Chapitre 15

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Après cette nouvelle humiliation publique, je sors des vestiaires sans tomber sur Auguste. Les loups ne sont pas encore revenus du stade. Je devrais sans doute l'attendre pour lui présenter mes excuses pour ne pas l'avoir suivi pour le football, mais un coup d'œil à mon portable m'apprend que je risque d'être en retard à l'invitation du proviseur. Je me presse donc en direction du bureau de ce dernier.

— Entrez. 

Je pousse la porte. M. Marlin est installé sur une petite table ronde recouverte d'une nappe en dentelle pour l'occasion. Une théière fumante est posée devant lui, accompagnée de trois tasses en porcelaine assorties. Oui, trois, car Morgane est assise en face de lui ! Je n'aurais pas cru qu'elle accepterait le rendez-vous. En fait, j'ignorais même qu'elle était invitée. Le proviseur est un homme courageux.

— Ah, Vivien, joignez-vous donc à nous. Le thé vient tout juste d'infuser.

Je m'avance vers la table ronde avec une impression d'irréel. Je me dis que la dernière fois que nous nous sommes retrouvés tous les trois dans la même pièce, c'était le jour où le proviseur a dû punir Morgane pour avoir tabassé Titania, et moi-même pour avoir quasiment révélé notre existence à l'humanité toute entière. Enfin, il ne m'a pas vraiment puni, en y réfléchissant bien. Il ne s'est même pas embêté à me sermonner. À croire que je suis aussi le chouchou de mon géniteur, comme je suis déjà celui de Maman.

Je prends place à côté de Morgane, face à l'un des murs. M. Marlin me sert aussi une tasse bien remplie. Je le remercie et y trempe les lèvres par politesse avant d'arrêter aussi sec. Le liquide est encore brûlant.

— Votre rentrée s'est-elle bien passée ? demande alors le proviseur dans le but manifeste de lancer une conversation.

Morgane ne répond pas tandis que je marmonne un vague "oui" peu convainquant. M. Marlin fait mine de me croire alors qu'il se doute bien que tous mes petits camarades me détestent à présent. Oh, et il est bien placé pour savoir que mon premier cours de magie ne s'est pas déroulé aussi bien que je l'espérais. Heureusement, il ne commence pas à évoquer ce sujet, ce qui aurait été encore plus embarrassant. Et je préfère ne même pas penser au dernier cours de sports.

— Et vous, Morgane, j'ai entendu dire que vous vouliez entrer dans l'équipe de relais ?

Ma jumelle fronce le nez.

— En effet.

— Pratiquez-vous également un sport, Vivien ?

Je secoue frénétiquement la tête.

— Non, monsieur.

Le proviseur cligne des yeux et paraît soudain presque hésitant.

— Eh bien, commence-t-il, je me suis dit que lorsque nous n'étions qu'entre nous, vous pourriez m'appeler...

Je me crispe. Pourvu qu'il ne sorte pas quelque chose comme "Papounet". Il est hors de question que j'appelle quelqu'un "Papounet".

—... Armand, conclut cependant M. Marlin.

J'en soupire presque de soulagement. Il faudrait que j'arrête d'essayer de deviner ce qu'il va dire, car je me plante à chaque fois.

Morgane sirote une gorgée de son thé, apparemment insensible à la chaleur.

— Non merci.

Le sourire du proviseur glisse un peu.

— Auriez-vous une autre proposition ?

— Oui. Ne pas vous appeler du tout, répond ma jumelle, toujours aussi glaciale.

Profitant d'un instant d'inattention de M. Marlin, je lui fais les gros yeux. D'accord, moi aussi je suis super mal à l'aise avec cette situation. Il n'empêche que ce n'est pas une raison pour se montrer aussi cruelle avec le pauvre proviseur qui, après tout, n'a jamais demandé à être notre géniteur. À ma connaissance, il n'a pas fait d'autre enfant. Il fait peut-être partie de ces gens qui refusent de mettre au monde des bébés qui contribueront à augmenter la pollution de la planète. Et là, paf, il a appris qu'il avait engendré non pas un pollueur, mais deux pour le prix d'un ! Quoique les fées soient très attachées à préserver la nature, mais vous suivez mon raisonnement.

Le lycée des Surnaturels (tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant