Chapitre 19.1

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Oliver

Mon cerveau est en ébullition et la température de mon corps avoisine les soixante degrés... J'ai du mal à marcher droit tandis que nous rejoignons la fête, Lyrie et moi. Aucun de nous n'a osé échanger le moindre mot depuis que nous avons quitté la petite crique.

J'essaie de mettre de l'ordre dans mes idées. Comment en sommes-nous arrivés là ? Par les dieux, j'ai failli franchir la limite ! Mais... j'en avais tellement envie... Elle était si belle ! Totalement livrée et abandonnée à moi.

J'aurais dû lui dire la vérité. Ce que j'ai failli faire plus tôt lorsqu'elle est venue sur la plage, éblouissante. Divinement éblouissante. À tel point que j'en ai lâché mon verre, comme un parfait idiot. À cet instant, je me suis dit que je ne voulais plus lui mentir. Qu'elle méritait de connaître la vérité. Et j'espérais, si les dieux le désiraient, qu'elle me pardonnerait. Mais Rina nous a interrompus et je me suis dégonflé, aveuglé par sa présence et toutes les sensations qu'elle déclenchait en moi.

Quand elle s'est glissée dans mes bras pour admirer le coucher de soleil... je me suis senti désemparé. Parce que c'était nouveau pour moi aussi, d'être enlacé de la sorte par une femme. Comme... un couple. C'était tellement naturel ! Et cela m'a plu. Je crois que je n'ai jamais eu aussi envie d'être avec quelqu'un. Pourquoi a-t‑il fallu que ce soit elle ?

Au moment où elle s'est tournée face à moi et que son corps s'est retrouvé plaqué contre le mien, j'ai cru que j'allais perdre pied. J'avais envie d'elle si fort que j'étais prêt à l'allonger sur le sable et à lui faire l'amour, ignorant les conséquences qui en découleraient. J'étais si près de l'embrasser. D'amorcer quelque chose que je ne dois pas et qui aurait condamné son âme à l'errance et à la souffrance éternelle. Et ce, seulement pour étancher ma soif d'elle. Et le pire, c'est qu'elle m'aurait laissé faire.

Lyrie est vierge. Elle ignore tout de ce qu'est l'amour. Je ne sais pas ce qu'elle ressent exactement pour moi, mais elle m'a clairement démontré que je lui plais. Et qu'elle me fait pleinement confiance. Cependant, pour être honnête, je n'ai aucune idée de ce que je dois faire.

Commence par lui dire la vérité... Oui, mais c'est trop difficile encore. Je le souhaite, mais je ne suis qu'un putain de lâche. Car désormais, j'ai peur. Peur qu'elle me déteste, ce qui sera très certainement le cas. Plus j'attends, plus je renforce le mensonge, et plus la vérité sera douloureuse. Surtout si je continue de me rapprocher d'elle.

Il faut que j'arrête tout, tant qu'il en est encore temps. Mais en serai-je seulement capable, alors qu'il me suffit de poser les yeux sur elle pour me perdre ?

Je l'observe du coin de l'œil. Toute trace de joie a disparu de son visage. Je ne sais pas ce qui se trame dans sa tête, mais elle a à nouveau cet air mélancolique. Elle paraît très loin de moi. Fermée. Inaccessible.

Lorsque nous réapparaissons enfin à la fête, Rina se rue vers nous, suivie par ses frères.

— Olie ! hurle-t‑elle avant de bondir dans mes bras. T'étais où ?

— Je suis allé marcher un peu avec Lyrie, je réponds.

— Lyrie ! s'exclame-t‑elle en descendant. Tu viens danser avec moi ?

Le visage de la walkyrie reste sombre. Néanmoins, elle prend la main de la jeune fille et s'éclipse avec elle. Les jumeaux s'avancent vers moi, bras croisés. Je connais cet air... Celui qui annonce que je vais subir un interrogatoire.

— Je peux savoir où vous étiez ? me questionne Brenan.

— Ou plutôt ce que vous faisiez ? ajoute Daevon, un air malicieux sur le visage.

— On est juste allés marcher un peu, je réponds, las.

— C'est tout ? insiste Daevon, déçu.

— Hum.

— Pourquoi on dirait que tu reviens d'un enterrement ? se méfie Brenan. Il s'est passé quelque chose ?

— Non, Brenan. C'est juste que... Je vais rentrer. Il est tard, je suis crevé. Et quelqu'un doit ramener Rina à la maison avant que votre père s'inquiète.

Je tente de les contourner, mais ils me barrent le chemin.

— Olie, reprend doucement Daevon. T'as vraiment pas l'air bien. Tu sais que tu peux tout nous dire ?

Oui, mais là, je n'ai vraiment pas envie de parler. Je veux seulement rentrer, m'allonger dans le noir dans ma chambre, et me laisser engloutir par les ténèbres.

— Je vous vois demain, je lâche, éludant sa question.

— OK... Je vais appeler Rina, je lui dis de te rejoindre au pied des escaliers, décide Brenan.

Daevon marche à côté de moi tandis que nous nous approchons de la falaise.

— Tu vas me dire ce qu'il s'est passé ? insiste-t‑il.

— Daevon...

— Tu t'es disputé avec elle ?

Je relève les yeux vers lui.

— Non. En fait, c'est plutôt l'inverse. Daevon, j'ai failli l'embrasser. Je sais pas ce qui m'a pris. J'ai renoncé au dernier moment. Et je pense que je l'ai blessée.

— Ouah... En quoi est-ce une mauvaise chose ? Que tu aies failli l'embrasser ? C'est la suite logique des événements, non ?

— Tu sais très bien que non. Lyrie n'est pas une femme ordinaire. Compte tenu de ce qu'elle est, il n'y a pas de « suite logique des événements ». Tout doit s'arrêter maintenant. C'est pour le mieux.

— Pour le mieux ? Ou plutôt « pour le plus simple » ?

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Que tu as tendance à vite renoncer et à fuir dès que les choses se compliquent, Olie. Tu as adopté ce mode de fonction­nement toute ta vie pour dissimuler ton identité. Mais ne crois-tu pas qu'aujourd'hui, il est temps de te battre vraiment pour ce qui te semble important ?

Sa remarque me pique au vif.

— Et quelles sont ces choses importantes, selon toi ? je le questionne, agacé.

— Pour commencer, rencontrer ton vrai toi. Oliver d'Ellentour. Tout part de là.

Bon sang, je n'avais vraiment pas envie d'avoir cette conversation maintenant. Heureusement, Rina nous rejoint enfin, en sautillant. Elle s'approche de moi et me prend la main avant de lancer :

— On y va, Olie ?

— Oui, Rina.

Daevon me donne une tape sur l'épaule avant denous laisser partir. 

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant