80. Silence

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Le silence se fait long à l'arrière de la camionnette. Je n'arrive pas à vraiment me rendre compte du temps qui passe. Il n'y a aucun bruit à l'extérieur, hormis celui du pot d'échappement et des cailloux qui crissent entre eux sous le poids des pneus du véhicule.

Je jette de rapides regards en direction de Suzanne qui stresse à vue d'oeil. Mon attention se porte sur ses mains fermées entre elles en un signe de prière. Je fronce les sourcils.

C'est une blague ? Vous allez pas me faire croire qu'une personne peut prier dans cette situation. Normalement c'est après avoir commis un pêché qu'on demande le pardon, pas avant. Sinon ça voudrait dire que tu peux t'en empêcher et que tu choisis délibérément de le faire quand même.

Je détourne le regard.

Qu'elle fasse ce qu'elle veut, si elle pense que prier changera quelque chose à sa situation. De toute façon le karma finit toujours par frapper si on le mérite.

Je lève les yeux aux ciel. Elle semble le remarquer mais ne réagit pas. Le silence me démange. Je me racle la gorge.

- Mais du coup j'ai pas vraiment eu de réponse. Je t'ai fait quoi ?

Elle me dévisage de longues secondes avant de me répondre.

Suzanne: J'ai écouté ce qu'ils m'ont demandé de faire et j'ai joué le rôle qu'ils m'ont donné. Il fallait que je garde contact avec toi pour leur transmettre tous tes faits et gestes, donc je me suis comportée comme une amie l'aurait fait pour que tu t'attaches à moi et que tu restes dans les environs.

Je serre les dents, ne réussissant toujours pas a digérer le fait que ma vie entière est un tissu de mensonge.

Suzanne: Pourtant tu ne t'es pas gênée pour nous snober une fois que tu avais tout ce que tu voulais. De l'argent, un appartement, et maintenant même un petit copain apparemment. Et moi à côté de ça je...

Elle baisse la tête en posant ses mains sur son cou, puis soupire en marmonnant quelque chose d'imperceptible.

Suzanne: Toi on t'offrait tout, et moi, on m'en enlevait de plus en plus. J'en étais malade. Je le suis toujours

- Mais de quoi tu parles ?

Elle lance un regard furtif vers le conducteur de la camionnette qui semble concentré sur la route et se retourne vers moi. Elle se penche en avant pour faire en sorte que ses paroles ne soient entendues que par moi.

Suzanne: Mes enfants. Ils ont mes enfants.

Mes yeux s'écarquillent alors que des souvenirs me reviennent en flash. Je me vois à nouveau dans le restaurant. Des mots résonnent dans ma tête plusieurs fois alors que la scène se rejoue devant mes yeux.

Parmi tout ce flot de pensées, c'est une phrase qui me revient le plus souvent en tête. Celle où elle fait référence à ses enfants qu'elle a hâte de voir en rentrant.

J'inspire pour m'empêcher de rester en apnée plus longtemps. La camionnette s'arrête. Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche pour parler que la porte s'ouvre.

La voix me manque. Je n'arrive pas à réagir. Des cris retentissent sous mes yeux ébahis. Il n'y a que des sons difformes qui parviennent à passer la barrière de mes lèvres.

Je suis tétanisée alors que Suzanne se faire tirer hors du véhicule par les cheveux.

Tim: Rappelle-toi pour qui tu travailles. Tu pensais que pour la simple et bonne raison qu'on a été collé ensemble pour cette mission je te ferais confiance ? Ne me fais pas rire.

Suzanne: Lâche-moi !

Je reste sans bouger alors qu'elle se débat pour tenter de se libérer de son emprise. Il tire sur sa tête pour lui chuchoter quelque chose à l'oreille en un sourire sadique. Les cernes de Suzanne semblent s'agrandir à ses mots. Elle met sa main sur sa bouche, choquée, alors qu'il la lâche finalement.

Tim: Ne teste pas ma patience. La prochaine fois, je leur dirait tout.

Elle baisse la tête en un hochement de tête tandis que je prie pour que ma présence s'efface. Ironique quand on sait que je viens de parler de l'inutilité de la chose.

J'avale ma salive alors qu'elle remonte dans le coffre, qui se ferme aussi vite qu'il avait été ouvert. Le silence envahi à nouveau l'espace. Je m'enfonce dans mon siège. Un chuchotement arrive jusqu'à mes oreilles.

Suzanne: C'est de ta faute.

Je serre les poings, ne voulant pas davantage me disputer avec elle, et sachant au plus profond de moi qu'elle a raison.

Suzanne: Quel travail de merde. On doit se tuer à la tâche pour garder notre couverture, et toi pendant ce temps, tu vis ta vie comme si de rien n'était. C'est de ta faute, tout ça. Si seulement tu n'avais pas tout fait foirer.

Je baisse les yeux sans rien dire, écoutant ses reproches pendant de longues minutes encore sans jamais y répondre. Les heures passent. Mes yeux se ferment doucement.

Une voix semble résonner au loin dans ma tête. Je tente de concentrer mon attention dessus. Ma tension se calme quand je reconnais la voix qui m'appelle.

Un acouphène résonne tout de même dans mes oreilles en arrière plan, peut-être à cause du silence que dégage cet endroit. Je regarde autour de moi. Tout est blanc. Un blanc éclatant à en perdre la vue. Il fait tâche dans ce décor, et moi aussi.

Mon prénom retentit à nouveau de sa bouche. Je fais quelques pas vers lui, tandis qu'il lance des toiles sur des bâtiments invisibles pour se rapprocher de moi.

Avant que je ne comprenne quoi que ce soit, je le vois tendre un bras vers moi, à une distance toujours conséquente, et lancer une toile dans ma direction. Le choc prend moins d'une seconde à se faire sentir. Je regarde mon épaule touchée un quart de secondes, avant de me faire secouer dans tous les sens quand il tire sur sa prise pour me rapprocher de lui.

Je sens ses bras m'entourer aussitôt que j'arrive à sa hauteur. Il se détache presque automatiquement de moi et saisit mes épaules.

Peter: (t/p), il faut absolument que tu me dises où tu te trouves.

Peter Parker x ReaderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant