Chapitre 15.2

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Lyrie

Je me laisse tomber sur le lit, les yeux rivés sur le plafond. Je ferme les yeux, pensive. Me retrouver ici, dans cette maison... Dans une famille... J'ai l'impression d'oublier qui je suis et ce pour quoi je suis là. D'être simplement... moi. De ne pas me sentir acculée, de ne pas avoir peur. De pouvoir vivre l'instant présent. Je sais que ce n'est qu'une douce illusion qui masque l'horreur de la réalité. Celle de mon esprit encore prisonnier de cette tour... Celle des éclaboussures de sang et des cris qui résonnent dans ma tête chaque fois que j'essaie d'oublier.

Je sursaute en entendant frapper à ma porte. Je me redresse puis vais ouvrir. Mon pouls s'emballe instantanément sans que je puisse rien y faire. Oliver me dévisage également, avant de me demander :

— Je voulais juste savoir si tu étais bien installée ?

Ses cheveux sont mouillés et sa peau sent le savon. Il est vêtu d'un pantalon en lin blanc et d'une tunique à col montant. Ses grands yeux bleus sont rivés dans les miens tandis qu'il attend ma réponse. Je ne peux m'empêcher d'admirer son corps mis en valeur par ses vêtements plus décontractés, ses cheveux noirs qui bouclent légèrement avec l'eau, sa barbe naissante... Sa bouche...

— Lyrie ?

Je relève brusquement les yeux pour répondre :

— Très bien, merci.

— OK. Le déjeuner sera servi dans une petite heure. Profites-en pour te reposer ou visiter la maison. Ou faire ce que tu veux. Bref. Cet après-midi, je dois aller rendre des livres à la bibliothèque. Si tu en as envie, tu pourrais...

— C'est d'accord, je réponds avant qu'il termine sa phrase.

Je rougis, réalisant que je dois avoir l'air d'une parfaite idiote. Ses yeux s'étrécissent.

— Tu as accepté avant même que je te dise de quoi il retourne, me fait-il remarquer, un sourire aux lèvres.

— Je suppose que tu allais me proposer de t'accompagner ?

— Oui, mais si j'avais su, j'aurais demandé davantage.

Sa voix se fait plus suave, m'envoyant des frissons jusqu'aux orteils.

— Je plaisante ! ajoute-t‑il en voyant que je reste figée.

Et que j'ai oublié de respirer.

— À plus tard, Lyrie.

— Oui.

Je le regarde emprunter le petit escalier et disparaître. D'accord... Tout va bien... J'inspire. Et je me dirige vers la salle de bains. J'y trouve Daevon, en train de rassembler ses affaires. Il est torse nu, et porte un pantalon semblable à celui d'Oliver. Il hausse un sourcil avant de me servir un sourire des plus aguicheur.

— Tu aimes ce que tu vois, Lyrie ?

Je lève les yeux au ciel, mais... Oui, il est très agréable à regarder, je dois l'avouer. Néanmoins, je réplique :

— Dans tes rêves.

— La frontière est mince entre le rêve et la réalité.

Il rit effrontément avant de me laisser la place.

— À plus tard ! lance-t‑il avant de sortir.

Je m'empresse de verrouiller la porte derrière lui, comme me l'a conseillé Naralou

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Je m'empresse de verrouiller la porte derrière lui, comme me l'a conseillé Naralou. J'observe la petite pièce, composée d'un lavabo et d'une coiffeuse, ainsi que d'une douche. Un vase contenant une magnifique composition florale est posé sur un tabouret. Naralou a l'air d'apprécier les fleurs.

Je me déshabille et étudie mon reflet dans le grand miroir fixé au mur en face de la douche. J'ai repris des couleurs, mes traits sont moins tirés. Mais mes yeux me brûlent, tandis qu'ils parcourent les nombreuses cicatrices infligées par les einheri. Je serre les poings, la rage menaçant de me faire imploser.

Qui pourrait trouver ce corps mutilé... beau ? Et pourquoi est-ce que je me pose cette question ? Je me sens perdue. Parce que mes réactions face à Oliver deviennent perturbantes. Je ne suis jamais tombée amoureuse. Vraiment amoureuse. J'avais un béguin pour Elrys, mais cela n'avait rien à voir.

Mon cœur se met à battre dès que je l'aperçois. Et j'ai beau tenter de le maîtriser, c'est de pire en pire. Je réalise que mes pensées se tournent tout le temps vers lui. Comme un semblant d'obsession. J'aime passer du temps avec lui autant que cela m'effraie. Devrais-je renoncer à l'accompagner cet après-midi ? Ma raison me dit oui. Mais mon cœur aspire à y aller. Et la raison du cœur n'est-elle pas la plus dangereuse ?

Mais que suis-je en train de faire ? Je devrais m'éloigner. Me concentrer sur ma mission.

J'entre dans la douche et laisse couler l'eau chaude sur ma tête comme une douce caresse enveloppante. Puis je me laisse tomber lentement, jusqu'à me retrouver assise par terre, les genoux remontés, enveloppés par mes bras. Je me sens morose, tout à coup, j'ai envie de pleurer. Mon corps se met à trembler. Et les larmes affluent.

— Ma douce Lyrie... ne pleure pas. Tu n'es pas seule. Nous sommes là, avec toi. Ne l'oublie jamais. Nous sommes une.

La voix d'Oalah, bienveillante, fait écho dans mon esprit.

— Vous me manquez, je bégaie entre deux sanglots. Vous me manquez tellement... Si seulement vous étiez là...

— Tu es forte, Lyrie. Tu es capable d'y arriver. Noktys t'a choisie.

— Parce qu'il ne reste plus que moi.

— Parce que tu es née pour être reine. Tu l'as toujours été. Tu es plus rapide que tes sœurs. Plus sérieuse, plus noble. C'était toi. Cela a toujours été toi. Tu étais vouée à prendre ma place un jour. J'aurais simplement aimé te céder la couronne... dans d'autres circonstances.

— Est-ce que tu es vraiment là, Oalah ? Ou suis-je en train de devenir folle ?

Le silence me répond, un silence profond. Et terrifiant. Je me recroqueville davantage. Et continue de pleurer. Parce qu'à cet instant, je ne parviens plus à être forte.

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant