(Perte de) Contrôle

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- Va-t'en Granger, murmurai-je en ouvrant finalement les yeux, posant sur elle un regard aussi dur et contrôlé que possible.

Aussi dur et contrôlé que possible alors que je pouvais sentir la chaleur de ses mains reposant sur mon poitrail, le caressant très, très lentement. Aussi dur et contrôlé que possible alors qu'il rencontrait le regard le plus enivrant qu'il me semblait exister. Aussi dur et contrôlé que possible alors que la seule chose que je désirai était de la prendre là, ici, tout de suite. Aussi dur et contrôlé que possible alors que ses cheveux toujours humides décoraient son visage et ses épaules, tombant dans son dos en une cascade splendide. Aussi dur et contrôlé que possible alors qu'elle avait le courage et le culot de demeurer là, sa peau sur mon corps, alors que je lui ordonnai de partir loin de moi.

- Je n'en ai pas envie, chuchota-t-elle à mes lèvres.

Ses mains remontèrent doucement vers ma nuque, où je sentis sa peau contre la mienne, et mes pensées cessèrent en même temps que ma respiration. Je saisi ses joues d'une main ferme et laissai ma main gauche reposer contre la porte de ma salle commune, à quelques millimètres seulement de son visage. Mon mouvement brusque la surprit et ses mains quittèrent mon corps, le sac qu'elle portait à l'épaule contenant les livres avec lesquels elle était venue tombant sur le sol dans un bruit sourd. Désormais le seul son qui demeurait autour de nous était celui de ma respiration profonde s'écrasant sur son visage alors que je collai mon front au sien, mes yeux fermement clos, ma main tenant toujours ses joues en une prise possessive.

- Qu'est-ce que tu me fais..., chuchotai-je à son visage alors que je ne la lâchai pas, tentant aussi violemment que je le pouvais de me contrôler.

De contrôler le feu ardent qui brûlait à l'intérieur de moi pour elle. Du feu qu'elle faisait brûler en moi en me regardant, en me parlant, en me touchant. De ce feu indomptable que je devais contrôler. Et elle était là. Et je sentais son odeur de vanille. Et je fuyais ses yeux, mais je sentais leur chaleur sur moi. Et je sentais la douceur de la peau de ses joues contre ma main. Son front contre le mien. Ses lèvres à quelques millimètres seulement des miennes.

- Putain Granger..., murmurai-je en gardant mes yeux aussi fermés que je le pouvais.

Mon cœur battait la chamade dans mon poitrail et mon sang bouillonnait dans mes veines. Elle me rendait fou. Mon esprit fusait à mille à l'heure alors que je me concentrai pour inspirer et expirer profondément tandis que mon souffle chaud s'écrasait contre son visage, et que je sentais le sien sur le mien. Son corps si près du mien, m'appelant. Me suppliant de la toucher. De me noyer en elle. De m'abandonner à elle. Ma respiration se mit à trembler de façon audible alors que mon poitrail se levait visiblement pour m'empêcher de la toucher. De l'embrasser. De la posséder.

- Qu'est-ce que tu es en train de me faire..., lâchai-je difficilement alors que ma voix elle-même commençait à trembler tandis que je me battais contre moi-même pour ne pas lui céder.

Parce que sa vie en dépendait. Parce que mon meilleur ami était toujours absolument incapable de la cacher dans son esprit. Parce que si le Seigneur des Ténèbres apprenait qui elle était, elle était condamnée. Parce que je la désirai à ce point. Parce que je la voulais à ce point. Parce que j'avais besoin de son contact, d'une façon aussi viscérale et animale que cela. Parce que j'étais un animal avec elle.

- Qu'est-ce que tu es en train de faire de moi..., chuchotai-je à bout.

Ma prise sur ses joues se resserra alors que je contrôlais autant que je le pouvais les pulsions que je pouvais sentir physiquement dans mon corps. Comme si mon corps tout entier, indépendamment de moi, devait la toucher. Comme s'il devait prendre possession d'elle. Cela me dépassait absolument et totalement. Je gardais toujours mes yeux profondément fermés et prit une dernière inspiration. Le prix était trop haut. Sa vie. Sa vie était le prix. Son cœur que je pouvais entendre battre. Son odeur qui s'éteindrait. La chaleur de son corps qui disparaîtrait. Le prix était trop élevé. Beaucoup trop élevé. Je lâchai soudainement son visage et lui tournai le dos avant d'ouvrir les yeux. Je ne pouvais la regarder, je serais absolument incapable de me contrôler si je posais les yeux sur elle. Je marchais vivement vers les escaliers menant à mon dortoir et la sommai une fois que j'étais sûr d'être assez loin d'elle, disparaissant moi-même :

DollhouseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant