Chapitre 5.3

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Oliver

Je suis réveillé en pleine nuit par un hurlement. Je bondis du fauteuil en dégainant ma dague, prêt à me battre... avant de réaliser qu'il s'agit de Lyrie, en plein cauchemar. Son corps se tord dans tous les sens tandis qu'elle supplie. Je ne réfléchis pas : je balance mes armes au sol et la rejoins sur le lit.

Elle est ruisselante de sueur, sa chemise de nuit colle à sa peau et à ses bandages.

— Ne leur faites pas de mal ! Ne les tuez pas ! Traîtres ! crie-t‑elle.

— Lyrie !

Mais elle reste prisonnière de son rêve. Je connais bien le problème pour être moi-même sujet aux terreurs nocturnes. Je dois la reconnecter pour la réveiller. Je la soulève pour la serrer dans mes bras. Son corps brûlant est tendu et parcouru de spasmes. Je dégage les mèches de cheveux trempées de sueur de son visage, et pose ma main sur sa joue. Je l'appelle doucement, en traçant des cercles légers sur sa tempe.

— Lyrie. Lyrie. Reviens.

— Ne les tuez pas ! supplie-t‑elle à nouveau.

— Lyrie, ce n'est pas réel. Tu entends ?

Ses yeux s'emplissent de larmes au moment où elle les ouvre. L'ambre électrique de ses pupilles se fige dans les miennes.

— Ils les ont toutes massacrées, murmure-t‑elle, la lèvre tremblante. Elles sont toutes mortes... Ils les ont déshonorées afin qu'elles ne puissent jamais revenir... Mes sœurs... sont condamnées à la souffrance... pour l'éternité.

Sa détresse me touche d'une façon qui fait vibrer tout mon être. Je ne peux détacher mes yeux des siens. Je pourrais effacer sa peine là, tout de suite. Comme je me suis effacé de ses souvenirs. Mais ce serait supprimer une partie de son histoire à laquelle je n'ai pas le droit de toucher.

J'essuie ses larmes avec mon pouce et la serre davantage contre moi. Elle ferme les yeux avant de poser ses mains dans mon dos. Mon menton repose sur le sommet de son crâne, tandis que je me balance tout doucement pour la bercer.

— Je dois vous paraître bien pathétique... ajoute-t‑elle d'une voix tremblante.

— Non. Je suis sincèrement navré pour ce qui est arrivé à ton peuple, Lyrie. Je ne peux qu'imaginer... l'horreur de ce que tu as vécu. Et la souffrance d'avoir perdu tous ceux qui t'étaient chers, d'avoir abandonné ta terre et ton royaume pour te retrouver ici, dans l'inconnu. Alors non, tu es tout sauf pathétique.

— Une walkyrie ne doit pas verser de larmes, réplique-t‑elle. Pourtant, je ne fais que ça. Je ne suis pas digne de l'honneur que m'ont accordé les dieux. Je suis seule, Oliver. Alors, quel est le sens de tout ça ?

Je ne réponds rien. Parce que je suis d'accord avec elle. Quel est le sens de tout cela ? L'avoir faite reine alors qu'elle n'a plus de peuple ? M'avoir fait roi alors que je suis un bâtard exilé ? Qu'attendent les dieux de notre étrange rencontre ?

— Je ne sais pas, je finis par lui dire. Je n'en sais foutrement rien ! Mais je suppose qu'avec le temps, tu trouveras les réponses à tes questions. En attendant, si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là. Et tu peux compter sur Daevon et Brenan.

— Merci.

Elle se dégage de notre étreinte et me fixe quelques secondes avant de détourner le regard vers la fenêtre. Immobile, j'observe son profil éclairé par les rayons de lune. Je dois avouer qu'elle est magnifique. Magnifique dans sa force et sa fragilité.

Je dirais qu'elle a dans les vingt-cinq ans. Bien qu'elle paraisse être là depuis des siècles. Est-ce sa première incarnation ? Ou la suite d'une multitude qui s'enchaîne depuis des siècles ? A-t‑elle servi Arthur Pendragon, mon ancêtre, il y a huit cents ans ?

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant