Chapitre Quarante sept

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Mélaine

Avez-vous déjà vu votre vie basculer sans pouvoir rien y changer? Voir l'homme de votre vie se sacrifier à votre place? Être impuissante, ne pouvant rien faire pour le sauver alors qu'il était entre la vie et la mort à cause de votre faute. Être percuté de plein fouet par une voiture dont le conducteur était votre mère! Non, Christiana n'était pas ma mère, simplement ma génitrice. Génitrice qui venait de détruire ma vie comme jamais comme elle l'avait autrefois détruit, onze ans de cela!

-"Thomas!" hurlais-je sentant mes cordes vocales se briser à la fin lorsque ses yeux se fermèrent m'arrachant un cri d'impuissance, de désespoir absolu. -"Non, je t'en supplie, mon amour! Fais pas ça, ne meurt pas."

Mes larmes s'échouèrent lamentablement sur lui. Sa main glissa d'une lenteur meurtrière de mon ventre, où quelques secondes plus tôt, il m'avait sourit en sachant que je portais son bébé, notre bébé. Était-ce son dernier sourire? Était-ce le dernier souvenir que je garderais de lui alors qu'il y avait de nombreuses choses que nous voulions découvrir, qu'il y avait tant à découvrir? Était-ce tout simplement la fin? Notre fin?

-"Pitié, faites que ça ne le soit pas," murmurais-je comme une inlassable prière joignant nos deux mains ensanglantées alors que les ambulanciers arrivèrent enfin.

Ils le prirent immédiatement en charge, le mettant dans l'ambulance lui administrant plusieurs perfusions de sang. Tenant toujours sa main, remettant ses mèches blondes désormais tachetées de sang, je me rapprochais de son visage où on lui avait mis un masque à oxygène car il avait des difficultés à respirer.

-"Est... Est-ce qu'il va s'en sortir?" demandai-je à l'un des ambulanciers qui me regarda avec une lueur de compassion.

-"Il est inconscient cependant il a perdu énormément de sang."

-"Sauvez-le, je vous en prie," la suppliai-je, les larmes aux yeux à cette vue effroyable de voir min fiancé se battre pour ne pas tout simplement succomber à ses nombreuses fractures.

-"Nous ferons tout notre possible, mademo..."

-"Madame," la rectifiais-je.-"Je suis sa femme."

Sa femme! Pourrais-je un jour l'entendre prononcer ce simple mot ou même parler en allemand malgré le fait que je n'y comprenais rien de sa langue natale? Mon être entier était en agonie alors qu'on le transportait en bloc opératoire.

Était-ce si grave que ça? Je fermais immédiatement les yeux dès que les visions de l'accident survinrent. Son corps projeté brutalement sur l'asphalte, le sang qui s'écoulait abondamment de son corps meurtri, sa bouche qui recrachait du sang, son visage éraflé par l'impact de l'accident, pourtant ce qui m'obnubilait fut ses yeux.

Ses tourmalines paraïba illuminants à l'annonce de ma grossesse, son regard aimant transperçant mon âme alors que ma mère biologique venait de lui rouler dessus. Aucune once de colère ni de haine alors qu'il pourrait bientôt rendre l'âme d'un moment à l'autre par ma faute!

-"Pourquoi?" demandais-je à moi même lorsqu'un silence à vous donner des sueurs froides, signe d'un mauvais présage, s'était installé dans le couloir où j'attendais avec une angoisse, une incertitude que je n'arrivais plus à tenir.

Pourquoi à chaque fois où le bonheur m'était à portée de main et que je tendais la main pour le garder précieusement, un malheur venait toujours de s'abattre sur moi? Était-ce une punition? Qu'avais-je fait pour mériter tout ça?

Me recroquevillant sur l'un des fauteuils, je laissais mes larmes parler à ma place avant de me ressaisir. Non, il ne fallait en aucun cas abandonner! Thomas n'aurait jamais aimé que je versais tous les larmes de mon corps s'il lui arrivait quoi que soit. Non, mon blondinet m'aurait sûrement serré dans ses bras et m'ordonner de rester forte et ne pas baisser les bras tout comme il le faisait maintenant dans le bloc opératoire où je mettrais ma main aux feux qu'il devait lutter de toutes ses forces sachant désormais que son rêve le plus cher venait de se concrétiser et qu'il allait bientôt, plus précisément dans huit mois, être papa.

Et il le serait! Thomas n'étais pas mort, simplement inconscient! Il allait survivre! Nous n'avions pas fait tout ce chemin ensemble pour finalement s'en aller et abandonner!

-"Allô?" décrochais-je lorsque mon portable vibra dans ma poche.

-"Mél, où es-tu? Il y a eu un accident près du supermarché où tu es allé. C'est sur la télé," débita d'un trait Chérylle inquiète.

-"Je suis à l'hôpital," lui dis-je d'un souffle tremblant.

-"Mél, que se passe-t-il?"

-"C'est Christiana," lui avouais-je, les larmes qui s'écoulaient et m'empêchaient de parler. -"Elle... Sa voiture a renversé Thomas."

-"J'arrive tout de suite. Je préviens Ethan..."

Néanmoins, je n'entendais plus rien. Sa voix me semblait lointaine. Le portable glissa de ma main pour se briser sur le sol tandis que je m'écroulais à nouveau devant cette attente des plus insupportables. Pourtant, au but de ce tunnel des ténèbres où je me trouvais, une lumière vint subitement l'éclairer lorsque je relevais la tête pour voir le docteur qui s'occupait de Thomas.

-"Comment va-t-il docteur?" lui demandais-je, en essuyant mes larmes.

-"Asseyez-vous, Madame," me conseilla-t-il en m'indiquant l'un des fauteuils.-"Tout d'abord, nous avons trouvé celui dans sa poche."

Mon regard meurtri croisa le sien dès qu'il me remit entre les mains un écrin. L'ouvrant, un cri de désespoir s'échappa de mes lèvres en y voyant une bague.

-"Alors, il avait réellement tout prévu," pensais-je en sentant un étau serrer davantage mon coeur.

-"Thomas présente de nombreuses fractures au niveau du crâne mais heureusement, sa colonne vertébrale n'est pas touché," débuta le docteur.

-"Mais?" lui demandais-je sachant qu'il me cachait malheureusement quelque chose.-"S'il vous plait, docteur, dites moi la vérité."

-"Son état est critique," continua-t-il.-"Il peut d'un moment à l'autre mourir. On doit l'emmener à nouveau au bloc car il peut très bien avoir une hémorragie interne. Les blessures à la tête sont nombreuses..."

Je déglutis avec peine à la fin de son diagnostic. Mourir? Thomas allait mourir.

-"Puis-je le voir?" lui demandai-je, tremblante.

-"Vous avez que quelques minutes."

J'ouvris d'une main tremblante la porte. Ma gorge sèche fut incapable d'énoncer le moindre bruit dès,que j'aperçus Thomas, allongé sur un lit d'hôpital, plusieurs tubes qui étaient reliés à une machine pour lui permettre de respirer.

-"Mon amour," dis-je, en caressant ses cheveux.-"Le docteur ment, tu m'entends, tu ne vas pas mourir. Tu voulais plusieurs de nous, alors tiens bon et nous aurons des dizaines, si tu veux des milliers d'enfants," ajoutais-je, les larmes me brouillant la vue.-"Je t'en supplie, mon amour, vie, bat toi, tu peux le faire. Je t'aime tellement, mon coeur alors bat toi et reviens moi," le priais-je scellant ma bouche sur son front avant qu'un bruit d'une des machines m'alerta.

-"Sortez, madame," m'ordonna le docteur.

L'une des infirmières me conduisit dehors malgré mes protestations.

-"Que se passe-t-il?" m'écriais-je.

-"Nous sommes en train de le perdre," parvenais-je à entendre me laissant sa voix.

La porte se referma aussitôt avec cette dernière image de lui, en train de rendre les armes contre la mort.

-"Non, je t'en supplie, Thomas, ne nous abandonne pas," murmurais-je, tenant mon ventre croyant qu'il ne me restait que lui, ce petit être désormais.

Is It Desire! Tome 2 (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant