Le lycée des Surnaturels (tome 2)

Chapitre 20

Je cours dans les couloirs à toute allure, plus vite encore que le jour où je me suis retrouvé en retard à mon oral de magie féerique. Les personnes qui me croisent ne doivent voir de moi qu'une traînée de couleurs. Les murmures qu'elles ne doivent pas manquer d'échanger sur mon passage me sont imperceptibles tant les battements de mon cœur sont bruyants. 

Je trouve Morgane dans la petite salle de repos de l'infirmerie, allongée sur un lit, l'air crispé et de très mauvaise humeur. L'air est imprégné d'une odeur de désinfectant et d'herbes médicinales. 

Je me précipite à son chevet, tout échevelé, et me plante à côté d'une petite table en bois supportant une carafe d'eau en plastique et un verre de la même matière. 

— Qu'est-ce qui s'est passé ?! Qu'est-ce qui s'est passé ?!

Ma jumelle tourne lentement son regard vers moi sans rien dire. Je l'examine sous tous les angles, cherchant une quelconque blessure. Elle a toujours sa tête (le principal), ses deux jambes et ses deux bras, avec, dans les deux cas, une main au bout avec les doigts au complet. Je finis par remarquer que le haut de son uniforme de sport est relevé et qu'un bandage est enroulé autour de son torse, lui donnant une vague ressemblance avec une momie. Comme je ne sais pas trop quoi en conclure, j'attends une explication. 

— Je suis... tombée, finit par lâcher Morgane entre ses dents.

— Tombée ? je répète dans l'espoir d'obtenir des précisions.

Il y a beaucoup de façons différentes de tomber. On peut se prendre les pieds dans son lacet défaits ou chuter du haut d'une falaise, ce qui n'est quand même pas pareil, notamment en termes de conséquences.

Ma jumelle se met à regarder ailleurs, la mâchoire crispée. Les doigts de ses mains s'ouvrent et se ferment sur le drap blanc immaculé dont elle est couverte jusqu'à la taille. 

— Je volais et... et... il y a eu un coup de vent.

— Tu es tombée en volant ? je m'exclame, stupéfait.

Je me fais foudroyer du regard et recule instinctivement d'un pas.

— Je viens de te dire qu'il y a eu un coup de vent ! C'était d'ailleurs presque une mini tornade. J'ai été emportée sans rien pouvoir faire. Et... Et mon aile gauche a été perforée par une branche.

Je reste muet tandis que les yeux de ma jumelle se remplissent de larmes. D'abord incapable de m'exprimer, je m'approche à nouveau d'elle pour lui tapoter l'épaule.

— Je... je finis par bredouiller. Est-ce que c'est soignable ?

Elle hoche la tête en se tapotant les yeux avec un bout de son drap.

— L'infirmière fée a fait repousser une partie de la membrane. Elle a dit que le reste se reconstituerait tout seul si je laisse mes ailes en repos un certain temps.

La boule dans mon ventre diminue.

— Bon, tout va bien alors.

Elle lève les sourcils avec indignation.

— Tout va bien ?! J'ai une aile perforée ! Et si je n'arrivais plus jamais à voler ?

Je repose aussitôt une main rassurante sur son épaule.

— Ça n'arrivera pas si l'infirmière a dit que tu allais récupérer.

— Oui, mais et si cela me retardait de quelques millièmes de seconde et que cela me suffisait à ne pas gagner une course ?

— Tu seras aussi rapide qu'avant.

Elle me foudroie du regard.

— Qu'est-ce que tu en sais ? Tu es devenu médecin ? Je te rappelle que, il y a quelques semaines, tu étais persuadé tout à fait à tort d'être atteint d'une maladie mortelle !