Le lycée des Surnaturels (tome 2)

Chapitre 49

M. Marlin me laisse terminer mon histoire jusqu'au bout sans m'interrompre. J'entre dans tous les détails qui me paraissent nécessaires, ce qui prend un peu de temps. Je ne précise pas, néanmoins, pourquoi je croyais qu'Auguste voulait me rejoindre dans ma chambre. Je laisse simplement entendre que nous devions nous retrouver pour faire nos devoirs ensemble, ou toute autre activité studieuse et respectable. Le proviseur ne fait aucun commentaire à ce sujet.

J'essaie de ne pas penser au fait que je viens de trahir ma propre jumelle qui m'avait interdit d'en parler au proviseur. Mais, si j'ai appris quelque chose au cours de cette année scolaire, c'est qu'il est stupide de garder certains secrets. D'ailleurs, je ne le fais pas pour nuire à Morgane. Non, je cherche simplement à lui rendre service. Elle s'en rendra compte un jour, je suppose. Avec un peu de chance, d'ailleurs, elle ignorera que j'en ai parlé à notre géniteur. Je ne vais bien sûr pas aller le lui dire. Je ne suis pas cinglé.

— ... Et Auguste pense qu'elle pourrait - et donc que nous pourrions - avoir du sang de loup-garou dans les veines, je conclus.

Je ferme alors la bouche et observe M. Marlin d'un air interrogateur. Comme il ne dit toujours rien, je finis par lui demander :

— Euh... Que pensez-vous de tout cela ?

M. Marlin m'observe d'un air intéressé.

— Et vous-même, Vivien ?

Je me retiens de lever les yeux. C'est pour cela qu'il ne faut pas choisir son proviseur comme géniteur. Parce qu'il joue son rôle de professeur en toutes circonstances et vous pose des questions au lieu de vous dire ce que vous voulez entendre sans que vous ayez besoin de vous fouler.

— Je pense que c'est bizarre, je réponds cependant. Et qu'Auguste pourrait avoir raison. Sauf que les fées ne peuvent pas avoir d'enfant avec d'autres créatures surnaturelles et que donc ce n'est pas très logique. Sauf si... eh bien... sauf si ça vient éventuellement de votre côté ?

Je lui jette un coup d'œil timide, embarrassé de devoir poser une question aussi personnelle au proviseur de mon lycée, même s'il est mon géniteur.

M. Marlin n'en paraît heureusement pas offensé. Il s'assied sur le bord de son bureau et prend un air songeur.

— Je relève d'une famille de magiciens sur plus de dix générations, avoue-t-il. Mais mon père était effectivement un loup-garou.

Je sursaute.

— Ah ?

Les loups-garous préfèrent généralement se marier entre eux, comme toutes les créatures surnaturelles, à l'exception des fées qui ne peuvent pas le faire.

Le proviseur prend une pause théâtrale, sa main soutenant sa tête tandis que son regard se perd dans le vague.

— Mon père reste très discret sur sa condition. Il a été exclu de sa meute pour avoir épousé une humaine. Même si cette humaine était une magicienne. Ils s'étaient rencontrés à l'Institut. Comme votre Maman et moi-même !

Je pince les lèvres et émets un vague son qui ne veut dire ni oui ni non.

— Pour ma part, je n'ai jamais manifesté la moindre capacité lupine, reprend M. Marlin. Mes sœurs non plus. Je suppose cependant que les gènes lupins ont pu sauter une génération et arriver jusqu'à Morgane. Et peut-être jusqu'à vous ? Vous pourriez être capable de vous transformer, qui sait ?

Je secoue frénétiquement la tête.

— Non.

— Comment pouvez-vous en être sûr ?