Entre les barres

Chapitre 8

Bonne année 2019 ! ❤

Chapitre 8.

Isaac attendit le matin, à l'heure de la douche, pour attirer l'attention d'un gardien – sous le regard menaçant d'un détenu ou deux – et demander un rendez-vous avec l'administration. Il l'obtint pendant le déjeuner.

Menotté et flanqué de deux agents de sécurité, Isaac se tint sur une solide chaise, tandis que l'homme qui gérait toute la prison lui faisait dos. Il portait un élégant complet noir qui contrastait avec les vêtements usés des prisonniers et son propre uniforme orange. Quand il se retourna, Isaac vit qu'il ne devait pas être très vieux, peut-être la mi-trentaine, pas plus. Il était caucasien avec un visage harmonieux et des cheveux bruns bien plaqués avec du gel.

— Alors, pour quelle raison avez-vous souhaité un rendez-vous avec l'administration ?

Le directeur jeta un œil à ses dossiers sur l'ordinateur de son bureau.

— Ça ne fait pas longtemps que vous êtes arrivés parmi nous et pour... hum... une peine de huit ans.

Isaac déglutit, crispant ses poings sur ses genoux.

— Je souhaite être mis à l'isolement, monsieur.

— Monsieur Grayson, le corrigea-t-il. Pourquoi l'isolement ? Vous avez quelque chose à vous reprocher.

Il secoua la tête.

— Je ne me sens pas en sécurité, Monsieur Grayson.

— Pour quelles raisons ?

— Je me sens menacé par les différents groupes. Je suis une proie facile, Monsieur, et je n'ai pas envie de m'attirer des problèmes en rejoignant l'un d'eux.

Il devait sortir de cet enfer avant qu'il ne soit trop tard. S'il demandait à être changé de cellule, les amis de Chaz – voir l'homme en personne – lui tomberait dessus et ça en serait fini de lui. Il devait penser à sa survie.

— Sage décision que de ne pas rejoindre de groupe.

Le directeur marqua une pause, puis reprit, pensif :

— Vous savez que vous n'aurez pas de traitement de faveur si vous décidez d'aller en isolement, n'est-ce pas ? lui demanda le trentenaire en plissant légèrement les yeux, dubitatif quant à sa demande.

Il baissa la tête.

— Je sais.

C'était la seule solution.

— C'est un quartier disciplinaire, s'assura Grayson. Pas de sortie, pas de divertissement, pas de visite. Vous êtes certain que c'est ce que vous voulez ?

— Oui, souffla-t-il.

— Dans ce cas, je vais valider votre transfert immédiat.

Isaac fut autorisé à se relever et, toujours encadré par les deux gardiens, il fut d'abord fouillé, puis conduit au quartier d'isolement. La plupart des prisonniers qui se trouvaient ici ne l'avaient pas choisi. L'aile était utilisée pour punir les détenus les plus turbulents. Quand il entra dans le long couloir flanqué de portes avec, pour seule ouverte, une toute petite fenêtre rectangulaire, il en frissonna. Les prisonniers criaient et l'insultaient derrière les portes. Il pouvait parfois voir leur œil menaçant dans la petite fenêtre.

On le conduit dans une cellule vide, encore plus petite que celle qu'il partageait avec Chaz, on lui retira les menottes et la porte se referma derrière lui, inviolable.

Enfin seul, pensa-t-il en s'effondrant sur sa couchette. Enfin, il ne craignait plus rien. Chaz le laisserait en paix.

Un peu plus tard, par la trappe de la porte, un plateau contenant son déjeuner lui fut apporté. Il mangea seul, regrettant tout de même un peu la présence agréable et instructive de Wayne.

Il passa la journée allongée sur sa couchette, ne bronchant que pour manger les trois repas obligatoires. Se reposer lui faisait du bien. Il avait l'impression de pouvoir fermer l'œil sereinement pour la première fois depuis son arrivée à la prison de West Island.

Enfermé vingt-trois heures sur vingt-quatre, il n'avait droit qu'à une heure pour faire une sortie destinée à lui laisser prendre sa douche et à lui faire faire un tour de la cour, afin qu'il se dégourdisse les jambes et fasse de l'exercice physique comme tous les autres détenus. Cette sortie avait lieu de nuit pour limiter les risques d'altercation avec les prisonniers en détention régulière.

Il avait cru que l'isolement serait la solution à tous ces problèmes, mais il y avait peut-être une variable qu'il n'avait pas pris en considération suffisamment longtemps dans son plan...