La sultane du désert

Une sultane en colère

Après une interminable réunion dans la résidence privée du roi Marocain, et un long débat entre l'ami loyal d'Hicham, ses alliés les plus fidèles, ses ministres les plus dévoués, et les agents secrets et de renseignements les plus intelligents du Maroc et d'Azima, Victoria put enfin prendre la route pour se rendre au riad du souverain Azimite à Marrakech.

La jeune femme était exténuée. Elle portait encore sur ses épaules le poids des heures d'un long voyage, de négociations pesantes, d'un relooking stressant et d'une angoisse dévorante. Toutefois, maintenant qu'elle était redevenue Asma, et qu'elle avait entre les mains le plan du sauvetage d'Hicham, rien ne pouvait l'arrêter, rien ni personne n'était capable de la dissuader de commencer et de remporter son combat.

Sauver son homme était une folle obsession qui faisait taire les voix d'une raison affaiblie par la peur. Une hantise qui ignorait toutes les difficultés relevées par son esprit conscient et vif.

La situation était grave et critique. La mort guettait Hicham comme si son âme était son seul repas pour les jours à venir. Les ennemis ne se comptaient plus sur les bouts des doigts, il s'agissait désormais d'une armée, d'une force militaire envahissante, d'une milice prête à ravager tout un pays.

Victoria en était consciente. Elle n'était pas aveuglée par son amour, ni poussée par sa culpabilité à arborer son âme guerrière. La jeune femme avait tout simplement la certitude qu'Azima en sortira victorieuse, et que le peuple Azimite retrouvera son sultan.

Rien qu'en voyant de ses propres yeux l'amour, le dévouement et la fidélité éprouvés par les alliés d'Hicham, elle avait su que le bon sultan allait se rasseoir de nouveau sur son trône.

Quant à elle, peu lui importait si après sa bataille, Hicham ne serait pas en mesure de la reprendre, de lui faire une place dans sa vie, de la déclarer comme épouse et sultane légitime. Il sera en vie, c'était tout ce qui comptait pour elle.

— Il sera bientôt parmi nous. Déclara-t-elle en fixant la vitre du véhicule qui roulait à grande vitesse.

Assis à ses côtés, Walid la dévisageait avec une admiration qui frôlait la vénération.

Victoria avait déjà assombri ses cheveux châtains, caché la verdure de ses iris derrière des lentilles noires, donné à sa peau une teinte caramélisée, et orné son visage avec un maquillage oriental. La jeune femme avait même été Asma durant plusieurs jours. Elle avait déjà merveilleusement prouvé sa capacité à endosser le rôle d'une sultane. L'agent secret eut tout de même l'impression que c'était bien la première fois où l'avocate Victoria Harris avait totalement cédé la place à la sultane Asma Alami.

L'anglaise avait totalement disparu. Elle s'était délibérément laissée éclipser par l'esprit sauvage et guerrier d'une reine de désert. Elle était désormais Asma, la sultane et la salvatrice du peuple Azimite.

— Il en sera ainsi, votre altesse.

Victoria sourit puis se tourna vers Walid pour lui offrir cette dose de quiétude qui émanait de ses lèvres heureuses.

— En privé, je souhaite que tu continues de t'adresser à moi en ami, Walid. Parce qu'il s'agit de cela finalement. C'est une amitié qui affronte l'hostilité.

— C'est d'abord une question d'amour et de sacrifice, ma très chère Asma. Ni mon roi, ni le peuple d'Azima n'auraient pu faire quoi que ce soit sans toi. Tu as sacrifié ta vie pour sauver celle du sultan. Si les hommes ont été subjugués par votre sacrifice au point d'essayer de se montrer à la hauteur, Dieu ne peut que se pencher favorablement pour notre cause.

— C'est drôle, n'est-ce pas ? On ne partage pas la même confession, on a deux visions différentes de notre créateur, mais au final, on prie la même divinité pour obtenir la même chose. Ironisa Victoria avant d'aborder un sujet plus grave. Qu'en est-il de ma mort ?