chapitre 19

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Depuis que nous sommes partis, Alexandre ne cesse de me rabâcher que je dois me comporter "correctement" et "respectueusement". Ça rentre par une oreille et ça ressort par l'autre. Je ne le prend même pas en considération. Je me comporterai comme je veux, ou surtout comment mon cerveau le voudra. Le contrôle ne fait pas vraiment partie de mon vocabulaire.

Alexandre gare la voiture de Christian dans le garage. Je sors en prenant soin de bien claquer la porte, pensant que, peut-être, ça va me détendre. Je dors dans cette maison chaque nuit, je la connais et pourtant j'ai l'impression que j'entre dans une maison totalement inconnue. Elle est monotone et triste, comme ce qui s'y passait à l'intérieur quelques temps avant. Les murs sont blanchâtres, presque jaune à cause du temps. Je n'aime pas cette maison.

Je prend une grande inspiration et pénètre, sans frapper, à l'intérieur. L'odeur de la viande embaume mes narines et me coupe immédiatement l'apétit. Anna est à la cuisine, elle se dandine tout en cassant un oeuf. Alexandre referme la porte d'entrée, ce qui attire l'attention d'Anna, qui s'élance vers nous, en souriant, avec son tablier "Ici, la Chef c'est moi !".

Je ne trouve pas Christian.

- Coucou ! Lance-t-elle enjouée.

Malgré que je m'efforce à la détester, j'ai du mal. Je l'insulte à longueur de temps, mais à chaque fois que je la vois me sourire et s'inquiéter pour moi, ça me radoucit. Elle est sympa et c'est la seule personne, j'ai l'impression, qui n'essaye pas de me rabibocher avec Christian, c'est en partie pour ça que j'ai tout de même réussi à la tolérer.
Ce qui était loin d'être le cas au début. Pas parce qu'elle a remplacé ma mère ou autre connerie du genre puisque ma mère ne valait pas mieux, mais parce qu'elle vouait tout son amour à Christian, alors qu'il ne mérite pas d'être aimé. Je voulais simplement qu'elle parte et qu'elle le laisse tomber. Ce que je cherche encore à faire par tous les moyens possibles et imaginables. Anna a aussi été une bénédiction pour mon frère et moi. Elle a réussi à faire changer Christian radicalement. Il n'est plus violent. Ou du moins, c'est ce qu'il prétend devant sa bien-aimée mais au fond, il est toujours le même.

Elle s'approche de moi, on se fait la bise. Elle retourne de suite en cuisine après avoir fait un bisou à Alexandre.

Je remarque que la table est déjà mise et qu'il y a un bouquet de fleurs qui est exposé au milieu de celle-ci. Je déteste les dîners de famille. Ça l'a toujours été, mais ça s'est amplifié depuis le décès de ma mère. Le simple fait de me retrouver devant Christian, me répugne et fait ressortir toute la colère et la noirceur contenue à l'intérieur de moi. Alexandre s'est avachi sur la canapé du salon, il regarde un match de foot.

- Chanel, tu veux bien m'aider ? Me demande Anna depuis la cuisine bruyante.

Je me décide à y aller, de toute façon, je n'ai rien de spécial à faire.
Lorsque j'y arrive, je vois que tout est presque déjà fait. Les morceaux de viande sont étalés sur chacune des assiettes accompagnés d'une moyenne portion de riz fumant.
Elle me sort une salade qu'elle me demande de découper. Je m'exécute.

Le coupage de salade s'est transformé en règlement de compte silencieux. J'imagine la tête de Christian à la place de ce pauvre légume. Je donne des coups de couteau violents.

Voyant mon acharnement face à cet aliments, elle me regarde, je garde le regard rivé sur ma salade.

- Tu vas bien ? Elle semble inquiète et préoccupée.

Je ne sais pas quoi répondre. Mon état d'esprit se lit sur mon visage mais elle veut une réponse orale. Pour être sûre. Soit je lui dis que tout va bien, ce qui serait mentir ou alors je lui exprime mes émotions. Ce que je ne fais jamais alors j'affirme :

Un Simple PariOù les histoires vivent. Découvrez maintenant