JENIFER
15 septembre 2018,
J'arrête le moteur de la voiture près de la maison de mon frère. La musique se coupe. Une nouvelle fois, je regarde par le rétroviseur intérieur, mon garçon fixe la demeure. Je souffle et je me détache.
De toute façon, je ne peux pas faire autrement.
Je sors du véhicule et j'en fais le tour pour ouvrir à Antone. Il ne s'est pas détaché, il n'est pas pressé. J'ai si mal au cœur de le voir comme ça. J'embrasse sa joue et je lui chuchote à l'oreille :
— Ça va passer vite trois jours champion.
Une fois que je le détache, il entoure ses bras autour de ma nuque et il sort de la voiture dans mes bras.
Ce sera seulement pour trois jours Jenifer.
Je ferme la voiture et je m'avance vers la maison. J'ai l'impression qu'Antone se crispe de plus en plus. Ça ne doit être qu'une impression. En tout cas, il devient de plus en plus lourd et je peine à le porter comme je suis en train de le faire. Je sonne et je passe le portail pour aller jusqu'à la maison de mon frère. Je frappe à la porte et on vient nous ouvrir. Mon frère fait deux têtes de plus que moi alors je lève la tête pour le regarder.
— Monsieur et Madame Leblanc ! Entrez ! Rit-il.
Je rentre et dès mes premiers pas dans la maison, je pose Antone par terre. Yann me débarrasse du sac d'Antone. En nous entendant, Emeline, la femme de Yann débarque dans notre pièce pour nous saluer. Elle me prend dans ses bras puis elle embrasse Antone qui semble retrouver le sourire à ce contact. Antone adore Emeline, moi aussi d'ailleurs. Elle est le symbole de la joie de vivre, parfois tout mon contraire. Quand je n'allais pas bien, je passais beaucoup de temps avec elle quand elle ne travaillait pas pour aspirer un peu de sa joie. Bien sûr, il y avait aussi Yann à la maison, mais il semblait plus touché par ma situation.
— Je peux vous servir quoi à boire ? Nous demande-t-elle.
— Un coca ! s'agite Antone.
— Non, un jus d'orange pour lui.
— Maman !
Il croise les bras et se met à bouder. La main d'Emeline rencontre mon bras pour me dire que ça va aller. Les mains de mon frère se posent sur mes épaules et il me force à un contact avec lui.
— Pour une fois Jeni. Promis, on ne dit rien à Raphaël.
Je ris et j'accepte qu'on lui donne un coca. D'ailleurs, j'opte pour la même chose. Je n'ai pas envie de boire de l'alcool ce soir. Je sens que le stress joue sur mon état de fatigue et l'alcool n'arrangerait pas mon cas. On s'assoit autour de la table, avec nos boissons respectives. Antone fait le fier avec son verre de soda. Je souris à le voir heureux.
— Tu as encore une galère avec ton album ? Me demande Emeline.
— Ne m'en parle pas. La photo de couverture ne plaît plus au photographe. Je n'ai pas tout compris. Moi elle me plaisait, elle plaisait aussi à Raphaël donc ça m'allait.
— Et dire qu'il y a un temps, avant l'arrivée de monsieur, c'était moi qui avais le droit aux avants-premières, se plaint Yann.
— Je sais. J'aurais pu continuer, mais déjà je n'ai normalement pas le droit de le montrer à Raphaël, surtout de la façon dont je le fais...
— Attends Jen, tu fais ce que tu veux et ce que tu peux, reprend Emeline. C'est normal de vouloir mettre ton mari dans la confidence de cet album. Surtout après tout ce qu'il a fait pour toi.
Le souvenir de 2017 me revient à l'esprit et je frissonne. Je relève la tête, j'espère que personne ne m'a vu frissonner avec autant de force. Je hais cette année. Je hais mon état d'esprit de ce moment. Je déteste les sacrifices que j'ai fais faire à ma famille à cette période. Me voyant si mal, Raphaël avait tout fait pour ne pas être renvoyé en mission, quitte à avoir des problèmes avec ses supérieurs. Il ne m'en a jamais parlé, mais je ne suis pas dupe, il a eu des problèmes par ma faute. Mais il était là, pour moi, pour Antone. Il a été fort pour nous deux. D'accord, c'est ce que doit être un mari, mais il m'a tant porté. Je lui dois tellement. Alors oui, oui je voulais le mettre dans la confidence de cette nouvelle page, qui est en partie grâce à lui et surtout pour lui.
— C'est vrai, répondis-je honteusement.
— De toute façon, c'est du passé ! Continue Yann. Tu vas refaire la photo de ton album, tu vas régler le problème avec ce photographe et tu ne le reprendras pas par la suite.
— Ça c'est sûr. Je ne veux plus travailler avec lui.
— D'ailleurs, s'aventure Emeline. Comment va Raphaël ?
Je pose un regard sur Antone qui vient de finir son verre de soda. Mon regard sur lui le fait lever la tête vers moi et je lui souris. Je n'aime pas parler de son père quand il est là, j'ai l'habitude de craquer, du moins, j'ai la voix cassée et je ne veux pas qu'Antone entende ça, ni ne me vois dans cet état.
— Dis-moi champion, tu n'avais pas fait un dessin chez tonton la dernière fois que tu avais oublié de me montrer.
— Si, attends je vais te le chercher maman !
Antone s'en va au courant et je souffle.
— Raphaël va bien, mais je sens que ça lui tarde de rentrer. Il est fatigué, même s'il ne veut pas me le montrer.
— Ça commence à faire long, non ? Demande Emeline. Je perds la notion du temps.
— Et il se fait vieux, rit Yann.
Je regarde mon frère et le fusille du regard. Merci de ne pas manquer de respect envers mon mari. Je sais que Yann dit ça pour rire, mais j'ai horreur qu'on rigole de l'âge de Raphaël, de son métier, de lui tout court.
— Ça fait déjà six mois. Il en a encore pour trois mois. Je pense que c'est sa dernière mission comme ça.
— Ah bon ?
— Oui. Enfin, moi j'aimerais que ce soit sa dernière mission à l'étranger. C'est peut-être égoïste, mais j'en ai marre de le voir partir comme ça pendant des mois. Antone n'en peut plus non plus. S'il restait en France, on aurait plus besoin de vous demander de garder Antone presque toutes les semaines.
— Arrête sœurette, tu sais qu'on adore Antone.
Emeline regarde Yann. On ressent tout son amour pour mon frère. J'aime tellement ça. Après des années à galérer à trouver la bonne personne, je crois qu'aujourd'hui, elle se tient sur sa droite. Emeline attrape la main de son amoureux et son pouce caresse le dos de celle-ci. Est-ce que je suis jalouse de ce contact ? Les mains de Raphaël me manquent tellement. Lui aussi a l'habitude d'être doux et tactile avec moi.
— On aurait envie d'avoir un enfant, m'avoue Emeline.
— C'est vrai ? Ce serait génial ! Qu'est-ce que vous attendez ?
— Un peu de tranquillité, lance Yann.
Puisque mon visage se ferme, il reprend.
— Je rigole ! Dis donc, arrête de prendre tout mal ce soir Jeni.
— Désolée. Je suis un peu sur les nerfs.
— On y réfléchit encore, ce n'est pas anodin de faire un enfant.
— Mais si vous en avez envie, foncez ! C'est génial d'avoir un enfant. Malgré ma situation avec Raph, je crois que Antone est ma meilleure décision.
— Et ça se voit.
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Derrière les Soleils (JENIFER FANFICTION)
FanfictionAprès le flop de son dernier album sortit en 2016, ainsi qu'une tournée arrêtée suite à un accident, Jenifer souhaite repartir de zéro avec un nouvel album en cette fin d'année 2018. Nouvelle Page sera le nom de son nouvel opus. Mais la sortie d'un...