L'oiseau en liberté est mieux qu'en cage dorée.
Point de Vue Hugo — 25 décembre 2077
Cela faisait deux mois que j'avais vu ma sœur pour la dernière fois, je venais de marquer une nouvelle croix sur mon calendrier. Plus le nombre de jours augmentait, plus mes espoirs de la retrouver s'amenuisaient. J'avais peur pour elle. Elle était si pâle et semblait si mal en point la dernière fois que je l'avais aperçue. Je ne l'avais quittée que parce que je risquais de compromettre la mission et les personnes concernées. Elle me manquait beaucoup. Beaucoup plus que je ne l'admettrai jamais.
Elle était ma sœur, mon modèle dans la vie. Je l'adorais même si l'on se disputait fréquemment. J'ai envie de dire que c'était la même chose chez toutes les fratries avec un écart d'âge aussi faible... On avait à peine vingt-et-un mois d'écart. L'âge critique selon certains psychologues. Ces derniers pensaient que les fratries rapprochées étaient plutôt élevées comme jumelles et que lors de l'adolescence, le besoin d'identité propre devenait explosif. Cependant, avec nous, ça s'était assez bien passé, comparé aux autres.
On a toujours été très complices, étant petits. Dire que nous avions fait les quatre cents coups ensemble ne serait pas un euphémisme. Des petites aux grosses bêtises, on en avait vues beaucoup. Beaucoup entendues. Et en avons beaucoup appris. Ma sœur était une haut potentiel... Moi aussi, mais, bizarrement, personne dans la famille n'en avait évoqué le sujet avant notre diagnostic.
Jusqu'à que l'on décèle cette capacité mentale chez ma sœur, on s'ennuyait souvent. La plupart des gens nous semblaient bêtes, même si quelques-uns avait été digne d'intérêt. Par la suite, nous avions compris que nous n'avions plus nos places au sein de cette société qui refoulait tous les « anormaux » comme nous.
Déjà que les hautes sphères du pays avaient mis en place depuis quinze ans une sorte de tri pour éviter les surpopulations, les famines, et cetera. Cela consistait à laisser mourir les malades. Nombre de fois en passant devant l'hôpital, en rentrant de l'école, j'entendais le personnel dire « Encore cinquante aujourd'hui et toi ? » ou des patients qui s'enfuyaient pour échapper à l'injection létale quand on les déclarait inaptes ou incurables.
Même sort pour les personnes âgées qu'on ne comprenait plus, qui avaient des pathologies physiques ou mentales qui nécessitaient un accompagnement de vie. Les gouvernements voulaient faire des économies et avaient déjà eu des prémices de guerres civiles, ils avaient donc cessé les taxes supplémentaires. En contrepartie, les malades, les meurt-de-faim étaient le plus souvent laissés pour compte et les plus de soixante-dix ans, étaient euthanasiés. Tous ceux pour qui la mort de leurs aïeux importaient – car certains n'attendaient que ça pour toucher l'héritage ou la libération d'une charge financière, voire pour les concernés eux-mêmes, qui préféraient partir –, avaient protesté suite à cette décision soudaine, mais quand les gouvernements avaient commencé à faire leur sélection en leur démontrant par « a + b » que cela était bénéfique pour l'ensemble de la communauté, ils avaient cessé de se battre. Ensuite, les politiciens avaient baissé les taxes, pour appuyer leurs dires, et cela fonctionna : la population s'en trouvait ravie...
La seule chose qui avait augmenté était le prix de la place dans un cimetière ou dans un crématorium, car le nombre de décés augmentait chaque jour.
Enfin, s'il n'y avait eu que ça... Non parce que ce serait encore bien trop beau. On nous avait confisqué des droits, même si certains, que ce soit les citoyens et les politiciens, clamaient la démocratie. Soit ils étaient idiots, soit ils étaient dans le coup.
À quel moment se dire que supprimer le droit des fans de faire ce qu'ils voulaient de leurs séries, personnages, jeux vidéo, célébrités préférés... était une bonne idée pour la liberté d'expression ? Bien sûr, je comprenais que cela puisse bénéficier aux autres médias.
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Victoire Ou Comment Survivre En Milieu Hostile.
Ciencia FicciónEn 2027, voilà maintenant cinquante ans, les gouvernements de tous les états se sont unifiés. Ils dirigent ensemble une sorte de parlement, qui a décidé, à l'unanimité, que le progrès était néfaste pour notre société, et qu'il fallait donc l'abolir...