CHAPITRE 19

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PDV OPHELIA

- Je pensais que Louis et toi vous n'étiez que des amis  ?

Mon père est à table en train de prendre son petit déjeuner. Sans relever le tête de son journal, il ajoute  :

- Que je sache, des amis ne dorment pas ensemble...

Je ne comprends pas où il veut en venir, ça ne le regarde pas. Et puis qu'est-ce qu'il connaît de l'amitié homme-femme  ? Tous ses collaborateurs et amis sont des hommes donc pour la leçon de morale, tu repasseras. Je me sens déjà mal, pas besoin d'en rajouter.

La nuit dernière, Louis m'avait avoué ses sentiments, il m'avait dit les trois petits mots tant redoutés... Mais qu'est-ce qu'il lui était passé par la tête  ? Ces mots ne devaient jamais être prononcés... tel était notre accord...

...

- Si l'on couche ensemble, tu dois me promettre que tu ne tomberas jamais amoureux de moi.

- Pourquoi parles-tu d'amour  ?

- Parce que je ne veux pas que tu souffres...

- Tu parles comme si aimer était une mauvaise chose.

- Oh, crois-moi ça l'est. L'amour conduit tôt ou tard à la souffrance. Il est source de discorde et finit par nous affaiblir.

- Ophélia, tu ne peux pas t'interdire d'aimer, ça ne se contrôle pas...

- Si je le peux, et je peux affirmer que l'amour et moi ça fait deux, nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde...

- N'importe quoi  !

- Promets le moi  !

- Promis.

...

Et voilà, comme quoi les promesses ne sont plus ce qu'elles étaient. Il l'a dit... Je ne lui avais pas répondu, j'avais détourné la tête et fait abstraction de ses paroles qui n'avaient pas véritablement de sens pour moi. L'amour est pour les faibles et je n'appartiens pas à cette catégorie de gens. Je suis forte et je ne laisserais personne me dévier de la route que je me suis tracée, même pas Louis. Pourtant, j'ai énormément d'affection pour lui, il est mon meilleur ami...

En fin de compte, peut-être que mon père n'avait pas tord quand il affirmait qu'une amitié homme-femme était impossible. Je ne sais plus, je suis perdue, tout se mélange dans mon esprit, à croire que Louis avait fait exprès d'y semer le trouble.

Mon père vient de lever les yeux dans ma direction attendant une réponse de ma part  :

- Oui, je sais ce que tu penses... Je n'ai pas très envie de parler de Louis et moi si tu veux bien.

D'ailleurs, je n'ai pas envie de parler tout court avec lui, car je n'ai pas oublié le coup qu'il m'a fait. Me mettre devant le fait accompli était très bas même pour Syracuse Brémont.

- Comme tu voudras, mais attention à ce que tu vas faire par la suite. Louis est un gentil garçon, ne maltraite pas son cœur si telle est ton intention.

- Je ne pourrais jamais lui faire du mal. Pour qui me prends-tu  ?

- Consciemment non, mon trésor, mais on sait tous les deux que ta vision de l'amour est loin d'être celle du commun alors garde dans un coin de ta tête la douleur qu'il pourrait ressentir quand tu l'éconduiras...

Mon père savait très bien de quoi il parlait, il avait été la première victime de mon incapacité à formuler ce que je ressentais. Je n'avais jamais prononcé les trois petits mots, jamais...

Ce qui m'a valu de nombreuses et coûteuses thérapies qui n'avaient rien donné. Tous s'accordaient à dire que mon mal était incurable tant que mes relations maternelles resteraient inexistantes.

En conclusion, la solution serait donc ma génitrice, voilà pourquoi mon père s'entête à vouloir que je me rapproche de Marla. Mais ce qui complique la résolution de la présente équation, c'est que Marla est un poison et non un vaccin.

Ma venue au monde pour elle est synonyme de fléau, je lui avais volé la meilleure partie d'elle, selon ses dires, alors je vous laisse imaginer ce qu'il en reste. Autrement dit, elle est l'arbre aux feuilles flétries et moi je suis la pomme pourrie. Que voulez-vous faire avec ses ingrédients corrompus  ? Rien qui donne envie en tout cas...

- Je sais papa, ne t'inquiètes pas pour Louis, c'est un grand garçon et nous savons exactement ce que nous faisons.

Enfin moi, visiblement ce n'est plus son cas. Mais cette dernière information mon père n'a pas besoin de la connaître, il en sait déjà trop à mon goût...

Considérant que cette conversation est terminée, j'enfouis ma tête dans l'assiette que m'a préparé Carmen mais c'est sans compter la ténacité de mon père  :

- Ophélia, j'espère que tu réaliseras assez vite que le sexe sans amour est moins épanouissant que lorsque deux personnes s'aiment...

Je manque de m'étouffer, mon père vient-il de dire le mot sexe  ? Pas que je sois coincée mais parler de ce sujet avec mon père fait naître en moi une certaine gêne...

- A-t-on besoin d'aborder ce sujet  ?

- Trésor, les sujets tabous n'ont pas lieu d'être entre nous  !

- Vraiment  ?

- Oui, qu'est-ce que tu t'imagines  ? Je suis réaliste Ophélia, je me doute bien qu'à 22 ans, tu n'es plus vierge  !

Oh mon dieu  ! Je sens que je vais rougir...

- Bon sur ces sages paroles, je m'en vais...

Je me lève à toute vitesse comme si quelqu'un était à mes trousses, il faut à tout prix que je quitte ces lieux avant d'attendre d'autres mots tout droit sortis de la bouche de mon père qui me mettraient plus mal à l'aise que je ne l'étais déjà.

Je franchis la porte de l'appartement sous les protestations de Carmen qui jure encore et toujours.

- Me vuelva loca* (Elle va me rendre folle)

Je sais, je sais Carmen je mangerais plus tard, promis. Tout en attendant l'ascenseur, mon téléphone attire mon attention, un sms...

Aime-moi ... (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant