Chapitre 9.1

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Oliver

Nous marchons sans un mot, Lyrie et moi, tandis que nous arpentons la grande ruelle commerçante à la recherche d'un tailleur. La guerrière ne passe pas inaperçue avec ses longs cheveux rougeoyants. Les gens s'écartent sur notre passage, ce qui n'a pas l'air de l'inquiéter. Peut-être est-elle habituée à inspirer de la crainte ?

Toutefois, elle semble perdue dans ses pensées. Quelque chose la perturbe, je le sens. Je réprime mon envie de la questionner à ce sujet, préférant jouer la carte de la distance. J'observe de temps à autre son profil, discrètement. Elle exerce sur moi une attraction contre laquelle j'ai du mal à lutter. Cela ne m'était jamais arrivé. Et il a fallu que ça tombe sur elle. Une walkyrie inaccessible.

Repensant aux paroles de Brenan, je ne peux m'empêcher de me demander si elle ressent la même chose, elle aussi. Je secoue la tête et chasse ces pensées.

Elsie est un bourg stratégique de Cindra, par lequel passent deux grandes routes commerciales. La ville n'est pas immense, mais elle compte un marché gigantesque, réputé dans tout le royaume. Aussi, c'est un des rares endroits prospères en dehors de la capitale. Les rues sont propres, pour la plupart ; les bâtisses en bon état, les gens richement vêtus.

Elsie est aussi connue pour sa grande bibliothèque, alimentée par les nombreux passages de voyageurs venant des quatre coins du royaume qui y laissent leurs écrits. J'ai toujours aimé les livres. La sensation du cuir et du papier sous mes doigts. L'odeur de parchemin. Et les enseignements qu'on y trouve. Les rares fois où j'ai eu le temps de m'y arrêter, j'ai rencontré des personnes fascinantes. Et j'ai lu des heures entières sans pouvoir m'arrêter.

Il m'arrive parfois d'écrire. Une sorte de journal dans lequel je couche mes pensées les plus intimes. Ou des poèmes. Ou encore des nouvelles. Un journal bien caché que les jumeaux ont tenté maintes fois de dénicher, sans succès.

— Je pense que nous trouverons des vêtements pour les jumeaux dans cette échoppe, me dit Lyrie en désignant une maisonnette sur laquelle est inscrit « tailleur ».

J'acquiesce avant de la suivre à l'intérieur. C'est un véritable fourbi. Des rouleaux de tissu sont entreposés en désordre sur des étagères, des morceaux de cuir déposés sur des chevalets. J'aperçois au fond un métier à tisser. Un homme aux cheveux en bataille s'avance vers nous, avenant.

— Madame, monsieur, nous salue-t‑il avant de s'incliner légèrement, en quoi puis-je vous aider ?

Il me détaille avant de porter son attention curieuse sur Lyrie.

— Vous êtes chasseurs ! me lance-t‑il.

Il a reconnu les armes en argent, et la tenue en cuir noir qui identifie tous les chasseurs de la Couronne. Je sors la médaille du roi, qui me permet de voyager sans payer.

— Oh, je vois ! s'exclame-t‑il, ravi.

En effet, il sait qu'il va pouvoir me vendre les articles les plus onéreux et envoyer la note au palais de Cindra.

— Il me faut deux tenues complètes en cuir, solides, pour des grands gaillards. Plus grands et plus costauds que moi, je précise.

— Bien sûr ! Et pour la dame ?

Je me tourne vers Lyrie. Elle observe avec curiosité les tissus entreposés.

— Deux tenues supplémentaires, je réponds au tailleur.

— Tenues de chasseuse également ?

— Oui.

— Bien. Je vais vous préparer ce dont vous avez besoin, repassez d'ici une heure.

— D'accord.

Nous sortons de la boutique.

— On a une heure devant nous, je dis à Lyrie. Tu veux visiter la ville en attendant ?

— Tu as l'air de bien la connaître, me fait-elle remarquer.

— On s'y arrête souvent, oui.

— Dans ce cas, montre-moi l'endroit que tu préfères.

Je la regarde, étonné par sa demande. Je la vois rougir légèrement avant qu'elle ne détourne les yeux.

— Pour apprendre à mieux te connaître, précise-t‑elle.

Les battements de mon cœur accélèrent bêtement. Pourquoi voudrait-elle mieux me connaître ?

— Laisse tomber, finit-elle par dire, voyant que je ne réagis pas. N'importe quel endroit fera l'affai...

— Non, non ! Je vais te le montrer.

— D'accord.

— Tu vas être surprise.

— Pourquoi ?

— Tu verras.

Je comprends à son expression que j'ai piqué sacuriosité. Nous quittons la rue commerçante et remontons une grande alléedallée bordée de plusieurs bâtiments, avant d'arriver devant la bibliothèque.

De grands escaliers blancs permettent d'accéder au porche. Une statue représentant un érudit tenant plusieurs livres dans sa main se dresse sous une arche que nous dépassons pour pénétrer dans la bâtisse. 

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant