Cruelle Virtuosité | T1, T2 & T3 | TERMINÉ

| CHAPITRE 5 |

• Ta culpabilité est ton bourreau et ta souffrance ton châtiment •

~ ☀︎ ~

...LEO...

Attachée. Je suis attachée.

Paniquée, je tente de bouger mais mes poignets et mes chevilles liés m'empêchent de trouver une bonne stabilité si bien que je ne réussis qu'à irriter ma peau en voulant me défaire de ses cordes qui meurtrissent mon corps. Où est-ce que je suis ? Me suis-je de nouveau fait kidnapper ? Ma respiration s'écourte, mes poumons semblent se comprimer et ne veulent plus accepter le moindre fil d'air si bien que j'ai bientôt l'impression d'être en manque d'oxygène. Je tente de hurler à l'aide mais ma voix est prisonnière de ma gorge et ma détresse reste enfermée dans mon coeur sans que je ne puisse véritablement l'exprimer. Je suis dans le noir complet. Je ne vois rien. On dirait que je suis devenue aveugle. Je ne peux que ressentir le contact désagréable des cordes sur ma peau et entendre le bruit que fait mon coeur en se fracassant avec violence contre ma cage thoracique.

Puis soudain, la lumière jaillit, violente. Je ferme les yeux par réflexe en tournant la tête puis des pas se font entendre. Quelqu'un approche. Mais quand je relève les paupières, je ne vois que les chaussures épaisses d'un homme et le corps qu'il traîne derrière lui. Ma respiration se coupe définitivement quand il jette la personne par terre. Je fais face à l'expression horrifiée de ma soeur.

Cette fois-ci, ma voix résonne dans le silence.

— ROSE !

— Léora...

Elle pleure. Elle semble faible. Cette vision me perturbe. Je relève les yeux, tétanisée pour essayer d'apercevoir le visage de mon bourreau mais une espèce de nappe noire me dissimule son identité. Je me débats contre mes liens. Il faut que je me détache. Il faut que je sauve Rose. Il faut que je sauve ma soeur. Je hurle. Je sanglote en comprenant que ce que je fais ne sert à rien. Je sens juste ma peau s'effilocher. Alors je commence à supplier.

— Je vous en prie ! Je vous en prie ! Je ferai tout ce que vous voudrez ! Ne tuez pas ma soeur !

Je me trouve pitoyable. Je renifle et pleure. Rose, étonnement libre de ses mouvements, parvient à se redresser malgré sa faiblesse et s'approche de moi. Elle prend mon visage en coupe et me sourit pour tenter de me rassurer. Mais ce qu'elle me dit me fige d'effroi.

— Tu aurais dû me choisir, moi.

— Quoi ?

Elle se lève. Et c'est là que je vois le sang qui coule le long de sa tempe et le trou qui la décore. Son regard fiché dans le mien, elle s'effondre avec ce sourire contrit qui me fait hurler à la mort.

— Pourquoi est-ce que tu pleures, mилая (pr : milaya) ?

Mon coeur a un loupé. Je connais cette voix. Je connais cette horrible voix. Et d'un coup, je libère mes poignets avant de délier mes chevilles pour courir vers le corps inerte de ma soeur. Je le protège en cherchant la source de cette voix qui me hante, cette voix aux sonorités insolentes et cruelles. Mais je ne vois le Lynx nulle part.

— Pourquoi est-ce que tu pleures ? Pourquoi est-ce que je te hante ? Ce n'est pas moi le coupable.

— C'est vous ! C'est à cause de vous ! Montrez-vous !

Son rire me glace le sang. Je me lève et tourne sur moi-même en le défiant de se montrer mais je ne vois rien autour de moi. Seul le corps de Rose est éclairé. Nous sommes plongées dans le noir complet. Et ça m'angoisse. Pour la première fois, l'obscurité me fait peur. J'ai l'impression que Matveï pourrait m'attaquer à tout moment. Sa voix me tourne autour, comme un prédateur.