Un secret inavouable

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Contrairement à ses habitudes, Hicham n'attendit pas de dîner avant de rendre visite à Amina. Occupé à prendre soin de Victoria, soucieux de régler les derniers détails de son mariage blanc, puis préférant laisser le champ à Djalal pour profiter de sa sœur, il n'avait pas vraiment eu le temps de satisfaire son désir de discuter enfin avec la princesse après de longs mois de mutisme.

Dès qu'il mit un pied dans la chambre d'Amina, le souverain sentit un douloureux pincement au cœur. Nostalgique et mélancolique, il posa ses regards sur la porte de la cellule de Victoria. Sa captive n'était plus là. Il avait lui-même ordonné de l'envoyer ailleurs. Il ne s'attendait pas à ressentir cet énorme vide en entrant dans le lieu où, même sans la voir, il se réjouissait de la savoir près de lui.

Avec une affligeante amertume, Hicham se demandait ce qu'il en serait de sa vie quand Victoria retournera chez elle, auprès de son fiancé. La jeune femme était à quelques pas seulement des appartements d'Amina, et elle lui manquait terriblement. Le souverain appréhendait désormais son départ à des milliers de kilomètres de terres, de mers et d'océan.

Mais alors qu'il regrettait sa décision d'éloigner Victoria de lui, Hicham se rendit compte qu'il oubliait totalement la pauvre Amina.

Écoeuré de privilégier la meurtrière de son frère à la fiancée meurtrie de ce dernier, le sultan se dépêcha de chasser Victoria de ses pensées. Il s'assit auprès de la princesse, puis, avec une chaleureuse affection, il lui tint la main en passant ses regards sur son visage ravagé par le chagrin.

— Douce et tendre, Amina, pardonne-moi pour ne pas avoir pris le temps de communiquer avec toi plus tôt. Malgré ma joie, j'ai pensé laisser à Djalal le plaisir de profiter de toi maintenant que tu en en mesure d'interagir avec nous. J'ai tant prié Allah pour que tu t'en sortes. Et je ne suis pas le seul à le faire. Tous les Azimites prient pour toi. Ma joie est indescriptible en découvrant que nos prières à tous ont été entendues. Je suis fier de toi, Amina. Fier du combat que tu mènes pour t'en sortir et pour nous revenir des abysses du deuil qui t'ont tenue loin de nous. Oh Amina ! J'ai si besoin de toi ! Dis-moi que tu nous reviendras ! Je t'en prie ! Fais-moi signe que tu te battras pour te réveiller. Fais-moi signe et rassure moi. Fais-moi savoir que tu luttes désormais pour briser la rigidité de ton corps !

La princesse bougea ses doigts pour assurer à Hicham qu'elle était, effectivement, en train de se battre pour vaincre ce mal qui avait possédé son corps de son esprit.

Ému par le premier échange qu'il eût avec la jeune femme depuis l'accident, Hicham se pencha vers l'alitée pour déposer un long baiser sur son front, puis il la regarda droit dans les yeux en lui serrant les doigts.

— Tu as toujours su ce qui se passait autours de toi, n'est-ce pas ? Lui demanda-t-il avant d'ajouter en obtenant sa confirmation. Tu sais donc ce que j'ai fait, Amina.

Une fois de plus, la princesse lui répondit en exerçant une longue pression sur ses doigts.

— Serais-tu prête à me pardonner ce que je t'ai fait, Amina ?

Au grand dam de Hicham, cette fois-ci, les doigts de la princesse s'ouvrirent et lui lâchèrent la main.
Avec des yeux bien écarquillés et prêts à exploser en larmes, le sultan fixa ce non silencieux et pétrifié en sentant que toute son existence s'engouffrait dans un nouveau cauchemar.

— Non ! Non, Amina ! Insista-t-il en lui tenant la main avec ses doigts tremblants. Je n'avais pas le choix ! Tu dois le savoir ! Tu dois être sûre de cela ! Je n'avais pas un autre choix que d'agir de la sorte ! Amina...dis-moi que tu comprends mes motivations ! Par pitié ! Ne me fais pas ça ! Dis-moi que tu comprends que j'étais forcé de le faire !

La sultane du désertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant