Confusion

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L'image du bras levé du sultan ne quittait plus les pensées de Victoria. Recroquevillée sur elle-même, la jeune femme s'interrogeait sur ce coup qu'elle méritait probablement, du point de vue de son geôlier du moins, mais qui ne lui avait pas été assené finalement.

Durant une fraction de seconde, une puissante rage avait totalement pris possession du souverain. Sa main avait déployé ses doigts fumants d'éréthisme pour flageller sa joue, ou pire encore. La captive avait miraculeusement été épargnée grâce à une virginale affliction l'avait, in extremis, sauvée des griffes de l'esprit maléfique.

Entre regretter son incartade et redouter ses conséquences, Victoria était incapable de nommer ce sentiment qui lui crispait le cœur. Séparée de son fiancé, éloignée de sa famille d'adoption, privée de sa liberté, la jeune femme vivait déjà un véritable calvaire qui la consumait à petits feux. Ses chances de résister à un nouveau supplice s'avéraient minimes, et elle le savait.

— Austin, viens me chercher ! Je t'en prie ! Pleura-t-elle en plaquant sa tête contre ses genoux.

En entendant Oumi frapper à la porte de sa cellule, Victoria fut envahie par un enivrant apaisement. La connaissant mieux présentement, elle devinait son humeur rien qu'à sa façon de demander l'autorisation d'entrer.

Bien que calme et douce comme à son habitude, sa gardienne et bienfaitrice lui servit son déjeuner en manifestant une certaine rancune à travers son visage revêche.

Mal à l'aise, Victoria quitta son lit et s'approcha de la table en osant, à peine, croiser les regards fuyants de la vieille femme.

— Oumi, je ne voulais pas...

Même réjouie d'entendre la jeune femme s'adresser à elle, pour la toute première fois, avec son surnom, Zahra lui coupa la parole en opprimant son attendrissant bonheur.

— Il faut qu'on parle, miss Harris. Asseyez-vous, je vous en prie.

Victoria, le cœur battant, s'exécuta en silence. Oumi prit le siège en face sans la lâcher des yeux.

— Indigne ! Vous avez osé dire au sultan, à l'homme qui vous en veut à mourir, et qui tient votre destin entre ses mains, qu'il est indigne de régner !

— Je n'ai pas voulu l'insulter, je désirais juste lui soutirer des réponses ! Se défendit Victoria.

— Croyez-moi, miss Harris, les réponses que vous attendez risquent de plus vous noyer dans la culpabilité.

— Et pourquoi, je te prie ? Que me reproche-t-il en plus de la mort de son frère et l'état de la princesse ?

— Quand vous osez parler avec autant de dédain, je peine à me persuader que vous êtes le contraire du terrible portrait dressé de vous par le sultan. Souvent, vous me donnez, vous-même, la certitude que vous vous fichez du drame que vous avez causé. S'indigna Oumi en poussant sa chaise. J'aurais peut-être la force de vous parler plus tard, sinon, je vous conseille vivement de faire attention à ce que vous faites et dites.

— Ne me laisse-pas ! L'attrapa Victoria par les mains pour l'empêcher de s'en aller. Je t'en prie. Tu sais bien que je ne suis pas comme me décrit le sultan. Tu n'as jamais cessé de me répéter que je n'étais pas un monstre.

— Pourquoi alors autant de mépris, miss Harris ?

Attristée, Victoria libéra Oumi, puis recula vers sa chaîne avant de baisser la tête.

— Je ne le méprise pas, et c'est ça qui me tue. Avoua la jeune femme dans un profond sanglot. Je le déteste de tout mon cœur à cause de ce qu'il me fait subir, mais je suis incapable de le méjuger comme il se permet de le faire avec moi. Son crime à lui est celui de me séquestrer par pure vengeance. Mon crime à moi est celui d'avoir tué un homme et brisé la vie d'une femme par pure insouciance. Crois-tu que je puisse le mépriser alors que je me dédaigne moi-même ?

La sultane du désertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant