Chapitre 1 : La sorcière (1/2)

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     Le temps était clair, le soleil brillait. Tout était calme, paisible. Personne ne semblait se douter que, quelques heures plus tôt, le mal était à l'œuvre dans les belles rues de la capitale.

     Amélia se trouvait assise sur un banc au milieu du Parc de Lune. Les yeux fermés, elle profitait de la chaleur du soleil sur sa peau et la fraîcheur de l'air dans ses poumons. Il y avait si longtemps qu'elle n'était pas sortie de la maison, cela faisait un bien fou ! Ses leçons l'épuisaient. Comment son professeur pouvait-il être aussi ennuyeux alors qu'il enseignait une si belle matière que la magie ? La jeune fille était persuadée qu'elle en apprendrait bien plus toute seule qu'avec lui. Si seulement elle avait pu avoir Anita Norwood comme préceptrice ou simplement aller à l'Université comme les autres jeunes de son âge...

     – Votre mère ne va pas être contente de savoir que vous prenez ainsi le soleil, mademoiselle.

     Un fin sourire étira les lèvres de la sorcière. Elle reconnaissait cette voix et devinait la silhouette toute fluette de son amie Emily qui lui faisait de l'ombre.

     Oui, c'était certain, Azura Moonfall n'aimerait pas voir sa fille prendre le soleil comme une personne ordinaire. Se cacher sous une ombrelle était beaucoup plus digne d'une demoiselle de bonne famille. Mais Amélia s'en fichait, elle ne rêvait que de liberté et si quelques rayons de lumière pouvaient lui permettre de se sentir libre ne serait-ce que quelques instants alors soit, elle prendrait le soleil, peu importe ce que sa mère pourrait en dire à son retour.

     – Je m'en moque, répondit-elle finalement sans ouvrir les yeux. De toute façon, quoi que je fasse, ma mère trouvera toujours à redire.

     – Mais non, sourit Emily. Je suis persuadée qu'elle est fière de la jeune femme que vous êtes en train de devenir. Peut-être ne sait-elle pas comment vous le dire, voilà tout.

     – Ça, je le croirai le jour où elle posera sur moi un regard dépourvu de dédain.

     Amélia ouvrit lentement les yeux et se tourna vers son amie en souriant. La jeune fée était resplendissante, comme d'habitude. Ses cheveux, blond comme les blés, brillaient à la lumière du soleil, dévalant son dos dans une longue tresse parsemée de rubans dont pas une mèche n'osait dépasser. Ses grands yeux verts pétillaient de malice alors qu'elle affichait un sourire en coin complice. Amélia trouvait toujours fascinant le fait que même cette affreuse tenue de domestique aux couleurs ternes ne pût rien enlever à la beauté naturelle d'Emily. Les fées étaient vraiment à l'image de leur ancêtre angélique : magnifiques.

     – Autant dire jamais, conclut Amélia en se redressant. Bien, poursuivit-elle sans laisser le temps à Emily de répondre, nous devrions rentrer à présent. Sinon ma très chère maman va encore faire courir ce pauvre M. George dans tout Riverfield pour nous trouver.

     – Bien, mademoiselle.

     Amélia se releva d'un bond et commença à traverser les pelouses verdoyantes avec Emily.

     Baigné de soleil, le Parc de Lune offrait un spectacle resplendissant emplie de rire, de joie et d'innocence. Tout semblait plus vivant, plus lumineux au milieu de ces parterres de fleurs colorées, ces chemins de terre, ces bancs de pierre marbrées et ces arbres dont le vent s'amusait à faire bruisser les feuilles avec légèreté. Les branches des saules dansaient lentement dans la brise du matin, entourant les nombreuses marres aux poissons multicolores. Tout était calme et paisible, d'une beauté presque irréelle. Et si coloré ! En comparaison, le Cimetière des Cendres, lui, semblait monochrome et triste à pleurer de l'autre côté du parc.

     Un peu plus loin, les deux jeunes filles aperçurent des enfants jouer avec leurs parents. En levant les yeux au ciel, elles purent même apercevoir des cerfs-volants en forme de poissons géants et d'oiseaux légendaires. Amélia les regarda avec envie, se souvenant du temps où elle aussi avait été insouciante avec son frère. Un passé qui lui semblait comme un très vieux rêve aux contours flous, presque une illusion où elle avait pu courir, rire et jouer comme les autres.

Amélia Moonfall - Tome 1 : Le Tueur de FéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant