Silent after the storm

006.

꧁• Chapitres 6 •꧂

𝗣𝗿𝗲́𝘀𝗲𝗻𝘁.
8 𝗮𝗻𝘀 après la tragédie.
𝘚𝘵𝘰𝘳𝘮𝘪 𝘚𝘵. 𝘍𝘳𝘢𝘯𝘤𝘪𝘴.

—   On a une nouvelle importante à vous dire, qui pourrait éventuellement affecter votre poste, nous dit Todd, le superviseur du club. Il est rarement là, alors je me dis que s'il a fait l'effort de se déplacer, c'est que c'est important. Le club est en train d'être racheté par un nouvel investisseur. Cette acquisition implique que le club aura bientôt un nouveau propriétaire, ajoute t-il, causant des regards confus de notre part. Ce changement de propriétaire pourrait entraîner des réorganisations au sein du club, y compris au niveau des postes et des responsabilités.

—   Ça veut dire quoi ça ? Lance un des barmans.

—    Est-ce qu'on risque de perdre notre boulot ? Demande quelqu'un d'autre, inquiet.

Todd souffle, visiblement aussi incertain que nous.

—   Honnêtement, je n'ai pas beaucoup plus d'informations pour l'instant, dit-il en se passant une main sur le front. Le nouvel investisseur veut probablement apporter des changements, mais je ne sais pas encore lesquels.

—   Des changements ? Je dis.

—   Si j'en crois la direction, les acheteurs veulent agrandir le club de plusieurs hectares, répond Todd.

—   Donc le club va devoir fermer un certain temps pour faciliter les travaux, c'est ça que t'essaies de nous dire ? Dit Fallon, une autre danseuse.

—   Quoi ? S'exclame un autre employé.

—   Pour l'instant, je ne peux rien confirmer, répond Todd. Mais c'est possible qu'il y ait des interruptions temporaires. Dès que j'aurai plus de détails, je vous les communiquerai. Essayons de rester calmes et de continuer notre travail en attendant plus d'informations.

—    On pourrait au moins avoir une idée ? Intervient Marie, la responsable des serveurs. On doit se préparer à quoi et pour quand ?

— Tout ce que je sais, c'est que les discussions avancent rapidement, répond Todd. On devrait avoir plus de détails dans les prochaines semaines. Entre-temps, je vous tiendrai informés dès que j'en saurai plus.

Je secoue la tête, dépassée par cette nouvelle. Donc
si je comprends bien, on doit s'attendre à être sans emploie dans quelques temps. Génial !

Peu à peu, nous rejoignons tous les vestiaires afin de nous préparer à l'ouverture du club.

ੈ✩‧₊˚

Je tourne autour de la barre au rythme de la musique, de la manière la plus sensuelle possible, balançant mes hanches de gauche à droite avec une grâce étudiée. J'accroche ma jambe au pôle tandis que je renverse ma tête en arrière, laissant mes mains glisser sur mon corps presque dénudé. Ce soir, le club est plein à craquer. À vue d'œil, je dois avoir 3k, ce qui est plutôt pas mal pour un début de soirée. Alors, je continue mes enchaînements endiablés, attirant le regard de nombreux hommes sur moi.

Certains me regardent de loin, savourant le spectacle ; d'autres n'hésitent pas à prendre les meilleures places assises face au podium pour une vue imprenable, tandis que d'autres encore se tiennent debout juste devant, acclamant les danseuses. Les lumières tamisées créent une ambiance intime et envoûtante, tandis que la musique lourde et rythmée vibre à travers la salle, amplifiant chaque mouvement de mon corps.

J'apprécie de moins en moins de danser, mais je me fais violence pour donner la meilleure performance possible, histoire ne pas me faire remplacer par une autre fille et me faire renvoyer. Parce que c'est comme ça ici : on te dégage si tu n'apportes rien. Alors tous les soirs, je me donne à fond, malgré l'épuisement et la lassitude. Et puis au delà de ça, j'ai l'impression de ne pas avoir vraiment le choix : j'ai pas de diplôme, un niveau d'étude à peine suffisant, de l'expérience professionnelle proche du néant à et aucune passion.

Un groupe d'hommes en costumes, probablement des hommes d'affaires, s'approche du podium. Leurs yeux brillent de désir et d'avidité, et je sais que ce sont des cibles parfaites. Je leur adresse un sourire séducteur et intensifie mes mouvements, sachant que cela les encouragera à dépenser encore plus.

Heure après heure, le club commence à se vider, indiquant la fin de la soirée pour nous. Les barmans rangent les bars et les videurs discutent entre eux. Je me dirige vers les vestiaires, où les autres filles comptent leur salaire du jour. Je m'assois sur un des canapés en cuir rouge, retirant mes talons au passage car mes pieds me font un mal de chien.

— Je n'arrive toujours pas à croire qu'ils vont agrandir le club, dit Harley, une collègue en s'asseyant à mes cotés.

— Moi aussi. Dis-je.

— Vous pensez qu'on aura tous encore un poste après les travaux ? Demande timidement une nouvelle danseuse, inquiète.

— On ne peut qu'espérer, répond Fallon. Espérons que Todd nous tiendra informées rapidement.

Je hoche la tête, pensant à tout ce que Todd nous a dit plus tôt. L'incertitude est palpable, mais il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire pour l'instant, à part attendre et espérer le meilleur.

ੈ✩‧₊˚

Lorsque je rentre, le silence m'accueille. Plus de bruit de télé, plus les ronflements de papa, juste le silence. Ça va bientôt faire deux ans, mais je ne m'y fais toujours pas. Je me déchausse puis rejoins ma chambre et commence aussitôt à me préparer pour me mettre au lit. Je suis épuisée, mais avant, comme tous les soirs, j'envoie un message à papa pour lui dire que je suis saine et sauve.

Quand j'ai commencé à gagner plus d'argent, j'ai décidé de nous trouver un appartement plus proche des grandes villes, où nous pourrions vivre plus confortablement. Seulement, à ma grande surprise, il a refusé. Il m'a dit que c'était le moment pour moi de prendre mon envol comme une grande fille; d'arrêter de m'inquiéter pour lui, et qu'il pouvait s'occuper de lui-même. Au début, je ne voulais pas l'entendre. C'était inconcevable pour moi de le laisser vivre seul. J'avais peur qu'un jour il boive plus que d'habitude et qu'il lui arrive quelque chose; qu'il n'y ait personne pour prendre soin de lui... Dans ma tête, j'avais cette crainte constante qu'en mon absence, il finirait par partir comme maman est partie. La simple idée de le perdre me plongeait dans une angoisse terrible.

Nous en avons beaucoup discuté et il m'a promis qu'il reprendrait une hygiène de vie saine; qu'il se remettrait sur pied. J'étais sceptique au départ, mais quand j'ai commencé à voir qu'il faisait réellement des efforts pour améliorer son mode de vie, j'ai finalement décidé de partir pour vivre seule dans ce magnifique appartement en pleine ville. Encore maintenant, je n'arrive pas à croire que j'ai réussi à m'offrir ça. Il y a deux ans, je n'avais même pas les moyens de me racheter un bureau pour ma chambre, et aujourd'hui, je vis dans un duplex.

7 🂧.