| CHAPITRE 19 |

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• Et on se protège malgré tout... •

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...DAN...


Un miroir sans tain, une table, une chaise, une porte et un suspect. Rien d'autre. Pour l'originalité de la mise en scène, on repassera. Ils auraient certainement dû trouver un autre moyen d'intimidation que l'heure qui tourne et cette salle vide pour que je parle. Ils savent pourtant que j'ai l'habitude de ce genre de petits divertissements. Je laisse échapper un soupir moqueur et me lève de ma chaise pour me réinstaller face à la vitre, les jambes de part et d'autre du dossier et les bras posés sur ce dernier malgré mes mains menottées. Je contemple mon reflet en sachant pertinemment que tous les petits flics curieux mis sur l'affaire me regardent comme si j'étais un animal de foire. Je souris et les salue.

Toujours être gentil avec les poulets. Ça les rend plus tendres et plus stupides.

La porte de ma pièce vide finit par s'ouvrir. Je ne bouge cependant pas. Les plus drôles sont de l'autre côté de cette vitre.

— Pouvez-vous vous asseoir correctement, s'il vous plaît ?

— Dîtes, ont-ils du popcorn ?

— Ne nous faites pas perdre du temps, M. Loukianov.

— Très bien, très bien. Je dis juste ça pour eux, déclaré-je en m'asseyant « correctement » face au Commissaire Cowan. Le spectacle serait bien plus agréable pour la pétasse du gouverneur avec un peu de popcorn.

Mon sourire narquois semble les rebuter. Je le garde plaqué sur le visage en posant mes mains sur la table, prêt pour la petite session d'interrogatoire inutile. Ils ne veulent pas perdre du temps et pourtant, je suis là. À croire que le Commissaire n'a pas vraiment envie de résoudre cette affaire. Je le fixe. Il est mal à l'aise. Même son petit assistant n'a pas l'air bien dans ses godasses mais à la différence du Commissaire qui garde une expression plutôt neutre, le jeune flic fronce les sourcils et me fait savoir silencieusement qu'il ne peut pas me blairer. J'arque un sourcil plutôt moqueur.

— Tu sais que tu pourrais mourir à cause d'un tel regard ? Ne l'offre pas à quelqu'un de cruel, ça pourrait se retourner contre toi, Ashford.

Immédiatement, il déglutit et perd son masque de colère et de dégoût. Je ricane.

— Bon, vous vous dites innocent mais vous étiez sur le lieu du crime quand nous sommes arrivés et vos empreintes sont sur l'arme. Vous ne niez pas cela, n'est-ce pas ?

— Non, j'étais bien là-bas.

— Donc vous reconnaissez cet endroit et ce corps, votre victime ?

Il place des photos devant moi. Je ne leur jette même pas un coup d'œil, gardant mon regard vissé au visage fatigué et crispé du Commissaire qui s'agace lentement de mon absence de coopération. Je sais très bien ce qu'il y a sur ces clichés : le corps du Gouverneur Harley Atkins, étendu sur son luxueux tapis turc, entouré d'une auréole de sang. Je sais que ce n'est pas moi, l'auteur de ce crime même si j'aurai très bien pu l'être. Et encore mieux, je connais l'identité du meurtrier.

Mais si je tiens à la vie, il vaut mieux pour moi que je garde le silence. Ou plutôt, je préfère protéger le véritable assassin même si savoir que Léora m'a piégé de cette façon me trouble plus que je ne voudrais l'admettre.

— Si ce n'est pas vous l'assassin, Bogdan, qui est-ce ? Plusieurs témoins vous ont vu rentrer dans le bureau du nouveau gouverneur deux heures avant le meurtre et vous n'êtes jamais ressorti.

Cruelle Virtuosité | T1, T2 & T3 | TERMINÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant