Amélia Moonfall - Tome 1 : Le Tueur de Fée

Chapitre 34 : Sous la lune (2/2)

     Un loup-garou déguisé en dragon venait d'entrer en scène avec une dizaine de salamandres bouillonnantes. Il sortit alors une flûte traversière de sa poche et se mit à jouer, faisant faire des tours aux petits lézards de feu. L'une des salamandres refusa d'obéir. Une dispute loufoque éclata alors entre le dresseur et elle, le loup continuant de souffler dans sa flute des sons courts comme des sifflements furieux, les joues rougies. La salamandre tout aussi furibonde, sautillait autour de lui en essayant de lui griller les orteils. Amélia riait aux éclats, mais Jagger ne parvenait pas à se concentrer sur le spectacle. Si bien qu'une fois ce dernier terminé et avant même que les applaudissements ne finissent de retentir, l'homme-fée se précipita dehors, entrainant une Amélia déconcertée à sa suite.

     – Jagger ? Mais qu'est-ce que tu fais ? Le spectacle n'est pas fini ! s'exclama-t-elle alors qu'ils fendaient la foule pour sortir du chapiteau.

     – Je voudrais te montrer quelque chose, lui sourit-il en retour. Je suis désolé, je ne pouvais pas attendre plus longtemps.

     Perplexe mais dévorée par la curiosité, Amélia décida de se laisser guider.

     Une fois à l'air libre, ils traversèrent la fête foraine écarlate à toute jambe. Amélia regarda les stands à merveilles défiler avec envie sans que Jagger ne s'arrête à aucun d'eux, pas même à celui à friandises dont l'odeur la fit saliver. À la place, il la conduisit jusqu'au fond du parc, bien loin des installations du Cirque.

     – Où tu m'emmènes ? s'amusa la sorcière derrière lui.

     – Tu vas voir, lui sourit Jagger en continuant sa route.

     Déambulant entre les arbres, Jagger conduisit Amélia aux limites de la réserve jusqu'à une charmille fleurie où ils s'enfoncèrent sans s'arrêter. À l'intérieur, ce fut comme s'ils traversaient le plus doux des rêves. Des belles-de-nuit s'épanouissaient partout autour d'eux, éclairées par de petites lucioles dont la lumière dorée offrait un cadre tout à fait charmant à l'obscur passage.

     Un moment plus tard, Jagger et Amélia débouchèrent sur une petite cour secrète entourée de hauts murs couverts de lierre. Une vieille fontaine de marbre se dressait en son centre, la statue d'une ondine à la chevelure couverte de mousse laissait couler un filet d'eau dans le bassin. L'endroit était tout simplement splendide.

     Alors qu'Amélia admirait tout ce qui l'entourait avec émerveillement, Jagger la conduisit au bord du bassin où ils prirent place, bercés par le roulis de l'eau et la musique de la fête qu'ils entendaient à peine. Ils regardèrent les étoiles décorées des illusions du cirque, admirèrent les aurores boréales dansant dans le ciel et les milliers d'étincelles qui s'élevaient du grand chapiteau. Tout était si beau et l'instant si merveilleux qu'Amélia croyait rêver.

     – C'est magnifique, fit Amélia en souriant. Comment as-tu découvert cet endroit ? demanda-t-elle en se tournant vers lui.

     Jagger haussa des épaules, son regard se baladant négligemment sur les dalles percées d'herbes à ses pieds.

     – C'est une vieille cachette où m'emmenait ma mère quand ça n'allait pas, avoua-t-il au bout d'un moment. J'aime beaucoup cet endroit, c'est calme et personne ne se souvient de cette cour donc on y est tranquille. J'y ai passé pas mal de temps, sourit-il avec nostalgie.

     Amélia le regarda longuement avant de laisser son regard vagabonder partout autour d'elle. Elle avait l'impression de se trouver dans une de ces fictions romantiques qui plaisait tant à tante Luvenia.

     Jagger coula un regard timide vers la sorcière. Ses yeux pétillaient. Et avant qu'il ne s'en rende compte, il releva une mèche de cheveux qui lui tombait sur le visage. Amélia se retourna vivement à ce contact, surprise. Leurs regards se croisèrent et l'espace d'un instant, ils furent seuls au monde. Gênés, ils finirent par détourner les yeux, observant le jardin secret parsemé d'illusions vaporeuse du festival.