Des illusions

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Une fois ces mots prononcés, ce fut, du moins pour Georges, le début d'une histoire d'amour hors du commun. Leurs baisers ne s'épuisèrent pas. Leurs gestes, éparpillés au départ, se firent plus entreprenants, ne laissant pas de place à l'improvisation. Sans se rappeler de la route entre le terrain de l'exposition agricole et le motel Diamant, Georges vécut chaque instant de leurs étreintes jusqu'au petit matin. Bérengère dégageait une énergie d'adolescente qu'il avait oublié en cours de vie. Du haut de ses 31 ans, la jeune femme semblait tout connaître en matière de sexualité. Elle ne voulait pas se reposer, cherchant la caresse qui allumerait encore le désir. Certes, ces moments merveilleux n'allaient pas durer. C'est du moins ce qu'il pensait. Pour lui, le jour se lèverait et elle le remercierait pour ces beaux moments et lui souhaiterait une bonne continuité. Il s'en retournerait la tête remplie de souvenirs jusqu'ici inégalés et se sentirait de nouveau seul avec la multitude des émotions qui le rongeaient depuis trop longtemps. Il roulerait jusqu'au silence des champs dorés, où chaque mur de la maison portait les empreintes de ses anciennes amours.

Il s'assoupit lorsqu'elle quitta le lit pour aller se rafraîchir sous la douche. Dans ses rêveries, Bérengère était auprès de lui, courant dans les champs, riant à gorge déployée. Du coin de l'œil, il voyait les silhouettes de Serge et d'Avéline qui éclataient de bonheur dans ce jardin aux multiples couleurs chatoyantes. Il ressentit une douleur à la poitrine en se réveillant en sursaut. Bérengère se tenait devant lui, une serviette autour de sa poitrine, cachant à peine la toison de son sexe. Elle l'observait avec un sourire presque mesquin. « Ça y est. Elle va me raconter toute une histoire et s'excuser avant de partir, sans oublier de déposer un baiser sur mon front » se dit-il en esquissant à son tour un sourire entendu.

« Quoi? Qu'est-ce que tu veux me dire, Bérengère? » demanda-t-il enfin en tendant les bras, espérant qu'elle se jette à nouveau entre les siens.

Elle posa les mains sur ses hanches et prit un air interrogateur :

- Tu es certain de m'avoir dit toute la vérité, Georges?

- La vérité? De quoi est-ce que tu parles? Je ne suis pas sûr de comprendre, là.

Elle pointa du doigt l'annulaire de sa main gauche où brillait l'anneau qui l'avait uni à Thérèse durant vingt-trois ans : « Cette bague? Tu es encore marié? »

Il posa sa main droite sur l'autre, soit par réflexe, soit par gêne, il ne savait plus trop. Il portait pourtant cette bague la veille et elle l'avait certainement remarqué avant ce matin-là.

- C'est ma bague de mariage, oui. Pourquoi? Est-ce que ça te dérange? demanda-t-il en ravalant sa salive.

Elle se pencha à sa hauteur et la serviette se détacha : « Bien sûr que ça me dérange. J'ai l'impression que tu es encore marié, c'est tout. Tu l'enlèverais si je te le demandais? »

Il serra les dents. Elle ne manquait pas de front, la Bérengère. Ce qu'elle osait demander frôlait la catastrophe. Il ouvrit la bouche pour lui manifester son indignation, mais à la vue de ces yeux verts qui l'avaient tant séduit, il se retint. Elle soufflait son haleine chaude dans son visage et ce corps encore humide était suffisant pour lui faire tourner la tête. Il retira l'anneau et le déposa sur la table de chevet sans dire un mot.

- Et toi, tu me marierais, si je te le demandais? dit-il en la tirant violemment contre lui.

Elle étouffa un rire et se laissa prendre comme si c'était la première fois, avec autant de passion qu'au début de la nuit.

Lorsque leurs ébats s'épuisèrent, elle roula de l'autre côté du lit en silence, lui tournant le dos. Elle resta comme ça, tranquille et silencieuse, pendant plus d'une quinzaine de minutes. Il n'osa pas briser cette quiétude, de peur de rompre ce fil ténu qui semblait les lier.

Le silence des blés d'orOù les histoires vivent. Découvrez maintenant