EPILOGUE

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JENIFER,

8 mars 2019,

Mais quel bonheur. A Ajaccio en plus.

Je connaissais l'effet thérapeutique qu'a la scène sur moi, mais je crois que je l'avais oublié. Je suis tellement bien ici, avec mon public, avec les gens qui m'aiment.

Tout n'est pas parfait, je le sens. J'ai voulu tenter des trucs, faire la conne sur scène, je me suis vite ravisée quand j'ai été essoufflée au bout de deux chansons. Je me suis calmée et depuis, c'est plus tranquille. Le concert va bientôt toucher à sa fin et comme un enfant dans un rayon de jouet, j'ai envie de faire un caprice, de me rouler par terre pour qu'on ne m'enlève pas de cette scène. C'est ici que je suis le mieux, lorsque je ne suis pas avec mon mari et mon garçon. D'ailleurs, ils sont là. Ils m'ont suivi. Antone a été le plus heureux de ne plus aller à l'école. La maîtresse nous a jugé quand on lui a dit qu'il ne viendrait plus à l'école. Mais dans notre nouvelle ville, ils ont accepté qu'il redouble.

Tout va pour le mieux. C'est fou. Je vais bien. Je ne pensais pas qu'un jour j'allais me sentir aussi bien. J'ai la tête hors de l'eau, c'est sûr. Pour en revenir au concert, puisque ça fait plus d'une heure que je chante, je sens que j'ai mal à la gorge, mais je force. Je force alors que je ne devrais pas. Je pourrais couper court au concert pour me préserver, mais il me reste deux chansons. Avant de les commencer, je choisis de présenter mes musiciennes.

— Wouah ! Ça fait du bien d'être ici, de commencer par la plus belle ville du monde. Désolée. C'est fou, c'est complètement fou.

Ma main passe dans mes cheveux et je me décoiffe légèrement. C'est le cadet de mes soucis.

— L'aventure Nouvelle Page a commencé il y a presque un an, par des premiers mots vers mon mari, lui disant que je voulais chanter à nouveau. Il m'a regardé et m'a assuré que je pouvais chanter, qu'il y aurait toujours des gens pour m'écouter. Et il avait raison. Vous êtes là. Alors, j'ai repris le chemin du studio, avec mon équipe et nous avons produit Nouvelle Page. Ensuite...

Je me tourne vers l'arrière de la scène. Je sais qu'ils sont tous là, qu'ils me regardent et qu'ils m'écoutent. Antone me fait coucou et les larmes me montent aux yeux. Je reporte mon attention sur le public.

— Ensuite, Notre idylle a été plus que bien reçue. Puis l'album a fini par sortir.

D'un coup, tous les souvenirs de cette période me reviennent, les absences de Raph, son état de santé, mon garçon qui pleurait pour que je ne le quitte pas. Puis, les mots de Raphaël m'avouant pour Yann. Je sens une larme coulée sur ma joue et je l'essuie de suite.

— Il s'est passé énormément de choses depuis la sortie de l'album. Des choses qui n'ont pas forcément été drôles pour moi, pour ma famille. Mais on a tenu.

Je me retourne à nouveau vers mes amis et les hommes de ma vie.

— Ils m'ont tous tenu, porté vers le haut. Mieux enconre, ils ont cru en moi. Il y a eu une période où ça a dû être extrêmement dur de croire en moi. Je me souviens encore de certains mots, mais personne, personne ne m'a lâché. J'aimerais remercier Marc, mon producteur. Souvent là pour me remettre la vérité en place, n'oubliant pas de me dire que je suis humaine et que je n'ai pas de pouvoirs magiques. J'espère que tu es fier de moi, parce que ce concert, je l'ai fait. Et tous les autres, je les ferai, dans la même énergie. Maintenant, j'aimerais remercier Coralie. Mon amie. Tu sais à quel point je t'aime. Et je n'ai jamais pris le temps de te remercier pour tout ce que tu as fait pour moi. Tu auras beau dire que c'était normal, je ne pense pas que ce serait venu à tout le monde de faire ce que tu as fait pour moi. Je t'aime. Merci d'avoir fait attention à eux, merci du fond du cœur, de m'avoir toujours soutenu, d'être venu m'aider quand j'en avais besoin.

Ma voix s'enraille, pas à cause de l'émotion, mais à cause de mon souffle que je n'ai plus. J'ai tout débité, comme si je l'avais appris par cœur, alors que non, j'ai toujours sorti du cœur. Les mots sont passés de mon cœur à ma bouche, simplement. Je regarde intensément mon public, une nouvelle fois.

— Mais, parmi toutes les personnes qui ont cru en moi, qui m'ont aimé, il y en a deux qui ont eu un rôle particulier. Je ne parle que très rarement de ma famille, les magazines le font mieux que moi à ce qui paraît.

D'ailleurs, ma dérive n'a jamais été révélée. C'est drôle ça. Bref, j'en étais où ?

— Il y a deux personnes que j'aime plus que tout au monde, deux personnes qui m'ont toujours soutenu, malgré les épreuves. Il s'agit tout d'abord de mon mari. J'ai la chance qu'il soit là ce soir. Je sais donc que tu m'entends. Merci, d'avoir été l'homme que tu as été avec moi. Je sais que je ne t'ai pas mené la vie facile, surtout ces derniers mois. Je m'en veux terriblement, mais j'espère que toi aussi, tu es fier de moi. Je m'en sors et c'est grâce à toi. Mais aussi grâce à l'adorable petit garçon qu'on a tous les deux, que tu m'as offert. Mon bébé, je t'aime, du plus profond de mon cœur. Merci de m'avoir porté comme tu l'as fait.

Je me retourne et je vois Antone pleurer. Non, je ne veux pas le voir pleurer. Je refuse. Je quitte ma place et je vais le retrouver pour le prendre dans mes bras. Sans le micro, je lui chuchote :

— Ne pleure pas mon grand.

— Je t'aime maman.

— Je t'aime aussi. N'oublie jamais ça.

Je me redresse, me tourne vers Marc.

— Je suis crevée, je vais faire sauter les deux dernières chansons et mettre le rappel sur Notre idylle.

— D'accord, préviens les filles.

Je caresse le visage de mon fils et je retourne sur scène. Je dis mon choix aux filles et on commence l'instrumental de mon rappel. Je commence à chanter les paroles, le public les reprend avec moi. J'enlève mon oreillette pour mieux les entendre. J'aime partager ces moments avec eux. Vers la fin de la chanson, je ne sais pas pourquoi, mais d'instinct, je me retourne vers le fond de la scène et je vois mon petit garçon danser comme il le faisait dans notre maison, en remuant des fesses. Je n'arrive pas à me retenir de rire et je décide de ne plus le regarder pour essayer de me reprendre. Il faut que je me reprenne. Je crois que je ne suis pas prête à danser comme lui. En tout cas, pas ce soir. La chanson se termine et je remercie tout le monde d'être venu me voir.

Il faut que je quitte la scène, même si je n'en ai pas forcément envie. Mais je dois être honnête avec moi-même, je n'ai plus de voix, on dirait que j'ai fumé trois paquets de cigarettes en deux heures. J'ai une folle envie de tousser pour débloquer un peu mes poumons et ma gorge et je ne peux pas le faire devant les gens. Je pars finalement de la scène. On enlève mon équipement, je récupère une bouteille d'eau et je me mets à tousser. J'espère que les gens n'entendent pas ça.

— Chérie, ça va ?

Laisse-moi tousser Raph. J'irai mieux après. Je tousse une dernière fois avant de me reprendre et de me redresser.

— Ça va. J'avais une envie de tousser, c'était fou. Mais je ne pouvais pas faire ça devant les gens.

— C'est vrai, ça leur aurait fait peur.

— Imagine un jour je fais ça je meurs, je ne veux pas mourir sur scène.

Il se met à rire et vient me prendre dans ses bras. Ses lèvres embrassent mon front.

— Je suis extrêmement fier de toi Jen, de ton parcours, de la femme que tu es aujourd'hui, de la chanteuse aussi. Je sais tout ce que tu as traversé, mais quelques fois, la roue tourne et tu as aussi le droit au bonheur. Je t'aime.

Mon bonheur, c'est lui. Lui et Antone. D'ailleurs, mon garçon nous rejoint, accompagné de Coralie et de Marc. Je les prends tous dans mes bras, ils me félicitent. Je suis tellement heureuse, je suis là, vivante, entourée des gens que j'aime. Ils sont aussi heureux, je le crois. Mon mari est à la maison, près de moi et non plus à l'autre bout de la terre sous les armes des autres. Mon fils est là aussi, avec moi, avec son père et il est loin des prédateurs qui lui feront du mal. De toute manière, je ne laisse plus personne touché à mon fils.



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FIN.

Merci à tous d'avoir lu ♥

Derrière les Soleils (JENIFER FANFICTION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant