Chapitre 9.2

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Oliver

Comme il est tôt, il n'y a pas encore grand monde. L'odeur du papier imprègne les lieux. La jeune femme à mes côtés contemple les hauts rayonnages qui s'étendent à perte de vue. Elle me lance un regard interrogateur, avant de me demander :

— Une bibliothèque ?

— Ça t'étonne ?

— Oui, avoue-t‑elle.

— J'aime lire.

— C'est... surprenant.

— Pourquoi ? Parce que je suis un chasseur ?

— Entre autres.

Elle s'avance vers une rangée de livres et caresse les ouvrages du bout des doigts. Je la regarde faire, immobile, subjugué par ce simple mouvement. Je la rejoins.

— Et toi ? m'enquis-je. Est-ce que tu lis ?

— Ça m'arrive. Mais c'était surtout Oalah qui nous faisait la lecture.

Une ombre passe dans ses yeux ambrés à l'évocation de la défunte reine.

— Et que vous lisait-elle ?

— Principalement des textes sur l'histoire d'Evalon et des dieux.

— Tu n'as jamais lu de romans ?

— Non.

— Je pourrais t'en lire, à l'occasion, je réponds spontanément.

Je réalise soudain ce que je viens de dire, gêné. Bon sang, cette femme me fait perdre mes moyens à chaque instant...

— Ça me plairait beaucoup, oui, dit-elle pourtant.

Je lui souris avant de lui proposer de me suivre vers un rayonnage que j'affectionne particulièrement. Elle ne dit rien et vient se placer juste à côté de moi au moment où j'attrape un rouleau sur une étagère. Je l'invite à venir s'asseoir à une table où je déroule le parchemin, sous ses yeux attentifs.

— Qu'est-ce que c'est ? me demande-t‑elle.

— Des journaux de bord, je lui explique. Les voyageurs qui s'arrêtent ici déposent des écrits dans lesquels ils relatent leurs aventures ou expériences. Ils sont souvent anonymes, mais on y apprend beaucoup de choses intéressantes.

— Comme quoi ?

— Des façons de vivre différentes. Des pensées intimes parfois. C'est comme si on entrait dans la tête des gens. Et cela me fascine.

Elle esquisse un demi-sourire avant de reporter son attention sur le parchemin.

— Et que raconte celui-ci ? me questionne-t‑elle.

Je m'étonne :

— Tu n'arrives pas à lire ?

— Je parle votre langue, mais je ne la lis pas.

— Eh bien, il est ici question d'un mercenaire qui explique comment il a sauvé une jeune femme prisonnière d'un groupe de marchands d'esclaves, et comment il en est tombé amoureux. Ils se sont mariés, et il l'a conduite ici pour y déposer leur histoire.

— Oh... C'est donc une histoire d'amour, commente-t‑elle, rougissant à nouveau.

J'aime voir ses joues se colorer ainsi. Cela la rend plus humaine. Je me demande quelle teinte elles auraient sous l'effet du plaisir. Je me racle la gorge avant de poursuivre.

— L'histoire se termine sur un poème. Est-ce que... tu veux l'entendre ?

— Oui.

Par une nuit noire, sa voix m'a appelé.

Par le sang, je l'ai délivrée.

Par sa beauté, j'ai été envoûté.

Par mon corps, je l'ai faite mienne.

Et sous un ciel étoilé, je l'ai aimée.

Lyrie fronce les sourcils. Elle mordille sa lèvre inférieure, éveillant une curieuse sensation en moi. Elle paraît réceptive à la poésie, ce qui m'enchante. Je viens de lui ouvrir une fenêtre sur mon univers, ce que je n'ai fait avec aucune autre femme. Et sa réaction me réchauffe. Me donne envie de goûter à ses lèvres pulpeuses. De l'allonger sur cette table et de la faire mienne au milieu de ces parchemins.

Elle ne me quitte pas des yeux, que je vois glisser vers mes propres lèvres. A-t‑elle... les mêmes pensées que moi ? Non, impossible, je me fais forcément des idées. Mais Brenan a dit... Par les dieux, tu déconnes, Oliver. Ressaisis-toi, bon sang !

— Je pense que nous devrions retourner voir le tailleur, je dis pour rompre la tension qui s'est installée entre nous.

— D'accord.

Elle baisse les yeux et me suit, nous sortons dela bibliothèque. 

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant