Chapitre 6.1

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Lyrie

Il fait jour lorsque je me réveille, émergeant d'un sommeil profond et sans rêves. Je n'avais pas aussi bien dormi depuis... des mois. Je me redresse lentement, mon corps encore endolori. Certaines morsures n'ont pas totalement cicatrisé, à cause du poison. Mais c'est en bonne voie, je le sens.

Mes yeux se posent immédiatement sur le fauteuil où s'est endormi Oliver. Il est vide. Je soupire, soulagée. Car je me sens profondément gênée par ce qui s'est passé cette nuit. Rien et tout à la fois.

Il m'a vue en état de faiblesse. Ce qui est inconcevable. Je ne suis pas censée montrer ce que je ressens. Surtout pas ce qui me fait peur. On m'a tellement écorchée que j'en arrive à perdre le contrôle devant un inconnu. Je dois à tout prix me ressaisir. Rester forte et concentrée si je veux trouver mon eriah. Que pensera-t‑il de moi si je me présente à lui dans cet état pitoyable ?

Et puis, il y a eu... cette étrange chaleur qui s'est insinuée en moi alors qu'il était tout près... J'ai clairement ressenti une tension inexplicable. J'avais du mal à déglutir chaque fois qu'il posait ses maudits yeux bleus sur moi. Et cette conversation autour de ma pureté était terriblement gênante, même si elle a paru l'amuser.

Je secoue la tête avant de m'étirer et de me lever. La porte s'ouvre alors, laissant entrer une humaine plutôt jeune, vêtue d'une robe grise avec un tablier légèrement sali. Ses bras sont chargés de linge. Elle ouvre de grands yeux tout en me détaillant de la tête aux pieds. Elle rougit soudainement avant de baisser le regard et de s'incliner.

- Pardonnez-moi, madame, je ne pensais pas que vous étiez réveillée. Le chasseur m'a demandé de vous apporter des vêtements propres et de remplir votre baignoire.

Je ne réponds rien, ne sachant comment me comporter. Je n'ai jamais été « servie » par personne. Et sa façon de me regarder... comme si j'étais une hallucination.

Elle avance timidement vers le lit où elle dépose un pantalon en cuir noir, une tunique blanche à manches longues et un corset en cuir lacé. Une cape en fourrure et une paire de bottes noires fourrées complètent la tenue. J'attrape le pantalon et le déplie avec étonnement.

- Quelque chose ne va pas ? s'inquiète la domestique.

- Je n'ai jamais mis de pantalon, je concède.

- Vraiment ?

- Oui.

Les walkyries ont toujours porté une jupe en cuir, courte pour ne pas entraver leurs mouvements, assortie d'une brassière. Nous avons l'habitude d'être légèrement vêtues, car nous ne ressentons pas le froid. Du moins, pas comme les humains.

- Pourquoi les manches de ce vêtement sont-elles si longues ? je la questionne en dépliant la tunique.

- Vous risquez d'avoir froid dehors.

Je ne réponds rien. Elle se dirige vers un paravent auquel je n'avais pas prêté attention et passe derrière. Je la suis et découvre une baignoire sur pied. La jeune femme ouvre un robinet duquel s'écoule de l'eau chaude. Curieuse, je lui demande :

- Comment produisez-vous de l'eau chaude sans l'usage de la magie ?

Elle m'observe avec de grands yeux ronds avant de m'expliquer :

- Il y a un système de chaufferie dans la demeure. L'eau est chauffée par le feu et est amenée jusqu'ici dans des tuyaux.

- Je vois... C'est ingénieux.

- Vous... Vous venez d'Evalon, n'est-ce pas ?

- Oui.

- Comment... Comment est-ce ?

Je discerne un besoin impérieux de savoir dans ses yeux bruns pétillants.

- Très beau, je réponds spontanément. Il y a de grandes montagnes dont les sommets touchent le ciel, des cascades dont l'eau est chargée de poussière de diamant, des forêts luxuriantes peuplées de créatures magiques, des cités construites au-dessus de la mer. Et des grottes gorgées de cristaux multicolores...

- Ça a l'air magnifique, me dit-elle en souriant.

J'acquiesce.

- Je m'appelle Elena, me salue-t‑elle en me tendant la main.

- Lyrie, je réponds en la lui serrant.

- Pardonnez-moi de vous avoir dévisagée tout à l'heure.

- Ce n'est pas grave.

- Vous êtes si... surnaturelle !

Je hausse un sourcil, ne voyant pas vraiment ce qu'elle veut dire.

- Désolée, je vous mets mal à l'aise !

- Non, ce n'est rien, je la rassure. Peu des nôtres parviennent à traverser l'Arragast pour rejoindre vos terres.

- C'est vrai. Certaines familles fae se sont retrouvées piégées de ce côté de la barrière lorsque celle-ci a été érigée par les dieux. Nous avons donc davantage l'habitude de les côtoyer. Mais les autres créatures surnaturelles... c'est plus inhabituel. Je ne vais pas vous importuner plus longtemps, ajoute-t‑elle en coupant le robinet. Votre bain est prêt, je vous laisse vous préparer. Voici une huile parfumée et du savon. Je pose une serviette sur le paravent. Si vous avez besoin de moi, je serai devant votre porte.

- Merci, Elena.

Elle s'incline avant dese retirer.

EVALON, La Marque des Dieux - Tome 1 : Le Chasseur _ Romantasy AdulteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant