Chapitre 25 (2/2)

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Qui est cruel avec son ennemi sera rude avec son ami.


Point de Vue Lolita — 13 mars 2081

Trois ans. Voilà trois ans que je gardais ce lourd secret en moi. Celui qui ferait tomber mon patron de son piédestal, qui le discréditerait aux yeux du peuple, lui qui avait commis tant d'atrocités, mais je me devais de tout taire. De faire comme si de rien n'était. Rester la farouche et fidèle Lolita Soapshop.

Je contemplai mon bureau qui s'était décidément bien agrandi depuis mes dix-sept ans sous le regard blasé de Iolé. J'allais désormais sur ma vingtième année et j'avais prouvé à tous que je méritais d'être à présent le bras droit de Dpékan. Je n'étais plus sa petite protégée que tout le monde regardait mal sans rien pouvoir dire.

Tout le monde me craignait à présent. J'étais respectée. On balançait des « Madame » à tout va pour faire un peu de zèle et pour bien passer sur mes comptes-rendus réguliers que je faisais au patron. Il m'avait chargée de trouver les éléments dissidents et les têtes brûlées. J'en avais fait virer un paquet à contre cœur pour ne pas griller ma couverture qui était dorénavant celle d'une résistante encore plus dans l'ombre que ceux qui se cachaient.

Dans notre société reconstruite, il n'y avait plus de place pour les résistants qui étaient morts, pour la plupart. Les autres se terraient, car leurs têtes étaient mises à prix. Allant de quelques centaines de lauruus – nouvelle monnaie mise en place par Dpékan– à des milliers pour les têtes de Muritani, mais pire encore pour Victoire et Infy. Enfin, jusqu'à aujourd'hui. Dpékan avait donné l'ordre de lever les traques. Selon son plan, cela ferait sortir les résistants de leur trou.

En effet, ils ne sentiraient plus la menace et il ne suffirait plus que d'une seule erreur et on leur tomberait dessus. C'était cruellement ingénieux de sa part, mais je ne pensais pas les viser comme si stupides que ça. S'ils avaient réussi à se cacher durant trois ans, ce n'était pas maintenant qu'ils allaient se relâcher, mais il les voulait vivants. Pourquoi nécessairement Victoire ? Je n'en avais aucune f*utue idée, mais c'était elle qui valait le plus.

Je croyais qu'il les sous-estimait un peu trop, mais je n'avais pas osé aller à l'encontre de ses ordres, de peur qu'il pense que je sois des leurs. Ce qui était, bien entendu, le cas. Depuis que Daniel m'avait ouvert les yeux, j'étais restée vigilante. Je ne me laissais plus berner par les yeux doux et le sourire mielleux de Dpékan. Je prenais toujours du recul sur ce qu'il me disait et me rappelais que c'est lui qui avait tué mes proches.

Je faisais ce qu'il fallait pour qu'il n'ait pas de doutes, mais ça s'arrêtait là. Je ne voulais pas salir la mémoire de Daniel qui était mort pour m'aider. Enfin, j'imaginais qu'il était mort. Je ne l'avais pas revu et on n'avait jamais reparlé de lui. Que ce fut avec mes subordonnés ou avec mon mentor. J'avais bien peur que la solde dirigée à son encontre ait eu raison de lui. Il était parti seul et sans arme, il n'aurait jamais fait le poids.

En sa mémoire, et comme mantra pour m'obliger à rester attentive, j'avais gardé la bague qu'il avait voulue m'offrir. Je me disais qu'il ne m'en aurait pas porté préjudice. Après tout, je croyais qu'il m'aimait toujours en partant d'ici. Et si ce n'était pas le cas, on avait gardé une amitié entre nous. Quoiqu'il en fut, je la portais autour du cou. Je l'avais récupérée dans sa chambre, après sa fuite, espérant trouver une lettre de lui, me disant où il partait. Malheureusement, il n'y avait rien d'autre que cet anneau.

Parfois, quand je me réveillais d'un cauchemar, chose fréquente, je le serrais fort entre mes doigts et ça me calmait. Il avait été sans doute le grand frère que je n'avais jamais eu. Et où qu'il fut, je savais qu'il était encore présent pour moi, pour me guider. La deuxième chose que je sentais autour de mon cou était une chaîne, en argent. Elle était à la grand-mère de Victor.

Victoire Ou Comment Survivre En Milieu Hostile.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant