Nous marchons pendant une bonne heure. Je garde les yeux rivés sur le lien qui, à mon grand soulagement, ne disparaît pas. Il continue à serpenter au beau milieu des rues animées de Paris, indifférent aux voitures et aux innombrables piétons qu'il traverse sans vergogne. Au fur et à mesure que j'avance, l'extrémité qui est reliée à moi paraît s'enfoncer encore davantage dans ma poitrine sans provoquer la moindre douleur.Je garde les yeux fixés sur le lien, fasciné. Je me demande si les loups âmes sœurs sont reliés par un système semblable. Mais sans doute leur relation est-elle plus naturelle que celle d'une fée et de son Envoûté.
Des passants ne cessent de me bousculer sans me prêter attention. Personne ne s'arrête pour crier quelque chose comme : "regardez ! C'est le garçon fée de la télévision ! Et il a un drôle de fil qui dépasse de la poitrine !". Heureusement, mon Envoûté ne disposait d'aucune photographie de moi.
Le fil de laine se dresse soudain presque à la verticale vers un bâtiment.
Je tends le doigt vers le haut.
— Le lien s'arrête là.
Titania se tord le cou pour mieux voir. Nous sommes face à un immeuble haussmannien pas très bien entretenu. Le point que je désigne est situé tout en haut, juste sous le toit.
— J'espère qu'il y a un ascenseur, commente la fée.
Il s'avère qu'il n'y en a pas et nous nous tapons cinq étages à pied avec un escalier en colimaçon. J'ai la tête qui tourne quand nous arrivons au sommet et je suis tout essoufflé.
— C'est le palier de droite, j'annonce, car c'est vers là que se dirige mon fil.
Il est devenu beaucoup plus tendu qu'avant, sans doute parce que nous touchons au but.
Titania pousse la porte sans même prendre la peine de frapper à la porte. Mon Envoûté ne craint apparemment pas les cambriolages, car le battant pivote en grinçant.
À l'intérieur, il fait plutôt sombre et mes yeux mettent un instant à s'habituer à la pénombre.
Une silhouette toute tassée est assise sur l'unique chaise de la pièce. Je reconnais la silhouette du serveur. Son visage se relève en entendant le bruit de la porte et il tourne les yeux vers moi. Ses cheveux ont poussé depuis la dernière fois et il ne paraît pas s'être rasé depuis un certain temps. Il bondit aussitôt sur ses pieds.
— Vivien, mon amour !
Ignorant Titania, il se jette sur moi, me pressant dans ses bras.
— Bonjour, je lui dis en essayant tant bien que mal de le repousser.
Titania vient me prêter main-forte en le tirant par le bras et, ensemble, nous parvenons à le poser sur son lit qui est l'un des seuls endroits où l'on puisse s'asseoir ici, à l'exception d'une chaise branlante installée devant un bureau. Ce faisant, nous écrasons des papiers répandus sur le sol.
Je jette un regard effaré tout autour de moi. Mon Envoûté vit dans un studio minuscule dont toutes les surfaces disponibles sont recouvertes de sortes de prospectus. J'en ouvre un par curiosité. C'est une jolie feuille cartonnée pliée en deux, décorée de motifs végétaux et sur laquelle il est écrit dans une graphie très aérienne : "Maxime Duprat et Vivien Guyonvarc'h ont la joie de vous inviter à partager le moment le plus spécial de leur vie. Dans la splendeur de leur romance et la magie de leurs sentiments, ils uniront leurs destins dans le sacrément du mariage et feront promesse d'un amour éternel. RSVP avant le 15 février".
— Qu'en penses-tu ? s'inquiète l'Envoûté.
Je reste les yeux fixés sur la feuille, consterné.
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Le lycée des Surnaturels (tome 2)
FantasyTome 2. La lecture préalable du tome 1 est indispensable. Après les événements de la Tour Eiffel, Vivien fait sa rentrée à l'Institut, plus stressé que jamais. Il doit faire face à ses actes en plus d'apprendre à contrôler ses nouveaux pouvoirs. Et...