Chapitre 69

807 145 60
                                    


Je ferme les yeux, terrifié. Ça y est, ma dernière heure est venue ! Dire que je n'ai même pas pu dire au revoir correctement à mon petit ami ! Et Maman ? Elle sera dévastée, puisque je suis apparemment son enfant préféré !

Une fourrure effleure ma joue. Je me tends en attente de la douleur. Qui ne vient pas. Un nouveau grognement suivi d'un couinement plaintif se font entendre.

Étonné, je rouvre un œil. Je comprends alors pourquoi Lisa ne m'a pas encore trucidé : un autre loup légèrement plus grand s'est placé entre elle et moi.

J'ai un moment de flou avant de reconnaître la couleur du poil de l'autre animal : c'est Morgane !

Ma jumelle ne m'accorde aucune attention, trop occupée à grogner le plus férocement possible sur la louve qui nous fait face. Lisa la toise avec méfiance sans paraître plus effrayée que cela.

Auguste avait déterminé que Morgane était une bêta, ce qui fait d'elle, théoriquement, une meilleure combattante que Lisa. Mais ma jumelle se transforme seulement pour la deuxième fois, à ma connaissance, et paraît avoir déjà du mal à avancer sans s'emmêler les pattes. Elle se serait sans doute mieux débrouillée en gardant sa forme humaine, si vous voulez mon avis. Enfin, je ne vais pas me plaindre de son aide.

Lisa claque sa mâchoire, comme pour inviter Morgane à dégager. Ma soeur répond en exhibant toutes ses dents. Je suppose qu'il s'agit d'une forme de provocation, chez les garous, car les deux louves se jettent alors l'une sur elles. Dressées sur leurs pattes arrière, elles s'agrippent par leurs pattes avant comme des sortes de catcheuses tandis qu'elles essaient mutuellement de se donner des coups de dents.

Terrifié, je me mords la lèvre et sens un léger goût de sang envahir ma bouche. Et si Morgane était blessée à cause de moi ? Je dois l'aider !

J'essaie une énième fois de faire venir à moi mes pouvoirs. J'échoue tout aussi lamentablement à faire sortir mes ailes. En désespoir de cause, je ramasse une pomme de pin sur le sol que je lance de toutes mes forces.

Ping ! Le projectile atteint l'arrière-train de Lisa. À défaut de lui faire mal, cela la surprend suffisamment pour qu'elle tourne la tête pour déterminer qui la titille ainsi. Morgane en profite pour prendre l'avantage et se jette à nouveau sur la louve avec un peu trop d'enthousiasme. Poussées par cet élan, les deux filles roulent sur le sol et atterrissent dans le lac dans un grand bruit d'éclaboussures.

— Morgane !

Je me précipite vers le bassin au moment où la tête de ma jumelle émerge de l'eau. La louve pose ses pattes sur le bord et essaie de se hisser, gênée par le poids de sa fourrure trempée. Je l'attrape par ce qui lui sert de hanches pour l'aider à sortir. C'est qu'elle est lourde, sous cette forme !

Lisa effectue la même manœuvre du côté opposé du bassin. Elle me jette un dernier regard haineux avant de tourner les talons et de filer à toute allure en direction de la forêt. Apparemment, elle nous considère comme des adversaires trop coriaces pour elle.

Morgane reste à côté de moi en grognant plus doucement, les oreilles rabattues vers l'arrière. J'ai l'impression qu'elle est très satisfaite d'elle-même. Puis elle s'ébroue et envoie des gouttes dans tous les sens. Je pousse un couinement de protestation. La louve paraît se marrer et s'éloigne de quelques pas.

Je m'essuie le visage. Mes bras tremblent toujours. J'ai du mal à retrouver un rythme cardiaque ordinaire.

Je sens mes ailes s'agiter dans mon dos. J'ai l'impression qu'elles culpabilisent de m'avoir laissé tout seul à un moment où j'aurais eu besoin d'elles.

"Oui", je les gronde. "Je ne suis pas fier du tout de vous".

Elles se rétractent encore plus dans mon dos, ce qui provoque en moi une vague mauvaise conscience. Je me montre peut-être trop sévère. Il est vrai que je les ai beaucoup sollicitées tout à l'heure lors de mon propre combat contre Estelle.

Le lycée des Surnaturels (tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant