éloignons de la ville dans laquelle Sergueï est mort. Même si, selon le voeu de Bogdan, nous avons réussi à enterrer Sergueï dans le cimetière de Midnight Falls de manière totalement illégale en ayant soudoyé les bonnes personnes. Horrible moment. J'ai toujours détesté les enterrements. La douleur devient encore plus pesante et plus insoutenable, l'absence de l'être cher décédé se fait encore plus ressentir et c'est encore plus triste que l'on sort du cimetière. Je me suis toujours demandé pourquoi nos cimetières étaient un lieu si austère. Dans certaines religions ou certains pays, la mort n'est pas à ce point redoutée et presque méprisée. Le deuil serait sans doute plus simple si notre vision de la mort changeait...
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Cruelle Virtuosité | T1, T2 & T3 | TERMINÉ
ActionBrûlée. Traumatisée. Dégoûtée. Voilà les mots que Leora Lane utiliserait pour se qualifier. Depuis l'incendie qui lui a ravi ses parents ainsi que sa confiance en elle, Léo se contente de suivre les aléas de son existence sans prendre de réelle déc...