Chapitre 35 : Réveils similaires, nuits différentes

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Au petit matin, alors que de très faibles lueurs traversaient les volets, Soïli ressentit un touché un peu distrait jouer dans les boucles de sa nuque. Il entrouvrit à peine les yeux, sa joue pressée contre un bras de Günther et son souffle capturé dans sa poitrine. Il avait tout juste assez chaud malgré son corps nu et la fraîcheur qui flottait dans l'air, on l'embrassait étroitement et ses muscles n'avaient pas encore refroidit de ses crispations passées. Alors rien ne pouvait l'avoir réveillé, à part ce touché.

   — Arrête, ne s'entendit-il même pas marmonner.

Sondheim souffla un rire et orienta le mouvement de ses doigts vers son front qu'il découvrit le temps de poser tendrement ses lèvres dessus.

   — Je dois partir, trésor.

   — Pars alors, répondit Soïli en se blottissant plus étroitement encore.

Sondheim aurait pu le taquiner en retorquant un "vas-tu me laisser le faire ?", afin de couper court à l'arrogance du garçon ; et pourtant, il n'en fit rien.

Plusieurs heures plus tard, Soïli se réveilla enfin pour de vrai et remarqua qu'il était toujours enveloppé de cette chaleur réconfortante. Cependant, à la différence de la précédente, celle-ci était artificielle : les bras avaient été remplacé par des oreillers et l'aura de Sondheim par un vide déprimant. Il se redressa donc, cette même sensation d'inconfort dans le bas du dos, cette odeur si caractéristique du sénior encore sur sa peau et ses cheveux dans un état pas possible.

En se glissant hors des draps, il enfila le premier bas que son pied foula, et se traîna jusqu'à la cuisine où il s'écroula sur une chaise haute. Sur le bar se tenait un petit-déjeuner typiquement écossais : bacon, œuf brouillés, toasts à la marmelade, thé noir ainsi que quelques quartiers de pommes disposés dans une assiette.

Durant les quelques jours qui suivirent, Soïli se plongea dans des livres éducatifs, se donnant pour objectif d'y consacrer une à deux heures par jour (ce qui était déjà beaucoup pour lui qui avait complètement abandonné ses études depuis bientôt six ans). D'abord, il avait tenté de comprendre certains chapitres élémentaires de mathématiques, puis il s'était lassé et s'était orienté vers l'histoire, la géographie puis la biologie. Mais le résultat demeurant le même, il avait fini par ne plus rien apprendre du tout.

Cependant, un jour, par pur hasard, alors qu'il cherchait une nouvelle lecture de plaisir pour passer sa soirée, il était tombé sur un ouvrage de Dostoïevski dans sa langue originelle. Ses pensées le ramenèrent à sa dernière nuit à Wilson et il se souvint des lettres de Günther, entassées sur son bureau. Ainsi, le Russe fut la seule matière qu'il s'évertua à apprendre. Il commença d'abord par l'alphabet, puis, lorsqu'il ne confondit plus les lettres entre-elles, il se tourna vers quelques mots et phrases simples, qu'il tentait de prononcer et de reconnaître dans certains livres.

Il essayait de se persuader que Günther n'avait aucune espèce d'emprise sur ses décisions, même futur, mais force était de constater qu'il s'était retrouvé au cœur de ses occupations totalement volontaires. Au point de le faire même soupirer d'agacement le soir où, enfin, Artième était disponible pour qu'ils pûrent faire le tour des salles de concerts "invisibles".

Le garçon s'était donc préparé en fin de soirée, alors que la lune commençait déjà à monter dans le ciel, s'était vêtu et coiffé avec le même détachement que pour ses sorties au club. En rejoignant Artième à quelques rues de l'appartement, il réalisa que son cœur ne s'affolait pas, que ses pensées restaient clairs et qu'aucune réelle hâte ne le prenait aux tripes. C'était comme si... comme si il se fichait de ce qu'il pourrait bien trouver ou non au cours de sa quête.

Artième, s'étant affirmé comme meilleur connaisseur de la ville, répartit les adresses en prenant soin de laisser celles qui arrangeait Soïli d'avantage (géographiquement parlant). Ils se separèrent donc après s'être salué brièvement, et le plus jeune s'aventura dans les rues selon le plan qu'on lui avait donné.

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