Un Simple Pari

chapitre 7

On se lève du banc, il se tourne vers moi et me tend sa main avant d'annoncer :

- Au fait, moi c'est Jordan.

Je serre fermement sa main.

- Chanel.

- Tu peux effacer les photos s'il te plaît ? Demande-t-il prudemment.

Je sors mon téléphone et j'efface chaque photo devant lui, ce qu'il ne sait pas, c'est que ces photos sont copiées dans un dossier privé. Il me sourit.

- Merci.

Je me dois de prendre ce genre de précautions depuis maintenant deux ans. Suite à une histoire qui s'est mal terminée.

Je jette un coup d'oeil à l'heure sur mon téléphone. 11h00. Je ne sais pas en quel cours je suis. Je connais juste ma salle. Je prend donc conscience que je ne sais absolument rien. Mon emploi du temps, mes horaires, mes professeurs... Je suis totalement paumée.

Jordan s'éclipse dans la foule qui se rue dans les escaliers pour ne pas arriver en retard en cours. Moi, je reste plantée là, devant le banc où j'étais assise il n'y a pas plus de deux minutes, à rassembler toute la volonté du monde pour avancer jusqu'à ma salle. J'aperçois Dylan du coin de l'oeil qui avance d'un pas déterminé en direction des escaliers. Il a l'air vraiment furieux. Heureusement pour moi, il ne m'a pas vu. Enfin, c'est ce que je croyais jusqu'à ce que j'entende ses pas lourds se diriger vers moi. J'inspire et j'expire un bon coup. C'est l'heure des règlements de compte et quelque chose me dit que ça risque d'être plutôt explosif.

Je décide de fuire, je suis forte et maline mais face à la carure de Dylan, je ne fais pas le poids. Je prend mon sac et je commence à avancer rapidement jusqu'aux escaliers. Je tourne la tête vivement derrière moi, je ne le vois plus. Je lâche un long soupir de soulagement puis je commence à monter à l'étage. Généralement, je ne montre pas que j'ai peur. Ça n'arrive que lorsque je suis en confrontation avec mon père. Et encore, j'essaye cacher ma peur le plus possible pour ne pas me faire écraser comme un vulgaire moustique ou encore pire, frappée.
J'entre dans le couloir, il est désert. Tout les élevées sont déjà rentrés.

Super ! Je vais encore me faire virer !

Je marche désespérément jusqu'à ma salle, située tout au fond du couloir. Comme par hasard...
Tout à coup, je sens une main sur mon épaule, avant que j'ai eu le temps de me retourner, mon dos percute violemment le mur en béton armé. Mon sac me glisse des mains. Le choc est tellement violent que ma respiration se coupe le temps d'un instant. Je grimace de douleur. Je relève la tête et je me retrouve face à Dylan. Son avant-bras se retrouve contre ma gorge et son corps se presse contre le mien. Son autre main est plaquée contre le mur. Je panique. J'ai peur de ce qu'il peut faire. Ses yeux sont noirs et son regard est agressif. Je tente de garder une expression neutre comme je fais toujours mais c'est peine perdue. Il appuit trop fort son bras contre ma gorge, ça me fait mal. L'inquiétude et la panique doit se lire sur mon visage puisqu'il sourit, pas un sourire sincère, un sourire qui montre qu'il est satisfait d'être en position de force, je dirai même méchant. Mon rythme cardiaque s'accélère. Un instant j'envisage de lui mettre un coup de genou dans l'entrejambe, mais il est trop collé à moi, à tel point que je sens les muscles de son torse se contracter. Il respire bruyamment. Il rapproche doucement son visage du mien. Nous n'avons que quelques centimètres d'écart. Ma respiration se fait difficile. L'oxygène à du mal à passer à cause de la pression de son bras.

- Tu fais moins la maline maintenant, hein ? Crache-t-il les dents serrées et la mâchoire contractée.

Soudain, je me rend compte que j'ai encore mes deux bras. Je lève rapidement mes bras pour les placer autour de son cou et je le griffe avec mes ongles fraîchement manicurés. Il se décolle de moi avant d'arracher un cri de douleur plutôt bruyant en maintenant ses mains contre son coup. Quant à moi, je recommence à respirer convenablement. Le torse de Dylan se soulève et s'abaisse à une vitesse phénoménale et je me rend compte que le mien aussi. Je n'arrive pas à me calmer. Je suis complètement paniquée rien qu'à l'idée de savoir ce qu'il va se passer ensuite. La port d'une des salles s'ouvre et un professeur en sort, les sourcils froncés, il se met à crier :

- Mais enfin qu'est ce qui vous prend ?!

Dieu merci...

Voyant que Dylan ne lâche pas un mot, je m'y colle.

- Rien. Ça va. Je jette un regard lourd de sens à Dylan qui lui, me fusille du regard.

- Allez en cours et dépêchez-vous ! Nous ordonne-t-il.

Il rentre dans sa classe en refermant la porte derrière lui. Mon rythme cardiaque s'accélère à nouveau.
Il marche jusqu'au fond du couloir en regardant droit devant lui. Je le rejoins. Il frappe à la porte. Le professeur nous crit d'entrer. J'espère qu'on ne va pas encore se virer, parce que non seulement je serais venue en cours pour rien puisque le jour de la rentrée, les cours se terminent à midi. Mais en plus, je ne veux pas être à nouveau confrontée à Dylan. Il m'a dévoilé son côté obscur et j'étais aux premières loges. Il me fait peur. Pourtant, ça fait longtemps que ça ne m'était pas arrivé depuis l'arrivée d'Anna, ma belle-mère. Depuis que Christian, mon père, l'a rencontrée, il a changé. Il n'est plus comme avant. Elle l'a changé d'homme violent à un homme gentil et qui essaye à tout prix de se racheter auprès de ses enfants. Je ne tomberai pas dans le panneau. Mon frère, lui, a déjà en quelque sorte pardonné à mon père. Je ne sais pas comment il peut faire ça après tout ce qu'il nous a fait subir, moi je ne peux pas, et je ne pourrai jamais.

Le son de la porte qui s'ouvre me tire de mes pensées. Nous entrons sans un mot et surtout sans la permission du professeur et je m'installe à côté de ma meilleure amie qui m'a gardé une place auprès d'elle. Mes autres amis sont assis en face. Je pose mon sac au sol et je m'assois lourdement sur ma chaise, laissant s'évaporer de mon corps le stress et l'inquiétude de cette matinée que je viens de passer. Je suis avec ma meilleure amie, je ne risque plus rien, je ne déraperai pas, tout va bien.